Le château de Fontainebleau était appuyé à un parc immense dont on peut voir encore de beaux restes.
Ce parc était clos de hautes murailles.
Lorsque François Ier venait habiter le château, on plaçait des gardes tout le long de ces murailles, à l’intérieur.
Il y avait un garde à peu près tous les cent pas.
Triboulet était déjà venu deux fois à Fontainebleau avec le roi. Il n’ignorait aucun de ces détails.
Pourtant, c’est par le parc qu’il avait résolu de s’introduire dans le château. Il avait exposé son plan à Ragastens et à Manfred.
Entrer coûte que coûte dans le parc et tâcher de savoir en quel endroit du château se trouvait enfermée Gillette.
Une fois ce point acquis, il connaissait assez la disposition des logis et appartements pour pouvoir, par une nuit obscure, guider ses amis.
Alors, ils pénétreraient à eux quatre dans le château, décidés à tuer tout ce qui ferait obstacle, arriveraient à Gillette, et l’enlèveraient, puis ils partiraient pour l’Italie.
Dès le premier soir de l’arrivée, Triboulet, accompagné de ses trois amis, alla étudier les abords du château.
En passant devant la somptueuse façade, Ragastens et Manfred se rendirent très bien compte de l’impossibilité d’une attaque autrement que par le parc.
La cour était pleine d’hommes d’armes.
Du côté du parc, au contraire, tout était sombre et désert. Ils longèrent le mur.
De l’autre côté, ils entendaient parfois le cri de veille des sentinelles qui se répondaient l’une à l’autre.
Ils parvinrent au fond du parc. Là, par endroits, le mur était en mauvais état. Des pierres étaient tombées ; il y avait des trous.
Ils rentrèrent sans avoir, ce soir-là, rien pu tenter.
Le lendemain et les jours suivants se passèrent de même ; tous les soirs, au seul endroit que l’on pût escalader, il y avait une sentinelle.
Chacun des quatre songeait avec répugnance qu’il faudrait en arriver à tuer un homme inoffensif ou à renoncer à l’entreprise.
Dix mortelles journées s’écoulèrent ainsi.
Manfred se désespérait, et son désespoir l’affolait. Il parlait d’entrer au château en plein jour, de braver le roi, de le provoquer !…
Le soir du onzième jour, Ragastens et Triboulet conférèrent à voix basse.
– Il faut en finir ! dit Triboulet d’un air sombre.
– Je vous comprends… la sentinelle ?… Triboulet haussa les épaules.
– Puisqu’il n’y a pas moyen de faire autrement, dit-il.
– C’est donc moi qui m’en chargerai, dit Ragastens.
Il espérait qu’il pourrait tomber sur le soldat et le bâillonner assez vite pour l’empêcher de crier…
Pour la onzième fois, donc, les quatre compagnons revinrent au mur.
Il était environ dix heures du soir.
– Je monte, dit Ragastens à voix basse, en arrivant à l’endroit favorable. Dès que la chose sera faite, j’appellerai. Vous passerez l’un après l’autre, et après… nous verrons.
Àce moment le cri de veille retentit au loin. Il se répéta de proche en proche.
Et enfin, il fut redit par le soldat qui se trouvait en face de Ragastens, de l’autre côté du mur.
Àla voix du soldat, Triboulet tressaillit.
Il s’élança, saisit la main de Ragastens.
– Attendez ! fit-il. C’est moi qui monte.
Dix secondes plus tard, il était au haut du mur, et faisait signe à ses amis de garder le plus profond silence.
Il voyait distinctement la sentinelle immobile, appuyée sur la hampe de sa hallebarde.
Àvoix basse, Triboulet appela :
– Ludwig !…
Le soldat sursauta.
– Qui m’appelle ? s’écria-t-il.
– Parle plus bas… approche-toi… là ! Ne reconnais-tu pas un ami ? Par la mort-dieu, je ne t’ai point oublié, moi !
– Monsieur Triboulet ! fit le soldat, reconnaissant la voix. Mais vous étiez à la Bastille, disait-on ?
– Ah ! ah ! Et qui disait cela, mon brave Ludwig ?
– Mais tout le monde. C’est M. de Montgomery qui vous arrêta et vous conduisit lui-même en la forteresse Saint-Antoine.
– Diable ! Eh bien, tu vois, si j’étais à la Bastille, j’en suis sorti.
– Vous en êtes sorti ! fit le Suisse ébahi.
– Tout exprès pour venir te demander si tu as toujours envie de revoir la montagne de la Jungfrau, d’aller écouter le « Ranz des Vaches », d’aller embrasser ta fiancée… ta… comment l’appelles-tu déjà ?
– Catherine ! dit le soldat attendri.
– Oui, Catherine. Eh bien, mon bon Ludwig, te souviens-tu de ce que je t’ai promis au Louvre ?
– Si je m’en souviens, par le diable ! Je ne pense qu’à cela, et vous m’avez mis la cervelle à l’envers… Mille écus !…
– De six livres parisis ! De quoi faire bâtir une métairie dans la vallée où tu es né, où tu épouseras ta Catherine, et où tu passeras ton heureuse existence à engendrer toute une nichée de petits Ludwig !
– Monsieur Triboulet, fit le soldat, vous venez encore me tenter !
– Mais pas du tout ! Je viens seulement te dire que je suis prêt à tenir ma promesse.
– Les mille écus !…
– Tu n’as qu’à venir les prendre.
– Où cela ?… s’écria le soldat, enflammé.
– Àl’auberge du Grand-Charlemagne.
– Quand ?…
– Quand tu voudras.
– Ah ! vous êtes vraiment un bon homme de vous déranger tout exprès…
– Pour t’apporter la fortune, c’était chose promise !
– C’est vrai, mais je n’eus pas l’occasion de vous rendre le service que vous me demandiez, et je pouvais croire…
– Aussi, mon cher Ludwig, je vais te demander un autre service.
– Ah ! ah ! fit le Suisse désappointé.
– Beaucoup moins dangereux que le premier que tu consentais pourtant à me rendre… Cependant, je ne veux pas te violenter. Il ne manque pas de Suisses dans les gardes, qui ne demanderont pas mieux de gagner honnêtement mille livres en faisant une bonne action…
– Une bonne action qui pourra sans doute me conduire au gibet !
– Oui, si tu es maladroit et si tu manques d’argent. Mais tu es adroit, Ludwig, et tu auras de l’argent…
– Que faut-il faire ? demanda Ludwig.
– Simplement fermer les yeux et te boucher les oreilles pendant deux minutes…
– Vous voulez pénétrer en secret dans le château ?
– Oui !… Et puis te demander un renseignement que tu pourras peut-être me donner. Mais le renseignement est par-dessus le marché.
– Dites toujours.
– Tu as entendu parler d’une jeune fille que le roi a fait amener au château, la veille même du jour où il est arrivé lui-même…
– Vous voulez parler de Mme la duchesse de Fontainebleau ?
– Oui ! fit Triboulet ému.
– Pauvre demoiselle, elle a l’air bien triste !
– Oh ! s’écria Triboulet, tu l’as donc vue ?
– Deux fois, les deux jours où j’ai été mis en faction près du château ; elle est descendue dans le parc.
– Seule ? fit Triboulet haletant.
– Accompagnée de deux femmes.
– Et a-t-elle pénétré loin dans le parc ?
– Oh ! non !…
– Ludwig ! veux-tu gagner, non pas mille écus, mais le double ! le triple ; tout ce que je possède ! Veux-tu être riche comme un bourgeois ? Dis, le veux-tu ?
– Silence ! fit Ludwig à voix basse.
Triboulet entendit des pas qui s’approchaient.
C’était une ronde.
Il s’aplatit sur la muraille, le cœur tremblant à la pensée que Ludwig ferait tout ce qu’il voudrait.
La ronde conduite par un officier s’approcha ; l’officier échangea quelques mots avec Ludwig, puis s’en alla.
– Quand seras-tu encore de faction, Ludwig ?
– Après-demain.
– Àcette même place ?
– Je puis m’arranger pour y être.
– Bon ! Te charges-tu, demain, de t’approcher de la duchesse de Fontainebleau ?
– Oui… Elle n’est pas fière ; il lui est arrivé déjà d’adresser la parole à des camarades.
– Eh bien ! dis-lui qu’elle se trouve après-demain dans le parc à l’heure de la faction.
– C’est-à-dire à dix heures du soir… Mais à quel endroit ?
– Près du grand bassin aux carpes. Acceptes-tu ?
– J’accepte !
– Répète un peu ce que je t’ai dit.
– Demain, je m’approche de la jeune duchesse, j’attire son attention, elle me parle, et je lui dis : « Demain, à dix heures du soir, M. Triboulet sera près du bassin aux carpes. » Ai-je bien compris ?
– Oui, mon brave Ludwig. Donc, à après-demain soir, dix heures, ici même.
– C’est entendu.
– Et après, tu fuis avec nous, et riche désormais, tu te sauves en Suisse…
– Ô ma Catherine ! soupira le Suisse. Triboulet se laissa glisser au bas du mur.
Ils rentrèrent à l’auberge du Grand-Charlemagne. Le lendemain, Spadacape se procura une chaise de voyage qu’il acheta. Le jour du lendemain fut un jour de fièvre.
Triboulet ne tenait pas en place, causait tout seul à haute voix, serrait la main de Ragastens.
Manfred paraissait plus calme, mais une profonde émotion l’agitait. Àhuit heures, il dit :
– Partons !
C’était un peu trop tôt. Mais Ragastens comprit que le jeune homme n’y tenait plus.
Tous les quatre s’équipèrent, s’armèrent en toute hâte et descendirent dans la rue. Àce moment, un cavalier apparut au tournant de la rue des Fagots.
En apercevant Manfred, il poussa une exclamation de joie, arrêta son cheval et sauta à terre.
Le cheval s’abattit alors ; il était fourbu et rendait le sang par les naseaux.
Manfred avait affreusement pâli.
Il venait de reconnaître Cocardère.
– Lanthenay ? interrogea-t-il anxieusement.
– C’est lui qui m’envoie. Tenez.
Il tendit un pli à Manfred.
Alors, tous ensemble, ils rentrèrent dans l’auberge. Manfred, lentement, ouvrit le pli, et lut :
« Midi.
« C’est pour demain matin, sept heures.
« On va brûler Dolet.
« Si je n’arrive pas à l’enlever pendant le trajet de la Conciergerie à la place de Grève… ô mon ami, mon frère… tu comprends !
« Je t’attends !… »
Silencieusement, Manfred tendit la lettre à Ragastens qui la lut, puis la fit lire à Triboulet.
Ragastens s’assit.
Quant à Triboulet, il était comme assommé.
– Mais, bégaya-t-il, les lèvres blanches, mais… tu peux partir… après !…
– Après ! fit Manfred avec une imprécation de désespoir ; après, il sera peut-être minuit, une heure… trop tard pour arriver à temps !
Brusquement, il se tourna vers Cocardère qui assistait à cette scène, sans comprendre ce qu’elle avait de poignant.
– Va à l’écurie, dit-il, et selle deux chevaux. Spadacape va t’indiquer les meilleurs. Hâte-toi !
Spadacape et Cocardère s’élancèrent.
Ragastens s’était levé et avait saisi la main de Manfred.
– Bien, mon enfant, dit-il simplement, en redonnant au jeune homme ce nom qui déjà, l’avait fait tressaillir.
– Nous restons à trois ! dit Ragastens en se tournant vers Triboulet. Mais sans vouloir déprécier l’aide de notre ami, j’affirme que nous réussirons à trois comme si nous eussions été quatre !
Manfred comprit l’intention du chevalier et, à son tour, lui serra la main.
Àce moment, Cocardère reparut.
– Tu n’es pas trop fatigué pour refaire le chemin ? demanda Manfred.
– Je suis éreinté, par la mort-dieu ! Mais pour ne pas être à Paris demain matin, il faudrait que je sois mort et enterré… Si vous pouviez voir la figure de Lanthenay, comme je l’ai vue ce matin !…
– Partons ! fit Manfred d’une voix rauque.
L’instant d’après, Ragastens, Triboulet et Spadacape entendirent le galop furieux de deux chevaux.
– Partons ! dit alors à son tour Triboulet.
Et ils se dirigèrent vers le parc du château.
Manfred et Cocardère galopaient côte à côte sur la route de Melun.
L’oreille aux aguets et la main prête, Cocardère causait.
– Comment as-tu fait pour nous trouver ? avait demandé Manfred.
– C’est une chance inespérée… Il faut vous dire qu’en arrivant à Fontainebleau, je n’avais guère la tête à moi ; cette course furieuse m’avait brisé. Donc, à la première maison, je m’arrête, et je regarde autour de moi. Personne. Je frappe à une maison de paysan. Et, comme me l’avait recommandé Lanthenay, je demande si on a vu un seigneur qui s’appelle le chevalier de Ragastens et si on sait où il loge. On me répond de m’adresser au château et on me ferme la porte au nez. Il paraît que je faisais peur… Je demeurais là, tout bête, ne sachant où aller, lorsque tout à coup, d’une maison voisine, sort une femme…
– Une femme ?
– Habillée en homme… Belle femme autant que j’ai pu voir.
– J’ai entendu que vous cherchiez M. de Ragastens, me dit-elle.
– Qui êtes-vous, madame ? lui dis-je, me méfiant.
Elle hausse les épaules et me dit :
– Oui ou non, cherchez-vous M. de Ragastens ?
– Oui, lui dis-je. Et c’est pressé.
– Eh bien, me dit-elle, allez rue des Fagots, près du château, et arrêtez-vous à l’auberge du Grand-Charlemagne.
– Là-dessus elle disparaît, acheva Cocardère, et moi, je pique des deux, demandant à mon pauvre cheval un dernier effort.
L’idée de Madeleine Ferron se présenta d’elle-même à Manfred. Quelle autre, en effet, que Madeleine pouvait s’intéresser au chevalier de Ragastens que nul ne connaissait à Fontainebleau ?
– Cette femme est donc notre bon génie ? se dit-il.
Ils traversèrent Melun comme des fantômes.
Hors de la ville, ils s’arrêtèrent une heure ; sans cette halte, les chevaux ne fussent pas arrivés à Paris.
Une pleine mesure d’avoine tirée des fontes fut placée devant chaque bête, et Cocardère profita de la halte pour dévorer une tranche de bœuf placée entre deux vastes tartines de pain. Quant à Manfred, il se contenta d’une lampée de liqueur.
Les deux cavaliers se remirent en selle et repartirent du même train.
Àdeux heures du matin, ils étaient aux portes de Paris.
– Fou que j’ai été ! gronda amèrement Manfred. Les portes sont fermées ! Je n’avais point songé à cela !
– Les portes ouvrent à cinq heures, dit Cocardère ; or la chose est pour sept heures seulement…
Manfred piétinait nerveusement autour de son cheval. Tout à coup il se décida.
– Suis-moi, dit-il à Cocardère.
Il alla frapper à la poterne, c’est-à-dire à la petite porte basse qui s’ouvrait près de la grande. Au bout de quelques instants, un soldat vint ouvrir.
– Mon ami, dit-il, j’ai un message pressé à communiquer à votre sergent.
– Venez, dit le soldat.
Ils traversèrent une salle basse aux voûtes surbaissées, dans laquelle il y avait quelques gardes, et entrèrent dans une deuxième pièce de plus grandes dimensions qui était le véritable poste.
Manfred vit tout de suite la porte qui ouvrait sur la rue, et fit un signe à Cocardère.
Celui-ci s’approcha de la porte.
– Voici le sergent, dit le soldat.
– Que me voulez-vous ? demanda le chef de poste.
– Vous dire que j’ai besoin d’entrer tout de suite à Paris, dit Manfred qui surveillait du coin de l’œil les mouvements de Cocardère.
– On n’entre pas à pareille heure, grommela le sergent. Garde, reconduisez ces deux hommes.
– En avant ! cria à ce moment Cocardère en ouvrant la porte toute grande et en se précipitant dans la rue.
Le sergent, comprenant qu’il était joué, essaya de barrer le passage à Manfred. Mais, d’un coup de poing, le jeune homme l’envoya rouler à trois pas, et s’élança à son tour.
L’instant d’après, il entendit deux ou trois coups d’arquebuse que les soldats du poste tirèrent au jugé, par acquit de conscience.
Une heure plus tard, Manfred et Cocardère arrivaient à la Cour des Miracles.
– Il est trois heures, dit Cocardère, je vais dormir jusqu’à six. Sans quoi, je serais inutile.
– Je te réveillerai, sois tranquille.
Et il se dirigea vers l’appartement qu’occupait Lanthenay, appartement dans lequel s’étaient réfugiées Julie et Avette, la femme et la fille d’Étienne Dolet.
Lanthenay poussa un cri de joie en apercevant son ami et le serra dans ses bras. D’un coup d’œil, il lui montra les deux malheureuses femmes qui pleuraient.
– Ils ont donc osé le condamner ! fit Manfred.
– Mais tout n’est pas perdu ! s’écria Lanthenay. Nous le sauverons !
– Certes !
– Ah ! monsieur ! s’écria Avette en joignant les mains. Mon pauvre père.
Quant à Julie, elle était comme prostrée.
– Nous tenterons l’impossible ! dit Manfred.
– Viens ! dit brusquement Lanthenay.
– Mon cœur se brise à les voir pleurer ! sanglota Lanthenay quand ils furent dehors. Viens… je vais te montrer les dispositions que j’ai prises afin que nous soyons bien d’accord dans l’action.
Dans la Cour des Miracles, les truands préparaient des armes pour le coup de main que l’on allait tenter.
Manfred et Lanthenay parvinrent à la Conciergerie.
– Où l’exécution doit-elle avoir lieu ? demanda Manfred.
– Tu vas voir. Nous voici à la Conciergerie. Le cortège sortira par cette porte. Prenons le chemin qu’il va suivre.
Ils franchirent le pont. Àdroite, ils tournèrent, tout de suite, et, en quelques pas, se trouvèrent sur la place de Grève.
Là, au centre de la place, trois ou quatre hommes s’occupaient à un singulier travail : ils paraissaient édifier avec beaucoup de soins une sorte de tour carrée.
Méthodiquement, les travailleurs nocturnes entassaient de longues pièces de bois sec.
Il y avait une rangée de bois, une rangée de fagots, puis une autre rangée de bois, ainsi de suite. Cette sorte de cube s’élevait autour d’un long poteau carré qui avait été profondément enfoncé en terre.
Ces hommes, qui travaillaient ainsi, étaient les aides du bourreau. Et ce qu’ils édifiaient, c’était un bûcher.
– C’est ici qu’on veut le brûler ? demanda Manfred.
– Tu vois ! dit Lanthenay. Viens, maintenant.
Il le ramena à l’entrée du pont.
– C’est là que nous nous placerons, reprit alors Lanthenay… Voici ce qui est convenu : au moment précis où le cortège débouchera du pont, nous nous ruerons sur l’escorte… Y eût-il cinq cents gardes, nous en viendrons à bout… Nous enlevons le prisonnier et nous nous réfugions dans la Cour des Miracles… Que dis-tu de ce plan ?
– C’est le seul qui paraisse raisonnable. La réussite me paraît indubitable.
– Tu crois ? fit Lanthenay.
– Certes !
– Ah ! si cela pouvait être, ami ! Notre rôle à nous deux, sera d’arriver jusqu’à Dolet sans nous inquiéter de ce qui se passera autour de nous… Ah ! voici nos gens qui commencent à prendre position… Je commence à croire que nous réussirons ! Je doutais ! Il me semblait que nul de ces hommes ne se dérangerait… Que te dirai-je ? J’en étais arrivé à penser que toi-même tu ne pourrais arriver à temps !
– Tu vois que je suis arrivé ! fit Manfred avec un sourire.