PENDANT LA PRIÈRE

Je voudrais retrouver mes douleurs d’autrefois.

Je les laissai partir mais je les connais toutes,

Pauvres âmes sans pain qui marchent sur les routes

Et qui pleurent d’extase au pied des grandes croix.

… L’enfant pliant son dos qui semble allourdi d’ailes,

Enfantinement peint sur le mur des rayons,

L’ange en forme de gerbe et de donation,

Et qui tient la douceur dans ses doigts parallèles…

Le temple ténébreux, le temple illuminé

Ouvrait sur ma douleur ses voûtes toutes grandes,

Hélas ! je suis venu pour que tu me le rendes,

Le pauvre apaisement que je t’avais donné.

Les malheurs sont des saints qui sourient dans leurs geôles

Souvent quand ils traînaient leur longue passion,

Qu’ils ont dû, bousculés par la tentation,

Dompter leurs cous humains et leurs frêles épaules !

Et pourtant, la douleur abandonne la chair ;

La richesse des pleurs laisse l’âme assouvie.

Quand nous nous revoyons en rêve dans la vie

Nous ne savons plus bien que nous avons souffert.

La rue était déserte au bas des cieux livides ;

Après les nuits d’orgueil et de bonheur hautain,

En revenant à moi dans le froid du matin

Je me suis retrouvé plaintif et les mains vides.

On ira dans mon rêve ardent qui resplendit

Cueillir nos beaux sanglots comme des grappes mûres :

Leur espérance ira parler dans nos murmures,

Ils ne comprendront pas ce que je t’aurai dit.

Ils ne comprendront pas les longs secrets de phrases

Où quelque souvenir s’éveillait à demi,

Notre grâce, et l’espoir, ce grand mystère ami,

Nous menant sans le voir, au chemin des extases.

Puis nos yeux s’éteindront sur le rêve éternel,

Puis plus rien que les fleurs que nous avons cueillies

Penchant leurs chagrins morts sur leurs tiges vieillies,

Et notre église ouverte aux regards bleus du ciel.

Je te voyais passer, sainte, silencieuse.

J’ai vu passer la brève et fuyante clarté ;

Oh ! je voudrais toucher avec timidité

Tes lèvres de silence et ta robe pieuse…

Puis tous les souvenirs dans un large frisson

Se relevaient, ainsi qu’une foule bénie…

Une nuit j’écoutais la lointaine harmonie

Tandis que je veillais tout seul dans ma maison…

Un homme lentement montait l’escalier sombre,

J’entendais la tristesse égale de ses pas,

Puis il s’est arrêté comme s’il était las…

Oh je veux enfouir mes rêves dans ton ombre !

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