XVII

Que dire alors de ceux à qui ces mots ne peuvent s'appliquer, même dans la signification restreinte que leur donne le faible langage des hommes ? — Que dire des travailleurs de second et de troisième ordre, des hommes d'État, des savants, des artistes — des artistes surtout ? Que faire pour les obliger à secouer leur lourde paresse, leur morne indécision ? Pour les attirer de nouveau sur le champ de bataille, quand ils sont obsédés de l'idée que toute activité qui se propose un but plus élevé que le pain quotidien est vaine et fastidieuse ? Quelles couronnes pourraient encore les tenter lorsqu'ils se sont rendu compte de l'insignifiance de tous les lauriers et de toutes les épines ? Comment les forcer à braver de nouveau les lazzi de la « foule glacée » ou le « jugement du sot » : le vieux sot qui ne leur pardonne pas de s'être détournés des idoles d'hier, et le jeune qui voudrait qu'ils fassent comme lui et se jettent à plat ventre devant les idoles d'aujourd'hui ? Pourquoi donc iraient-ils dans ce marché de fantômes, à cette foire où le marchand et l'acquéreur se volent mutuellement, où l'on parle si haut, où il règne un tel bruit, mais où tout est si pauvre et mesquin ? Pourquoi donc, « las jusqu'à la moelle des os », iraient-ils encore se traîner dans cet univers où les peuples se conduisent comme ces fils de paysans, qui, les jours de fête, se vautrent dans la boue pour récolter une poignée de noix vides ou béent d'admiration devant une image d'Épinal grossièrement barbouillée ; dans cet univers où seul existe ce qui ne devrait pas exister, où chacun, assourdi par ses propres cris, court vers un but qu'il ignore et ne peut comprendre ?

Non… non… Assez !… assez !… assez !…

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