Jason
Depuis que mon esprit est capable de flamme,
Jamais un trouble égal n’a confondu mon âme.
Mon cœur, qui se partage en deux affections,
Se laisse déchirer à mille passions.
Je dois tout à Médée, et je ne puis sans honte
Et d’elle et de ma foi tenir si peu de conte :
Je dois tout à Créon, et d’un si puissant roi
Je fais un ennemi, si je garde ma foi :
Je regrette Médée, et j’adore Créuse ;
Je vois mon crime en l’une, en l’autre mon excuse ;
Et dessus mon regret mes désirs triomphants
Ont encor le secours du soin de mes enfants.
Mais la princesse vient ; l’éclat d’un tel visage
Du plus constant du monde attirerait l’hommage,
Et semble reprocher à ma fidélité
D’avoir osé tenir contre tant de beauté.