PREMIÈRES BRUMES DE SEPTEMBRE

« Crois-moi, c’est bien fini jusqu’à l’année prochaine. »

JULES LAFORGUE

Premières brumes de septembre

sur les fougères, les bruyères, dans les landes,

par les chasses, dans les sapins.

Premiers feux dans les bourgs, flambés de grand matin

qui craquent et luisent dans les salles

obscures des auberges, des fermes et des chaumières

matinales.

Venu de loin par les frais grands chemins

dans sa voiture couverte,

l’épicier ambulant s’arrête

pour causer, vendre et se chauffer les mains,

et laisse son attelage qui grelotte

et fume aux portes

entr’ouvertes.

Et j’aperçois aux murs, par éclats de lumière,

avant qu’on ait ouvert

les volets,

les images et les chromos qu’on verra tout l’hiver

rougeâtrement illuminés

représenter au-dessus de la cheminée,

dans les salles obscures

et basses des chaumières, des fermes et des auberges,

de belles dames avec des manchons et des fourrures

dans des paysages de neige.

Et j’entends : « Pas chaud, ce matin ! – Voilà les froids.

 Il a dû geler blanc, cette nuit, dans les bois. »

 Oh ! nous étions si bien partis pour les étés !

va-t-il falloir

ce soir

fermer encore toutes les portes des châteaux,

et s’en retourner ?

s’en revenir, enveloppé dans les manteaux,

le long des routes en châtaignes

dégringolées,

gelés,

dans les voitures à ânes et les calèches toutes pleines

de consternés et petits désespoirs,

avec les vacances finies qui s’en reviennent.

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