On distingue plusieurs sortes d’Éléphans, le Lybien, l’Indien, l’Éléphant de marais, celui des montagnes & celui des bois. L’Éléphant de marais a les dents bleues & spongieuses, difficiles à tirer, & plus encore à travailler, parce qu’elles sont remplies de petits nœuds. L’Éléphant de montagne est farouche & dangeureux, il a les dents plus petites & la taille mieux formée. L’Éléphant qui vit dans les bois est plus docile. Il a les plus grosses dents & les plus blanches.
On ne voit jamais d’Éléphant blanc sur la Côte d’Or. Ceux de Guinée sont si prompts qu’ils surpassent un cheval à la course, les Negres de Mina leur donnent le nom d’Ossons. L’Éléphant a le pied comme le sabot du cheval, mais beaucoup plus grand. Sa peau est plus dure & plus épaisse sur le dos que sur le ventre. Outre ses défenses, il a quatre dents qui lui servent à mâcher, elles sont tortues dans les mâles & droites dans les femelles. La femelle de l’Éléphant est plus forte ; mais moins hardie que le mâle. Elle a deux mammelles. On prétend qu’elle a beaucoup de peine à nourrir ses petits, & qu’elle est obligée alors de s’accroupir. Les uns ne lui donnent qu’un jeune à la fois : d’autres lui en donnent quatre. Les plus petits Éléphans voyent clair, dit-on, aussi-tôt qu’ils sont nés. Ils suçent le lait de leur mere, non avec leur trompe, mais avec la langue & les levres. Mais toutes ces circonstances ne sont que des conjectures.
Les Éléphans ne sont nulle part en si grand nombre que sur la Côte d’Yyvoire ; il s’en trouve aussi sur la Côte d’Or, qui s’avancent de l’intérieur des terres qui sont désertes, jusqu’au rivage de la mer ; car moins il y a d’hommes dans une contrée, plus elle se remplit de bêtes farouches.
Les Éléphans de la Côte d’Or ont douze ou treize pieds de haut ; mais ils sont moins grands que ceux des Indes Orientales, ausquels les Voyageurs donnent le même nombre de coudées . Atkins dans son Voyage, remarque que les dents des Éléphans viennent des Négres intérieurs avec lesquels ceux de la Côte font des échanges pour des Marchandises de l’Europe. Il ajoute que Plunket, ancien Gouverneur de Sierra Leona, & d’autres Anglois qui avoient acquis en Afrique une expérience de vingt ans, l’avoient assuré que les Éléphans changent d’habitations & de pâturages, & que pour cette transmigration ils se rassemblent en troupeaux fort nombreux ; qu’ils en avoient vu sur les bords de la Gambra des légions de 1000 & 1500 ; que ces monstreux Animaux sont d’une hardiesse qui répond à leur grosseur, & que marchant en fort bon ordre, ils se croient comme supérieurs aux attaques des Negres, qui ne peuvent leur faire la guerre sans en approcher, parce que de loin la peau d’un Éléphant est impénétrable aux balles du mousquet.
L’Éléphant se nourrit particuliérement d’une sorte de fruit qui ressemble au papa, & qui croît sauvage dans plusieurs parties de la Guinée. L’Isle de Tesso en est remplie, & c’est apparemment ce qui invite ces Animaux à s’y rendre en grand nombre. Ils passent le canal à la nage. Un Esclave de la compagnie blessa un Éléphant dans cette Isle, & n’ignorant pas ce qu’il avoit à craindre de sa furie, il se réfugia aussi-tôt dans un bois voisin. L’Éléphant s’efforça de le suivre ; mais soit qu’il fût affoibli par sa blessure, ou retardé par l’épaisseur des arbres, il abandonna les traces de son ennemi pour repasser le Canal à la nage : il mourut en chemin, & les Negres profiterent de la marée pour le conduire dans une Baye, où ils commencerent par lui arracher les dents & firent ensuite un festin de sa chair. L’Auteur assure que le mouvement d’un Éléphant dans l’eau est plus prompt que celui d’une Chaloupe à dix Rameurs, & qu’à terre il est aussi léger qu’un Cheval à la course.