VI
Cette théorie du totémisme va nous donner la clef d’un trait curieux de la mentalité humaine qui, s’il était plus marqué jadis qu’aujourd’hui, n’a pourtant pas disparu et qui, en tout cas, a joué un rôle considérable dans l’histoire de la pensée. Ce sera une nouvelle occasion de constater que l’évolution logique est étroitement solidaire de l’évolution religieuse et dépend, comme cette dernière, de conditions sociales
S’il est une vérité qui nous apparaît aujourd’hui comme de toute évidence, c’est que des êtres qui diffèrent, non seulement par leur apparence extérieure, mais par leurs propriétés les plus essentielles, comme les minéraux, les plantes, les animaux, les hommes ne sauraient être considérés comme équivalents et comme directement substituables les uns aux autres. Un long usage, que la culture scientifique a encore plus fortement enraciné dans nos esprits, nous a appris à établir entre les divers règnes de la nature des barrières dont le transformisme lui-même ne nie pas l’existence ; car s’il admet que la vie a pu naître de la matière non vivante et l’homme de l’animal, il ne méconnaît pas que les vivants, une fois formés, sont autre chose que des minéraux, l’homme autre chose qu’un animal. À l’intérieur de chaque règne, les mêmes barrières séparent les différentes classes : nous ne concevons pas comment un minéral pourrait avoir les caractères distinctifs d’un autre minéral, ou une espèce animale ceux d’une autre espèce. Mais ces distinctions, qui nous semblent si naturelles, n’ont rien de primitif. À l’origine, tous les règnes sont confondus les uns dans les autres. Les rochers ont un sexe ; ils ont le pouvoir d’engendrer ; le Soleil, la Lune, les étoiles sont des hommes ou des femmes, qui éprouvent et qui expriment des sentiments humains, tandis que les hommes, au contraire, sont conçus comme des animaux ou des plantes. Cet état d’indistinction se retrouve à la base de toutes les mythologies. De là, le caractère ambigu des êtres que les mythes mettent en scène ; on ne peut les classer dans aucun genre défini, car ils participent à la fois des genres les plus opposés. Aussi admet-on sans peine qu’ils peuvent se transmuter les uns dans les autres ; et c’est par des transmutations de ce genre que les hommes, pendant longtemps, ont cru pouvoir expliquer la genèse des choses.
Que l’instinct anthropomorphique dont les animistes ont doté le primitif ne puisse rendre compte de cette mentalité, c’est ce que démontre la nature des confusions qui la caractérisent. Elles viennent, en effet, non de ce que l’homme a démesurément étendu le règne humain au point d’y faire rentrer tous les autres, mais de ce qu’il a mêlé les règnes les plus disparates. Il n’a pas plus conçu le monde à son image qu’il ne s’est conçu à l’image du monde : il a procédé de l’une et de l’autre manières à la fois. Dans l’idée qu’il se faisait des choses, il a fait, sans doute, entrer des éléments humains ; mais, dans l’idée qu’il se faisait de lui-même, il a fait entrer des éléments qui lui venaient des choses.
Cependant, il n’y avait rien dans l’expérience qui pût lui suggérer de ces rapprochements ou de ces mélanges. Au regard de l’observation sensible, tout est divers et discontinu. Nulle part, dans la réalité, nous ne voyons les êtres mêler leur nature et se métamorphoser les uns dans les autres. Il faut donc qu’une cause exceptionnellement puissante soit intervenue qui ait transfiguré le réel de manière à la faire apparaître sous un aspect qui n’est pas le sien.
C’est la religion qui a été l’agent de cette transfiguration ; ce sont les croyances religieuses qui ont substitué au monde tel que le perçoivent les sens, un monde différent. C’est ce que montre le cas du totémisme. Ce qu’il y a de fondamental dans cette religion, c’est que les gens du clan et les êtres divers dont l’emblème totémique reproduit la forme passent pour être faits de la même essence. Or, une fois que cette croyance était admise, le pont était jeté entre les différents règnes. L’homme était représenté comme une sorte d’animal ou de plante : les plantes et les animaux comme des parents de l’homme, ou plutôt, tous ces êtres, si différents pour les sens, étaient conçus comme participant d’une même nature. Ainsi, cette remarquable aptitude à confondre ce qui nous semble si manifestement distinct vient de ce que les premières forces dont l’intelligence humaine a peuplé l’univers ont été élaborées par la religion. Parce qu’elles étaient faites d’éléments empruntés aux différents règnes, on en fit le principe commun des choses les plus hétérogènes, qui se trouvèrent ainsi dotées d’une seule et même essence.
Mais nous savons, d’autre part, que ces conceptions religieuses sont le produit de causes sociales déterminées. Parce que le clan ne peut exister sans un nom et sans un emblème, parce que cet emblème est partout présent aux regards des individus, c’est sur lui et sur les objets dont il est l’image que se reportent les sentiments que la société éveille chez ses membres. Les hommes furent ainsi nécessités à se représenter la force collective dont ils sentaient l’action, sous les espèces de la chose qui servait de drapeau au groupe. Dans la notion de cette force se trouvaient donc confondus les règnes les plus différents : en un sens, elle était essentiellement humaine puisqu’elle était faite d’idées et de sentiments humains ; mais en même temps, elle ne pouvait pas ne pas apparaître comme étroitement apparentée à l’être animé ou inanimé qui lui prêtait ses formes extérieures. La cause dont nous saisissons ici l’action n’est pas, d’ailleurs, particulière au seul totémisme ; il n’est pas de société où elle n’agisse. D’une manière générale, un sentiment collectif ne peut prendre conscience de soi qu’en se fixant sur un objet matériel
Cette logique, il est vrai, nous déconcerte. Il faut pourtant se garder de la déprécier : si grossière qu’elle puisse nous paraître, elle constituait, pour l’évolution intellectuelle de l’humanité, un apport de la plus haute importance. C’est par elle, en effet, qu’a été possible une première explication du monde. Sans doute, les habitudes mentales qu’elle implique empêchaient l’homme de voir la réalité telle que la lui montrent les sens ; mais telle qu’ils la lui montrent, elle a le grave inconvénient d’être réfractaire à toute explication. Car expliquer, c’est rattacher les choses les unes aux autres, c’est rétablir entre elles des relations qui nous les fassent apparaître comme fonction les unes des autres, comme vibrant sympathiquement suivant une loi intérieure, fondée dans leur nature. Or ces relations et ces liens internes, la sensation, qui ne voit rien que du dehors, ne saurait nous les faire découvrir ; l’esprit seul peut en créer la notion. Quand j’apprends que A précède régulièrement B, ma connaissance s’est enrichie d’un nouveau savoir ; mon intelligence n’est aucunement satisfaite par une constatation qui ne porte pas en elle sa raison. Je ne commence à comprendre que s’il m’est possible de concevoir B par un biais qui me le fasse apparaître comme n’étant pas étranger à A, comme uni à A par quelque rapport de parenté. Le grand service que les religions ont rendu à la pensée est d’avoir construit une première représentation de ce que pouvaient être ces rapports de parenté entre les choses. Dans les conditions où elle était tentée, l’entreprise ne pouvait évidemment aboutir qu’à des résultats précaires. Mais d’abord, en produit-elle jamais qui soient définitifs et n’est-il pas nécessaire de la reprendre sans cesse ? Et puis, ce qui importait, c’était moins de la réussir que de l’oser. L’essentiel était de ne pas laisser l’esprit asservi aux apparences sensibles, mais, au contraire, de lui apprendre à les dominer et à rapprocher ce que les sens séparent ; car du moment où l’homme eut le sentiment qu’il existe des connexions internes entre les choses, la science et la philosophie devenaient possibles. La religion leur a frayé la voie. Mais si elle a pu jouer ce rôle, c’est parce qu’elle est chose sociale. Pour faire la loi aux impressions des sens et leur substituer une manière nouvelle de se représenter le réel, il fallait qu’une pensée d’un genre nouveau se constituât : c’est la pensée collective. Si seule, elle pouvait avoir cette efficacité, c’est que, pour créer tout un monde d’idéaux à travers lequel le monde des réalités senties apparût transfiguré, il fallait une surexcitation des forces intellectuelles qui n’est possible que dans et par la société.
Il s’en faut donc que cette mentalité soit sans rapports avec la nôtre. Notre logique est née de cette logique. Les explications de la science contemporaine sont plus assurées d’être objectives, parce qu’elles sont plus méthodiques, parce qu’elles reposent sur des observations plus sévèrement contrôlées, mais elles ne diffèrent pas en nature de celles qui satisfont la pensée primitive. Aujourd’hui comme autrefois, expliquer, c’est montrer comment une chose participe d’une ou de plusieurs autres. On a dit que les participations dont les mythologies postulent l’existence violent le principe de contradiction et que, par là, elles s’opposent à celles qu’impliquent les explications scientifiques
Il est vrai que, si la pensée primitive avait pour la contradiction l’espèce d’indifférence générale et systématique qu’on lui a prêtée
Ainsi, entre la logique de la pensée religieuse et la logique de la pensée scientifique il n’y a pas un abîme. L’une et l’autre sont faites des mêmes éléments essentiels, mais inégalement et différemment développés. Ce qui paraît surtout caractériser la première, c’est un goût naturel aussi bien pour les confusions intempérantes que pour les contrastes heurtés. Elle est volontiers excessive dans les deux sens. Quand elle rapproche, elle confond ; quand elle distingue, elle oppose. Elle ne connaît pas la mesure et les nuances, elle recherche les extrêmes ; elle emploie, par suite, les mécanismes logiques avec une sorte de gaucherie, mais elle n’en ignore aucun.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-1-n1775) Voir plus haut, p. 145.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-2-n1776) Pikler, dans l’opuscule cité plus haut, avait déjà exprimé, d’une manière un peu dialectique, le sentiment que c’est là ce qui constitue essentiellement le totem.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-3-n1782) V. notre Division du travail social, p. 64 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-4-n1783)
Ibid., p. 76.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-5-n1785) C’est du moins le cas de toute autorité morale reconnue comme telle par une collectivité.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-6-n1786) Nous espérons que cette analyse et celles qui suivront mettront un terme à une interprétation inexacte de notre pensée d’où il est résulté plus d’un malentendu. Parce que nous avons fait de la contrainte le signe extérieur auquel les faits sociaux peuvent le plus aisément se reconnaître et se distinguer des faits de psychologie individuelle, on a cru que, pour nous, la contrainte physique était tout l’essentiel de la vie sociale. En réalité, nous n’y avons jamais vu que l’expression matérielle et apparente d’un fait intérieur et profond qui, lui, est tout idéal ; c’est l’autorité morale. Le problème sociologique — si l’on peut dire qu’il y a un problème sociologique — consiste à chercher, à travers les différentes formes de contrainte extérieure, les différentes sortes d’autorité morale qui y correspondent, et à découvrir les causes qui ont déterminé ces dernières. En particulier, la question que nous traitons dans le présent ouvrage a pour principal objet de trouver sous quelle forme cette espèce particulière d’autorité morale qui est inhérente à tout ce qui est religieux a pris naissance et de quoi elle est formée. On verra d’ailleurs plus loin que, si nous faisons de la pression sociale un des caractères distinctifs des phénomènes sociologiques, nous n’entendons pas dire que ce soit le seul. Nous montrerons un autre aspect de la vie collective, presque opposé au précédent, mais non moins réel (v. p. 303).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-7-n1788) Ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que la conscience collective n’ait pas de caractères spécifiques (v. sur ce point Représentations individuelles et représentations collectives, in Revue de Métaphysique et de Morale, 1898, p. 273 et suiv.).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-8-n1790) C’est ce que prouvent la longueur et le caractère passionné des débats où l’on donna une forme juridique aux résolutions de principe prises dans un moment d’enthousiasme collectif. Dans le clergé comme dans la noblesse, plus d’un appelait cette nuit célèbre la nuit des dupes, ou, avec Rivarol, la Saint-Barthélémy des propriétés (v. Stoll., Suggestion and Hypnotismus in der Voelkerpsychologie, 2
e
Aufl., p. 618).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-9-n1792) V. Stoll., op. cit., p. 353 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-10-n1793)
Ibid., p. 619, 635.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-11-n1794)
Ibid., p. 622 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-12-n1796) Les sentiments de peur, de tristesse peuvent se développer également et s’intensifier sous les mêmes influences. Ils correspondent, comme nous le verrons, à tout un aspect de la vie religieuse (v. liv. II, chap. V).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-13-n1798) Tel est l’autre aspect de la société qui, en même temps qu’impérative, nous apparaît, comme bonne et bienveillante. Elle nous domine et elle nous assiste. Si nous avons défini le fait social par le premier de ces caractères plutôt que par le second, c’est qu’il est plus facilement observable parce qu’il se traduit par des signes extérieurs et visibles ; mais il s’en faut que nous ayons jamais songé à nier la réalité du second (v. Règles de la méthode sociologique, préface de la seconde édition, p. xx, n. 1).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-14-n1801) Codrington, The Melanesians, p. 50, 103, 120. D’ailleurs, on considère généralement que, dans les langues polynésiennes, le mot mana a primitivement le sens d’autorité (v. Tregear, Maori Comparative Dictionary, s. v.).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-15-n1803) V. Albert Mathiez, Les origines des cultes révolutionnaires
(1789-1792).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-16-n1804)
Ibid., p. 24.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-17-n1805)
Ibid., p. 29, 32.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-18-n1806)
Ibid., p. 30.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-19-n1807)
Ibid., p. 46.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-20-n1808) V. Mathiez, La Théophilanthrophie et le culte décadaire, p. 36.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-21-n1812) V. Spencer et Gillen, North. Tr., p. 33.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-22-n1813) Il est même des cérémonies, notamment celles qui ont lieu à propos de l’initiation, où des membres de tribus étrangères sont convoqués. Tout un système de messages et de messagers est organisé en vue de ces convocations sans lesquelles il n’y a pas de grandes solennités (v. Howitt, Notes on Australian Message-Sticks and Messengers, in J.A.I., 1889 ; Nat, Tr., p. 83, 678-691 ; Spencer et Gillen, Nat. Tr.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-23-n1814) Le corrobbori se distingue de la cérémonie proprement religieuse en ce qu’il est accessible aux femmes et aux non-initiés. Mais, si ces deux sortes de manifestations collectives doivent être distinguées, elles ne laissent pas d’être étroitement parentes. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de revenir plus loin sur cette parenté et de l’expliquer.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-24-n1816) Sauf dans le cas de grandes chasses à battue.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-25-n1817) « The peaceful monotony of this part of his life », disent Spencer et Gillen (North. Tr., p. 33).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-26-n1818) Howitt, Nat. Tr., p. 683. Il s’agit, en l’espèce, des démonstrations qui ont lieu quand une ambassade, dépêchée vers un groupe d’étrangers, rentre au camp avec la nouvelle d’un résultat favorable. Cf. Brough Smyth, I, p. 138 ; Schulze, loc. cit., p. 222.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-27-n1821) Howitt, Nat. Tr., p. 535, 545. Le fait est d’une extrême généralité.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-28-n1823) Ces femmes étaient elles-mêmes des Kingilli et, par conséquent, ces unions violaient la règle d’exogamie.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-29-n1824)
North. Tr., p. 237.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-30-n1826)
North. Tr., p. 391. On trouvera d’autres exemples d’effervescence collective au cours de cérémonies religieuses dans Nat. Tr., p. 244-246, 365-366, 374, 509-510 (cette dernière a lieu à propos d’un rite funéraire). Cf. North. Tr., p. 213, 351.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-31-n1833) On voit que cette fraternité est une conséquence logique du totémisme, loin d’en être le principe. Les hommes ne se sont pas cru des devoirs envers les animaux de l’espèce totémique, parce qu’ils s’en croyaient parents ; mais ils imaginèrent cette parenté pour s’expliquer à eux-mêmes la nature des croyances et des rites dont ces animaux étaient l’objet. L’animal a été considéré comme un congénère de l’homme parce qu’il était un être sacré comme l’homme ; mais il n’a pas été traité comme un être sacré parce qu’on voyait en lui un congénère.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-32-n1834) V. plus bas, liv. III, chap. Ier, § III.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-33-n1836) À la base de cette conception, il y a, d’ailleurs, un sentiment bien fondé et qui persiste. La science moderne, elle aussi, tend de plus en plus à admettre que la dualité de l’homme et de la nature n’exclut pas leur unité ; que les forces physiques et les forces morales, tout en étant distinctes, sont étroitement parentes. De cette unité et de cette parenté, nous nous faisons, sans doute, une autre idée que le primitif ; mais, sous des symboles différents, le fait affirmé est le même de part et d’autre.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-34-n1838) Nous disons de cette dérivation qu’elle est parfois indirecte, à cause des techniques industrielles qui, dans le plus grand nombre de cas, semblent bien n’être dérivées de la religion que par l’intermédiaire de la mage (voir Hubert et Mauss, Théorie générale de la magie, Année sociol., VII, p. 144 et suiv.) ; car les forces magiques ne sont, croyons-nous, qu’une forme particulière des forces religieuses. Nous aurons plusieurs fois à revenir sur ce point.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-35-n1842) Une fois, du moins, qu’il est adulte et pleinement initié ; car les rites de l’initiation, qui introduisent le jeune homme à la vie sociale, constituent, par eux-mêmes, une sévère discipline.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-36-n1843) V. sur cette nature particulière des sociétés primitives, notre Division du travail social, 3e éd., p. 123, 149, 173 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-37-n1846) Nous nous bornons provisoirement à cette indication générale ; nous reviendrons sur l’idée et nous en ferons plus explicitement la preuve quand nous traiterons des rites (liv. III).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-38-n1848) V. sur ce point Achelis, Die Ekstase (Berlin), 1902, notamment le chap. Ier.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-39-n1850) Cf. Mauss, Essai sur les variations saisonnières des sociétés askimos, in Année sociol., IX, p. 127.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-40-n1853) On voit tout ce qu’il y a d’erroné dans les théories qui, comme le matérialisme géographique de Ratzel. (v. notamment sa Politische Geographie) entendent dériver toute la vie sociale de son substrat matériel (soit économique, soit territorial). Elles commettent une erreur tout à fait comparable à celle qu’a commise Maudsley en psychologie individuelle. Comme ce dernier réduisait la vie psychique de l’individu à n’être qu’un épiphénomène de sa base physiologique, elles veulent réduire toute la vie psychique de la collectivité à sa base physique. C’est oublier que les idées sont des réalités, des forces, et que les représentations collectives sont des forces plus agissantes encore et plus efficaces que les représentations individuelles. V. sur ce point notre article Représentations individuelles et représentations collectives, in Revue de Métaphysique et de Morale, mai 1898.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-41-n1854) V. plus haut, p. 269, 277.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-42-n1855) Même les excreta ont un caractère religieux. V. Preuss, Der Ursprung der Religion und Kunst, en particulier le chapitre II intitulé « Der Zauber der Defäkation » (Globus, LXXXVI, p. 325 et suiv.).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-43-n1857) Le principe est passé de la religion dans la magie : c’est le totum ex parte des alchimistes.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-44-n1863) V. sur ce point Les règles de la méthode sociologique, p. 5 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-45-n1865) Procope de Gaza, Commentarii in Isaiam, 496.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-46-n1866) V. Thébenot, Voyage au Levant, Paris, 1689, p. 638. Le fait fut encore observé en 1862 : cf. Berchon, Histoire médicale du tatouage, 1869, Archives de médecine navale, XI, p. 377, n.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-47-n1867) Lacassagne, Les tatouages, p. 10.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-48-n1868) Lombroso, L’homme criminel, I, p. 292.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-49-n1869) Lombroso, ibid., I, p. 268, 285, 291-292 ; Lacassagne, op. cit., p. 97.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-50-n1871) V. plus haut, p. 178.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-51-n1872) V. sur autorité des chefs et , Nat. Tr., p. 10 ; North. Tr., p. 25 ; Howitt, Nat. Tr., p. 295 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-52-n1873) Du moins en Australie. En Amérique, la population est le plus généralement sédentaire : mais le clan américain représente une forme d’organisation relativement avancée.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-53-n1874) Il suffit, pour s’en assurer, de regarder la carte dressée par Thomas dans Kinshio and Marriage in Australia, p. 40. Pour apprécier cette carte comme il convient, il faut tenir compte de ce fait que l’auteur a étendu, nous ne savons pourquoi, le système de la filiation totémique en ligne paternelle jusqu’à la côte occidentale de l’Australie, bien que nous n’ayons pour ainsi dire pas de renseignements sur les tribus de cette région, qui, d’ailleurs, est en grande partie, désertique.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-54-n1877) Les astres sont souvent considérés, même par les Australiens, comme le pays des âmes ou des personnages mythiques, ainsi que nous l’établirons dans le chapitre suivant : c’est dire qu’ils passent pour constituer un monde très différent de celui des vivants.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-55-n1878)
Op. cit., I, p. 4. Cf. dans le même sens Schulze, loc. cit., p. 243.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-56-n1879) Bien entendu, comme nous avons eu déjà l’occasion de le montrer (v. supra, p. 221), ce choix ne se fit pas sans une entente plus ou moins concertée entre les différents groupes puisque chacun d’eux dut adopter un emblème diffèrent de celui des voisins.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-57-n1883) L’état mental qui est étudié dans ce paragraphe est identique à celui que M. Lévy-Bruhl appelle loi de participation (Les fonctions mentales dans les sociétés inférieures, p. 76 et suiv.). Les pages qui suivent étaient écrites quand parut cet ouvrage ; nous les publions sous leur forme première sans y rien changer ; nous nous bornons à ajouter quelques explications où nous marquons comment nous nous séparons de M. Lévy-Bruhl dans l’appréciation des faits.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-58-n1887) V. plus haut, p. 307.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-59-n1888) Une autre cause a contribué, pour une large part, à cette fusion ; c’est l’extrême contagiosité des forces religieuses. Elles envahissent tout objet à leur portée, quel qu’il soit. C’est ainsi qu’une même force religieuse peut animer les choses les plus différentes qui, par cela même, se trouvent étroitement rapprochées et classées dans un même genre. Nous reviendrons plus loin sur cette contagiosité en même temps que nous montrerons qu’elle tient aux origines sociales de la notion de sacré (v. liv. II, chap. Ier, in fine).
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-60-n1891) Lévy-Bruhl, op. cit., p. 77 et suiv.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-61-n1892)
Ibid., p. 79.
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[↑](#c12_Les_Formes_elementaires_de_la_vie_religieuse_Livre_II_Chapitre_7.xhtml#cite_ref-62-n1894) V. plus haut, p. 207.