INTERROGATOIRE DU CAPITAINE-RAPPORTEUR.

Le capitaine Dautancourt, le chef d’escadron Jacquin, de la légion d’élite, deux gendarmes à pied du même corps, Lerva, Tharsis, et le citoyen Noirot, lieutenant au même corps, se rendent à la chambre du duc d’Enghien ; ils le réveillent : il n’avait plus que quatre heures à attendre avant de retourner à son sommeil. Le capitaine-rapporteur, assisté de Molin, capitaine au 18e régiment, greffier, choisi par ledit rapporteur, interroge le prince.

A lui demandé ses nom, prénoms, âge et lieu de naissance ?

A répondu se nommer Louis-Antoine-Henri de Bourbon, duc d’Enghien, né le 2 août 1772, à Chantilly.

A lui demandé où il a résidé depuis sa sortie de France ?

A répondu qu’après avoir suivi ses parents, le corps de Condé s’étant formé, il avait fait toute la guerre, et qu’avant cela il avait fait la campagne de 1792, en Brabant, avec le corps de Bourbon.

A lui demandé s’il n’était point passé en Angleterre, et si cette puissance lui accorde toujours un traitement ?

A répondu n’y être jamais allé ; que l’Angleterre lui accorde toujours un traitement, et qu’il n’a que cela pour vivre.

A lui demandé quel grade il occupait dans l’armée de Condé ?

A répondu : commandant de l’avant-garde en 1796, avant cette campagne comme volontaire au quartier général de son grand-père, et toujours, depuis 1796, comme commandant de l’avant-garde.

À lui demandé s’il connaissait le général Pichegru, s’il a eu des relations avec lui ?

A répondu : Je ne l’ai, je crois, jamais vu. Je n’ai point eu de relations avec lui. Je sais qu’il a désiré me voir. Je me loue de ne l’avoir point connu, d’après les vils moyens dont on dit qu’il a voulu se servir, s’ils sont vrais.

À lui demandé s’il connaît l’ex-général Dumouriez, et s’il a des relations avec lui ?

A répondu : Pas davantage.

De quoi a été dressé le présent qui a été signé par le duc d’Enghien, le chef d’escadron Jacquin, le lieutenant Noirot, les deux gendarmes et le capitaine-rapporteur.

Avant de signer le présent procès-verbal, le duc d’Enghien a dit : « Je fais avec instance la demande d’avoir une audience particulière du premier consul. Mon nom, mon rang, ma façon de penser et l’horreur de ma situation me font espérer qu’il ne se refusera pas à ma demande. »

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