X

Nous étions tous les deux, pas mal pleins en sortant, et je me mis au volant malgré les protestations de Dexter.

– Je ne tiens pas à ce que vous m’abîmiez le portrait pour samedi. Vous regardez toujours ailleurs en conduisant et ça me donne chaque fois l’impression de mourir.

– Mais vous ne connaissez pas le chemin, Lee.

– Eh bien quoi, dis-je, vous allez me l’expliquer.

– C’est un quartier de la ville où vous n’allez jamais et c’est compliqué.

– Oh ! Vous m’assommez, Dex. Quelle rue ?

– Bon, eh bien menez-nous au 300 de Stephen’s Street.

– C’est par là ? demandai-je en pointant un index vague dans la direction du quartier ouest.

– Oui. Vous la connaissez ?

– Je connais tout, assurai-je. Attention au démarrage.

Cette Packard, c’était un velours à conduire. Dex ne l’aimait pas et préférait la Cadillac de ses parents ; mais à côté de la Nash, du véritable miel.

– C’est à Stephen’s Street que nous allons ?

– À côté, dit Dex.

Malgré la quantité d’alcool qu’il avait dans les tripes, il tenait le coup comme un chêne. À croire qu’il n’avait rien bu.

Nous arrivions en plein dans le quartier pauvre de la ville. Stephen’s Street commençait bien, mais dès le numéro 200, ça devenait des logements à bon marché, et puis des baraques à un seul étage, de plus en plus minables. Au 300, ça se tenait encore debout. Il y avait quelques vieilles voitures devant les maisons, presque de l’époque du T de Ford. J’arrêtai la bagnole de Dex devant l’endroit indiqué.

– Venez, Lee, dit-il. On marche un bout.

Il ferma les portes et nous nous mîmes en route. Il tourna dans une rue transversale et fit une centaine de mètres. Il y avait des arbres et des clôtures démolies. Dex s’arrêta devant une bâtisse de deux étages dont le haut était en planches. Par miracle, le grillage, autour du tas de détritus qui constituait le jardin, était à peu près en bon état. Il entra sans prévenir. Il faisait presque nuit et les recoins grouillaient d’ombres bizarres.

– Venez, Lee, dit-il. C’est ici.

– Je vous suis.

Il y avait un chèvrefeuille devant la maison, un seul, mais son odeur suffisait à couvrir les relents d’immondices qui s’accumulaient un peu partout. Dex grimpa les deux marches de l’entrée qui était sur le côté de la maison. Une grosse négresse vint ouvrir en réponse à son coup de sonnette. Sans rien dire, elle nous tourna le dos et Dexter la suivit. Je refermai la porte derrière moi.

Au premier, elle s’effaça pour nous laisser passer. Dans une petite pièce, il y avait un divan, une bouteille et deux verres, et deux gosses de onze à douze ans, une petite rouquine ronde et couverte de taches de rousseur, et une jeune négresse, la plus âgée des deux, à ce qu’il semblait. Elles étaient sagement assises sur le divan, vêtues chacune d’une chemisette et d’une jupe trop courte.

– Voilà des messieurs qui vous apportent des dollars, dit la négresse. Soyez bien sages avec eux.

Elle referma la porte et nous laissa. Je regardai Dexter.

– Déshabillez-vous, Lee, dit-il. Il fait très chaud, ici.

Il se tourna vers la rousse.

– Viens m’aider, Jo.

– Je m’appelle Polly, dit l’enfant. Vous allez me donner des dollars ?

– Certainement, dit Dex.

Il tira de sa poche une coupure de dix froissée et la jeta à la gosse.

– Viens m’aider à défaire mon pantalon.

Je n’avais pas encore bougé. Je regardai la rouquine se lever. Elle devait avoir un peu plus de douze ans. Elle avait des fesses bien rondes sous sa jupe trop courte. Je savais que Dexter me regardait.

– Je prends la rousse, me dit-il.

– Vous savez que nous risquons la taule pour ce truc-là.

– C’est la couleur de sa peau qui vous gêne ? me lança-t-il brutalement.

C’est ça qu’il me réservait. Il me regardait toujours, avec sa mèche sur l’œil. Il attendait. Je crois que je n’ai pas changé de couleur. Les deux gosses ne bougeaient plus, un peu effrayées…

– Viens Polly, dit Dex. Veux-tu boire un petit verre ?

– J’aime mieux pas, dit-elle. Je peux vous aider sans boire.

En moins d’une minute, il était déshabillé et prit l’enfant sur ses genoux en lui relevant sa jupe. Sa figure devenait sombre et il commençait à souffler.

– Vous n’allez pas me faire de mal ? dit-elle.

– Laisse-toi faire, répondit Dexter. Sinon, pas de dollars.

Il lui fourra sa main entre les jambes et elle se mit à pleurer.

– Tais-toi ! dit-il. Ou je te fais battre par Anna.

Il tourna la tête vers moi. Je n’avais pas bougé.

– C’est la couleur de sa peau qui vous gêne ? répéta-t-il. Voulez-vous la mienne ?

– Ça va comme ça, dis-je.

Je regardai l’autre gosse. Elle se grattait la tête, absolument indifférente à tout ça. Elle était déjà formée.

– Viens, lui dis-je.

– Vous pouvez y aller, Lee, dit Dex, elles sont propres. Vas-tu te taire ?

Polly s’arrêta de pleurer et renifla un bon coup.

– Vous êtes trop gros… dit-elle. Ça me fait mal.

– Tais-toi, dit Dex. Je te donnerai cinq dollars de plus.

Il haletait comme un chien. Et puis il la saisit par les cuisses et commença à s’agiter sur la chaise. Les larmes de Polly coulaient maintenant sans bruit. La petite négresse me regardait.

– Déshabille-toi, lui dis-je, et va sur ce divan.

Et puis je retirai ma veste et je défis ma ceinture. Elle poussa un léger cri lorsque j’entrai en elle. Et elle était brûlante comme l’enfer.

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