Chapitre IV. Des autres especes d’Éléphans.

Dans le Royaume de Congo, il se trouve des Éléphans en grand nombre dans les bois, les pâturages & sur le bord des rivieres. Les Habitans du Pays prétendent que cet animal vit 100 ans, & ne cesse pas de croître jusqu’au milieu de cet âge. Le Voyageur Lopez prit plaisir un jour à peser plusieurs dents, dont chacune étoit d’environ deux cent livres. Il assure contre l’opinion des Anciens, que l’Éléphant se couche à terre, qu’il plie les genoux, & que de ses pieds de devant il abaisse les branches des arbres pour se nourrir de leurs feuilles. Si les arbres sont trop élevés, il les ébranle si puissamment avec l’épaule, qu’il parvient à les renverser. S’ils ont moins de force dans leur hauteur, il les courbe avec ses dents jusqu’à ce qu’il puisse atteindre aux feuilles : mais il arrive aussi quelquefois que ses dents se brisent par l’effort, & c’est la raison qui en fait trouver un si grand nombre dans les forêts. Les femelles ne conçoivent qu’une fois en sept ans, & ne portent pas plus de deux ans.

La peau des Éléphans du Congo est d’une dureté incroyable, elle a 4 pouces d’épaisseur . Lopez assure qu’un de ces Animaux ayant été tiré d’un coup de Paderero, la balle ne perça point sa peau ; mais il fut si fort meurtri, qu’après avoir fui pendant trois jours, & tué dans sa fureur plusieurs Esclaves qui se rencontrerent sur son passage, il mourut de cette avanture.

Les Éléphans ont à la queue une sorte de poil ou de soye, de l’épaisseur d’un jonc & d’un noir fort brillant. La force & la beauté de ce poil augmentent avec l’âge de l’Animal. Un seul se vend quelquefois deux ou trois Esclaves, parce que les Seigneurs & les femmes sont passionnés pour cet ornement. Tous les efforts d’un homme avec les deux mains, ne peuvent le briser. Quantité de Negres se hasardent à couper la queue de l’Éléphant dans la seule vue de se procurer ces poils. Ils le surprennent quelquefois tandis qu’il monte par quelque passage étroit, dans lequel il ne peut se tourner ni se venger avec sa trompe. D’autres beaucoup plus hardis prennent le tems où ils le voyent paître, lui coupent la queue d’un seul coup, & se garantissent de sa fureur par des mouvemens circulaires, que la pesanteur de l’Animal, & la difficulté qu’il trouve à se tourner ne lui permettent pas de faire avec la même vîtesse. Cependant il court plus vîte en droite ligne que le cheval le plus léger, parce que ses pas sont plus grands.

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