Le subjonctif à l’hôtel de Londres

Oui ! Il faut bien parler de Monpazier et de l’hôtel de Londres…

Quelques vers pour un hôtelier plus que parfait

Pour sauver le français, affaibli, déclinant,

Et de tous les côtés, à l’anglais confronté,

Il s’est trouvé quelqu’un, au zinc du Pardailhan,

Pour élever la voix et relever le gant.

Quiconque est passé là, assoiffé, fatigué,

Repart désaltéré au subjonctif présent,

Aux autres temps aussi de ce mode oublié,

Remis au goût du jour mais bien trop peu parlés.

De quelques palmes ou plutôt d’un habit vert,

Il faudrait fêter celui qui verse la bière

En citant Cyrano, La Fontaine ou Molière

Dans son hôtel de Londres, aux portes de Monpazier.

Gaby et Gérard Studer (adhérents 869)

D’aucuns y verront un moyen de se faire de la publicité, mais oui j’acquiesce, j’admets, je m’en repens…

La création de l’association, tout au début, n’était qu’affaire de promotion, de dynamisme commercial !

Votre initiative, rarissime et extraordinaire en notre triste époque déliquescente, relève à la fois de l’élégance d’esprit la plus lumineuse et du plus tonique bon sens ; en outre, cette probité langagière coïncide chez vous avec le plus louable et le plus légitime dynamisme commercial (je fus boutiquier plus de vingt ans et apprécie d’autant votre idée).

Paul Yvonneau

Je reste cependant persuadé que la publicité faite autour de nous servira la noble cause du passé simple et de l’imparfait du subjonctif et qu’elle intoxiquera les médias jusqu’à ce que des personnes « en vue » s’amusent à l’utiliser en public. C’est le but !

Il est certain que ce brassage médiatique a plus servi les intérêts de Monpazier que ceux de notre établissement mais il ne faut pas désespérer… Car Monpazier et l’hôtel de Londres le méritent !

Je ne pourrai égaler les louanges épistolaires de nos correspondants envers notre « bastide des plaisirs ». Je souhaite que la lecture de ces lettres donne l’envie à d’autres de venir visiter cette région exceptionnelle.

En revanche, il est nécessaire de parler de l’hôtel de Londres, cette bâtisse chargée d’histoires et lui rendre hommage ici.

Qui sait si les mânes des personnalités qui ont fréquenté l’hôtel pendant une soixantaine d’années, de 1880 à 1939, ne nous ont pas influencé dans notre décision d’y créer le CO. R. U. P. S. I. S. !

Nous avons tenté de retrouver l’histoire de cet établissement qui est de construction récente puisqu’il n’existait pas en 1856. Sur son emplacement, le cadastre de l’époque mentionnait un jardin aux formes inégales.

À cette époque, il était projeté l’élargissement et le réaménagement du champ de foire du nord de la ville. Aux dires des anciens, les fondations de l’immeuble auraient été creusées dans une nuit pour éviter l’expropriation.

Ce qui explique que l’hôtel n’est pas entièrement rectangulaire puisque le mur ouest est plus large que le mur est.

Nous ignorons si l’affectation première de ce bâtiment était un hôtel, la première indication se trouvant sur une lettre écrite en 1934 par la propriétaire et « chef » de l’époque, Aurélie Cassagnolles, sur laquelle on lit : « Hôtel de Londres – RC Bergerac 1880 »

Pourquoi « de Londres » ?

On peut supposer un lien entre l’origine anglaise de la bastide de Monpazier, créée en 1284 par Edward 1er d’Angleterre, mais certains avancent que cette auberge était un passage obligé gastronomique entre le nord de l’Europe et les Pyrénées alors « à la mode »…

C’était également l’époque où il était séant pour les riches Anglais de posséder un château dans le Périgord…

Et cette étape, célèbre jusqu’en 1939, a accueilli une foule de visiteurs de marque que l’on retrouve dans les livres d’or, précieusement conservés par les descendants des propriétaires de l’époque.

Un établissement littéraire… et musical…

Cyrano :

(…) Écoutez les Gascons… Ce n’est plus, sous ses doigts,

Le fifre aigu des camps, c’est la flûte des bois !

Ce n’est plus le sifflet du combat, sous ses lèvres,

C’est le lent galoubet de nos meneurs de chèvres…

Écoutez… C’est le val, la lande, la forêt,

Le petit pâtre brun sous son rouge béret,

C’est la verte douceur des soirs sur la Dordogne,

Écoutez, les Gascons : c’est toute la Gascogne !

Cyrano de Bergerac, IV, 3, Edmond Rostand

En 1930, Blaise Cendrars a résidé dans nos murs pour retracer la vie d’un monpaziérois célèbre, Jean Galmot, personnage qui lui a inspiré son roman Rhum.

Quelquefois, dans les douces soirées d’automne, il me semble apercevoir Blaise Cendrars sur les petites routes ombragées des alentours de Monpazier, conduisant de son seul bras et à tombeau ouvert, une Ford Modèle T pétaradante, accompagné de Raymone, son amie et de John Dos Passos, son compagnon de bringue…

C’est peut-être en banquetant à l’hôtel de Londres que Louis-Ferdinand Destouches (Céline) a imaginé Mort à crédit ?

Et si Saint-Exupéry, pendant ses sorties dominicales en compagnie de Didier Daurat, d’Henri Guillaumet, Rivière – peut-être Jean Mermoz – et l’équipe de l’Aéropostale et des usines Latécoère, était venu chercher ici une quelconque inspiration pour son prochain livre Terre des hommes ?

Et, pourquoi pas, ne serait-ce pas dans les murs de l’hôtel de Londres qu’Igor Stravinsky aurait perdu son inspiration, en abusant des cures de suralimentation infligées par la mère Aurélie ?

Dans les années folles, c’était un endroit à la mode et c’est peut-être au cours de ces visites à l’hôtel de Londres accompagné de son « fidèle tabellion » que la jeune danseuse nue Joséphine Baker a envisagé de prendre sa retraite en Périgord et d’y acheter le château des Milandes proche…

Ces temps inusités, nous les aimons encore.

Vous vîntes gentiment me demander ici

L’autorisation d’imprimer mes écrits.

Bien sûr, je vous la donne. Le plaisir d’être lu

Se nourrit de l’espoir que peut-être on a plu…

Mais avant que, confiant, vous ne m’éditassiez

Il faudrait un instant que vous méditassiez

Le bon goût et l’humour que vous manifestâtes

Vous vaudront, j’en suis sûr, quelques rancœurs ingrates.

On vous reprochera de vouloir employer

Des formes torturées sous lesquelles ont ployé

Les échines affaissées de ces esprits sans art

Qui meublent leur palais d’un français de hasard !…

Faudrait-il pour autant que vous vous justifiâtes

Que paternellement, à leurs petites pattes,

Vous tendiez ce perchoir auquel se raccrocher

J’en doute, en vérité. Vous pourriez les fâcher.

Il faut donc éditer l’ébouriffant discours

De ceux qui ont choisi notre amusant parcours

Sans chercher à répondre aux fâcheux de tous bords

Qui voudraient nous priver de ces petits trésors.

Conjuguons sans faiblir, toutes voiles dehors !

Les vents du subjonctif nous poussent sans effort

Vers leurs sons insolites, certes… Et alors ?

Ces temps inusités, nous les aimons encore.

Thierry Chevrier (adhérent 113)

Je n’aurais jamais cru que l’on pût tant souffrir (Alfred de Musset)

et

Je n’ose imaginer mes correcteurs (Michel Stevaert) !

Puisse ce bulletin de liaison, si péniblement accouché, être bien noté par les adhérents de l’association, surtout ne pas leur faire honte !

Et souhaitons que de nouveaux défenseurs de ces « petits trésors » rejoignent notre « cohorte d’orthodoxie » !

Fallait-il que nous exhumassions ces temps oubliés au risque de rebuter définitivement ceux qui utilisent une langue française strictement véhiculaire  ?

Exemple : Voila ! Nous laissons ce travail en stand by !

J’espère qu’il ne sera pas squizzé et que le lecteur n’aura pas envie de zapper. J’ai tellement été stressé par le forcing des derniers chapitres que je n’ai vraiment pas été cool pour terminer cette compil. Heureusement que j’ai eu des flashs, que le casting a été relativement facile et que j’ai mis les airbags en cas de crash.

O. K. Bye Bye.

Mais si ce sabir, ce charabia, ce jargon, ce nouvel espéranto pouvait permettre à tous les peuples de la planète Terre de se comprendre et de communiquer, je suis prêt à abandonner et à remiser au musée ma langue vernaculaire au profit de la paix mondiale. Mais ça aussi c’est utopique, n’est-ce pas Monsieur Zamenhof ?

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