II.

Tout de grâce et de feu, l’habitant de Lessur

Parut aux Stariens l’emblème le plus pur

De la forme exprimant la vie intelligente,

L’esprit mouvant la chair animée et pensante.

La vie et la pensée, en ce splendide lieu,

Dans chaque homme embelli gravait les traits d’un Dieu.

Race angélique à voir, presque immatérielle !

Leur fibre rose et pâle est expressive et belle :

Comme un rayon du jour, leur teint jette un éclat

De lumière fondue en un tendre incarnat ;

Leur sang vermeil et clair est une vive essence

Qui frémit sous la peau, court, pétille et s’élance.

Mais dans leurs yeux surtout resplendit un foyer

Des flammes de l’esprit, tel qu’il peut défier

Un regard starien d’en fixer la puissance.

Nos voyageurs surpris se tenaient à distance.

Ils s’approchent… Déjà, ces humains merveilleux

Ont vu les Stariens, et s’avançant vers eux,

Ils parlent… Dans leur bouche, un rhythme sympathique,

Un langage, où toujours poésie et musique

Inspirent à l’instant des chants improvisés,

Traduit toute pensée en vers harmonisés.

Dans un discours public leur voix vibrante et claire

Ne voudrait se servir d’une prose vulgaire

Réservée à l’enfant, quand dans l’intimité

L’emploi des vers parlés est à peine accepté.

De cette race artiste, admirable symbole,

L’orateur est celui qui prête à sa parole

Le talent large et prompt d’un grand compositeur,

La verve d’un poète et la voix d’un chanteur ;

Qui dans un chant rhythmé, que le sujet nuance,

Improvise à l’instant mélodie et cadence.

Les Stariens émus écoutent leurs concerts

Et suivent palpitants ces hommes doux et fiers,

Curieux de sonder leurs mœurs extra-humaines…

Au fond d’une prairie, où de pures fontaines

Distribuent à l’entour les plus tièdes fraîcheurs,

Un bouquet d’arbres verts suspend un ciel de fleurs.

Dessous, comme un tapis, la terre est émaillée.

Sous cette arcade à jour, entre des fleurs taillée,

Danse et chante un essaim de femmes de Lessur.

On voyait s’élever d’un pied nerveux et sûr,

Se suspendre, flotter frêles, aériennes,

Ces sylphides d’albâtre, âmes lessuriennes

Dont la perle amollie aurait formé la chair.

En voltigeant ainsi, leurs voix jettent dans l’air

Des chants qui vont au cœur, des chants dont l’harmonie

Traduit en doux frissons une ivresse infinie…

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