Passons maintenant à l’étude de l’acte le plus inattendu du règne de Jean Sturdza, qui n’est pas à vrai dire son œuvre exclusive, mais qui caractérise plus que tout ce qui précède son époque : la « Constitution libérale » que les amis politiques du Prince lui proposèrent et qu’il accepta en 1822. Mais pour en comprendre toute la signification et toute la portée, il nous faut revenir un peu en arrière.
A la suite de la Révolution grecque de 1821 et de l’occupation du pays par les Turcs, beaucoup de boyars se réfugièrent à l’étranger, quelques-uns à Suceava, la plupart à Czernowicz, en Bukowine, d’autres encore à Kissinew, en Bessarabie. Parmi ceux qui restèrent à Jassy, il faut distinguer plusieurs groupes : les grands boyars de vieille souche nationale, qui n’ayant jamais prêté leur concours aux princes Phanariotes, n’avaient rien à craindre de la vengeance des Turcs; les boyars de deuxième et de troisième classes nouvellement entrés dans la hiérarchie nobiliaire et qui n’avaient pas encore pris part aux affaires; enfin, un certain nombre d’amis des Hétairistes et ennemis du joug des Turcs, que diverses circonstances ou leur propre courage avaient retenus dans les principautés. De la correspondance de ces derniers avec leurs coreligionnaires politiques de l’étranger, conservée en partie, on voit ressortir bien des traits qui contribuent à éclairer l’étude de l’esprit public à ce tournant de l’histoire roumaine.
Deux grands partis, se formèrent aussitôt : le parti des opposants, des réfugiés, à la tête desquels se plaça un instant le Métropolitain Benjamin ; le parti des opportunistes, comprenant la majeure partie des boyars restés chez eux, à la tête desquels faillit un instant se placer le caimacam de la Porte, Étienne Vogoridès. Les émigrés étaient tous des Russophiles et attendaient leur salut de la Cour de St-Pétersbourg ; ils désiraient, pour la plupart, la double vassalité de la Russie et de la Turquie, et l’administration de leur principauté par une sorte d'oligarchie souveraine. Ce sont, en dépit de cette conception politique, des « rétrogrades ». Quand on leur parle de « réformes intérieures », à la façon de l’Europe occidentale, ou même de la possibilité de l’avènement d’un Prince indigène, ils se récrient ; ils demandent le gouvernement pour eux-mêmes, pour les boyars de la toute première noblesse, de la « protipendade » : quelle réforme pouvait leur être plus avantageuse que l’acceptation de ce point? Et, s’ils peuvent tous régner sous la forme de cette oligarchie, à quoi bon reconnaître pour chef un seul d’entre eux qui deviendrait vite autoritaire et insupportable? Ils s’intitulent eux-mêmes « Conservateurs» et c’est, en vérité, le titre qui parait leur convenir le mieux. En face de ces émigrés, il y a les boyars restés à Jassy ; en face des boyars de première classe, il y a ceux des deuxième et troisième classes ; en face des Russophiles, les Turcophiles, et en face des aristocrates, les démocrates ou les égalitaires. Ceux-ci désirent, au contraire, l’avènement d’un Prince indigène, car aucun d’eux ne songe à s’élever à cette dignité, et ils désirent des reformes importantes, parmi lesquelles, en premier lieu: l’égalisation de toutes les classes de la noblesse. „Que les membres soient désignés, que la forme du pouvoir soit fixée par les grands et les petits, — qu’une seule voix soit accordée au petit « sluger » et au grand « logothète », — que tout se décide à la majorité des « voix ». Si les premiers s’appellent des « conservateurs », quel titre donner à ces derniers, sinon celui de « libéraux » ou de « progressistes » ? Mais leurs adversaires leur décernent une épithète qui nous paraît, pour l’époque, encore plus caractéristique : quand ils ne les appellent pas les « méchants » ou les « parvenus » (ciocoii), ils les désignent sous le nom de « charbonniers » (Cărvunarii). Lorsque la Sublime Porte déclara une guerre d’extermination aux Russes et que les relations diplomatiques entre la Russie et la Turquie furent interrompues, tout le monde sentit que l’Ancien Régime avait vécu dans les principautés roumaines, que désormais il n’y aurait plus de Grecs dans ces principautés et quune ère nouvelle, meilleure ou pire, s’ouvrait pour elles. Tous les partis voulurent courir la chance. Et d’abord les grande boyars de Bessarabie et de Bukowine avaient attendu en vain l’intervention rêvée de la Russie. Tous les regarde se tournèrent alors, un instant, vers le seule puissance qui décidait du sort des principautés, vers la « puissance suzeraine ». On voit tout d’un coup, en octobre 1821, les émigrés envoyer un des leurs, le dvornic Théodore Balş, chez le Caimacam, puis chez le Pacha de Silistrie, pour les prier de transmettre à Constantinoble un Arz-Magzar ou une supplique exposant leurs désirs et leurs doléances. Ils demandaient : 1° Un Divan (« Décemvirat ») de boyars de première classe, tout puissant, sous la conduite d’un vieux boyar de marque (« Basch-Boyar »), à la place du Prince phanariote disparu ou du « Prince indigène », qu'on serait tenté de mettre à sa place : « Le pays — disaient-ils — n’est pas de taille à supporter en ce moment-ci les frais d'entretien d’une cour princière... plus tard on avisera »; 2) une milice nationale ; 3) le retour aux anciens privilèges... Comme revendications de détails, ils réclamaient encore : la liberté du commerce, l’expulsion du pays de l’élément grec, des représentants indigènes auprès de la Sublime Porte. Le Dvornic Théodore Balş et les boyars de Bukowine avaient compté sans les ambitions secrètes du caimacam Vogoridès. Celui-ci fut fort mécontent du premier point de l’Ars-Magzar, car il caressait dans son esprit le rêve de devenir Prince des Moldaves. Il ne dit rien, se montra, au contraire, très favorable au succès de la supplique et demanda seulement à Théodore Balș et à ses amis politiques de Moldavie un certificat prouvant son origine roumaine... Il était Bulgare hellénisé, mais se disait que, après l'Hétaïre des Grecs, le vent pouvait souffler à Constantinople pour les Princes indigènes. Puis il munit le Dvornic Balş d’une « lettre de recommandation » pour son ami Mehmed-Siri, le Pacha de Silistrie.
Dans cette lettre, il recommandait fort mal Balş et ses amis de Bukowine : « Ces boyars se montrent très peu respectueux en demandant à un pays étranger ce dont ils peuvent avoir besoin pour leur propre pays...» « N’ont-ils pas très bien trouvé leur contentement et leurs aises, les uns chez les Autrichiens, les autres chez les Russes ? » D’autre part, il se tourne vers les boyars de deuxième et de troisième classes, en qui il voyait désormais ses seuls amis possibles. Il leur arrache un Arz-Magzar demandant : 1) Un Prince indigène, élu par les boyars de toutes les classes ; 2) l’égalité absolue des ordres de la noblesse ; 3) le retour aux anciens privilèges, — et comme points secondaires, la liberté du commerce, l’expulsion de ces « Grecs qui ont, par leurs méfaits, compromis la bonne réputation des principautés », une représentation nationale auprès de la Sublime Porte...
Théodore Balş fut fort étonné de se voir mal accueillir par Mehmed-Siri, plus étonné encore de rencontrer sur le chemin de la Silistrie Jean Stavru, le porteur de la supplique des petits boyars. Et, chose incroyable ! fut-ce l’effet du regard sévère de l’ami du Caimacam, fut-ce l’extrême naïveté politique des Moldaves à cette époque... on ne sait... mais nous voyons tout d’un coup Théodore Balş mettre sa supplique dans sa poche et signer, à côté de Jean Stavru et des autres, la supplique des a boyars parvenus ». — Cette supplique seule arriva à Constantinople. La Sublime Porte ne connut que les désirs des petits boyars. Les grands boyards furent furieux et parlèrent de demander cinq cents Turcs pour les défendre contre le « carbonnarisme des méchants »... Le Caimacam Vogoridès songeait désormais à son couronnement comme prince « indigène »...
Mais à trompeur trompeur et demi. — Le Caimacam Vogoridès avait dupé les grands boyars et les petits boyars le dupèrent. Lorsque, en mars 1822, il fut décidé qu’une députation de boyars moldaves et valaques irait à Constantinople exposer de vive voix les griefs et les vœux des principautés devant le Grand Seigneur, la partie moldave de la députation, choisie à dessein par les soins du gouvernement parmi lés petits boyars, oublia de s’occuper des affaires du Caimacam. Elle préféra s’occuper des affairés exclusives de la principauté, et désigner comme Prince un « charbonnier » proprement dit... Jean Sturdza fut l’élu de la Porte, parce qu’il fut d’abord l’élu des petits boyars... Rien de plus naturel donc que de voir, comme nous le disions, sur le trône de la Moldavie, un boyar obscur, parce q u il avait été obscur... Rien de plus naturel aussi que les exigences des petits boyards à l’égard de leur élu. Lorsque le Prince Jean Sturdza fit son entrée dans sa capitale, le 9 octobre 1833, ses coreligionnaires politiques en -carbonnarisme l’accueillirent avec une sorte de « Credo » ou de « Constitution » qu’ils avaient rédigé pendant le séjour du Prince à Constantinople, le 13 septembre 1822. Le Prince après l’avoir examiné longtemps, n’y trouva que l’exposé des idées de son parti et, en honnête homme qu’il était, ne put qu’y adhérer. Cette « constitution », qui est l’acte le plus curieux et peut-êtré le plus remarquable du règne du Prince, n’est pourtant que dans une très faible partie son œuvre personnelle. Elle est l’œuvre de tous les siens et représente, en somme, l’esprit de son époque. Aussi faut-il le considérer à part, parmi les autres œuvres du Prince et lui accorder une importance toute particulière.
Cette constitution de l’an 1822, découverte par M. Xénopol dans les papiers du consulat russe de Jassy — un petit cahier de trente-cinq pages à écriture assez embrouillée — contient soixante-dix-sept « points » ou articles et peut se diviser en cinq parties très distinctes. Dans les dix-huit premiers articles, le législateur pose les principes généraux. De ces principes on n'avait jamais jusqu’alors entendu parler dans la principauté. Toutefois, leur origine ne fait aucun doute. Ainsi l’art. 3 consacre pour la première fois le respect de la propriété (jusqu’à présent il fallait renouveler ces actes de propriété à chaque nouvel avènement d’un Prince), avec la seule exception prévue par l’art. 5, de l’expropriation pour cause d’utilité publique ; — l’art. 6 parle du respect de la liberté individuelle, sauf le cas où la loi demande la mise en état d’arrestation, et encore l’art. 9 fait-il, à ce sujet, une importante distinction, entre les condamnés et les simples prévenus ; — l’art. 10 garantit le respect de l’honneur des personnes et prévoit des punitions sévères contre les calomniateurs ; — les art. 11, 17 et 18 traitent de l’égalité devant la loi « sans distinction de personnes » ; — le 12ème proclame le principe du mérite dans l’attribution des fonctions publiques ; — le 13ème, la liberté du travail...
Pour comprendre la seconde partie de cette constitution, il faut d’abord s’être mis d’accord sur le sens de la troisième, celle qui va de l’art. 24 à l’art. 37 et qui traite de l’organisation judiciaire. La justice devra être distribuée en Moldavie par cinq catégories de tribunaux, divisés en trois instances. Au bas de l’échelle, il y a le « tribunal provincial » où siègent le juge du département et l’«ispravnic» : ces deux personnages jugent de concert chaque fois que l’affaire appartient au domaine politique ou criminel ; sinon, c’est le préfet seul qui décide. — Au-dessus de ce tribunal, il y en a, placés sur le même plan, trois autres qui sont des sortes de cours d’appel : le « Département criminel », le « Département des causes étrangères » et le « Deuxième Divan », composés chacun de cinq membres, tous boyars, mais nommés en vertu de leur seul mérite et sans aucune distinction de rang. — Enfin, au haut de l’échelle, il y a le tribunal de troisième instance, le « Premier Divan », composé de sept membres, tous grande boyars de la « protipendade » : un « logothète », quatre « dvornics », un « spatar », un « ban ». — Ce dernier tribunal, sorte de Cour de Cassation, ne juge jamais sur le fond, mais examine si la loi a été respectée. Dans tous ces tribunaux, désignés du seul mot de « Divans » ou de « Départements », la décision se prend à la majorité absolue. Il sont tous tenus d’avoir des registres en ordre et des archives régulières. — Il n’y a point de droit d'appel contre les sentences du « Premier Divan », et c’est ainsi que la constitution de 1822 établit le principe de la chose jugée, contrairement à l’usage établi qui voulait qu’on appelât de la décision de chaque Prince devant son successeur. On ne prévoit qu’une seule cause de revision possible : la possession de nouvelles preuves.
La deuxième partie, la plus importante de toutes, institue un régime oonstitutioimel représentatif. Le pouvoir exécutif est détenu, en vertu des art. 19-23 par le Prince et par un conseil de quarantc-et-un membres nommé Conseil d'État ou « Conseil public”. Ces quarante-et-un membres sont recrutés comme il suit : trois personnages ecclésiastiques, les vingt-deux membres des « Divans » ou « Département judiciaires, enfin un boyar par district, élu par l’ensemble des boyars du district « sans aucune distinction de rang » (soit en tout seize boyars pour le seize districts dont se composait la Moldavie à cette époque). — Les attributions précises du « Conseil public » sont : la rédaction des lois, la répartition des impôts, les encouragements au commerce, la surveillance de l’instruction et de la moralité publiques, l’administration des églises et de leurs biens, — enfin, pourrait-on dire, tout ou presque tout. Les décisions y sont prises, comme dans les tribunaux, à la majorité des voix. En cas de conflit entre le Prince et son Conseil, c’est le Conseil qui l’emporte, car le prince ne peut refuser qu’une seule fois une mesure proposée par le Conseil; si celui-ci insiste, l’art. 2; oblige le Prince à donner son adhésion.
M. Xénopol, qui a copié le texte de la première constitution libérale roumaine, observe, en additionnant les voix du « Conseil public », que le législateur s’y prit de façon à ce que la majorité revînt toujours aux boyars des deuxième et troieième classes. En effet, sur les quarante-et-une vois intérêts de la haute boyarie ne se trouvaient représentés que par les sept membres du « Premier Divan » et en outre par la moitié des député districts, c’est-à-dire par huit autres membres : admettons encore que dans les grandes questions, les trois personnages ecclésiastiques aient pu voter avec les grands boyars. Cela fait un total de dix-huit voix sur quarante-et-une. Les petits boyars pouvaient, en moyenne, compter sur le reste des voix, c’est-à-dire sur une majorité de vingt-trois. Il y avait donc beaucoup de chance pour que le pouvoir restât aux mains des petits boyars. La quatrième partie de cette constitution s’occupe du recrutement des fonctionnaires (art. 46-51) et essaie d’établir d’une façon équitable les droits et les devoirs réciproques des différentes classes de la société (art. 53-61). Les places continueront à être données pour un an, comme sous les Phanariotes, « pour éviter toute intrigue” et pour que « tous les fils de la patrie puissent en jouir à tour de rôle », — mais, ajoute le texte de la loi « en considération du mérite seul » et « après avis du conseil public et du Prince », ce qui revient à dire, comme nous venons de le voir, après avis du conseil seul ou avis des petits boyars.... Les traitements des fonctionnaires devaient être fixés, des mesures sont prévues contre leur vénalité. — Un peu plus déclamatoire est la série d’articles 53-61, concernant les droits et les devoirs réciproques des différentes classes : Cet « arrangement doit être tel que ni le propriétaire terrien ne soit lésé dans son droit de propriété, obligé qu’il sera d’accorder des terres aux villageois, ni les paysans ne soient opprimés ». C’est comme si on n’avait rien dit. Mais en revanche, on dressa un tableau exact de tous les impôts indirects, on augmenta légèrement l’impôt personnel en vue de l’entretien des postes et l’on découvrit une façon plus équitable de recueillir les impositions : la collecte devait se faire dans chaque département par une commission, composée de trois boyars, dont deux de la localité, et dont les actes étaient contrôlés par le « Conseil public ».
Enfin, une cinquième et dernière partie de cette œuvre législative concerne tout ce qui ne pouvait trouver place dans les chapitres précédents. Elle ordonne la nomination d’hégoumènes indigènes dans tous les couvents de la principauté, l'instruction des prêtres, la création d’écoles élémentaires à Jassy et dans tous les districts moldaves, la délimitation de toutes les terres, la liberté du commerce, les mesu res à prendre contre les Juifs, dont le nombre devient de plus en plus considérable dans la principauté, enfin l’élection du Prince par une grande Assemblée composée du métropolitain, des évêques et des boyars de tous rangs sans aucune exception, « depuis le grand logothète jusqu’au şatrar ». — L’article le plus significatif de cette constitution est le 74ème qui oblige le Prince aussi bien que son « Conseil public » lui-même à obéir aux lois et à toutes les décisions qu’ils auront prises de concert. — Une longue conclusion de ton enthousiaste nous dit que si on obéit à toutes ces prescriptions « l’injustice et la persécution » seront bannies à tout jamais de la Moldavie où règneront au contraire « le calme, la paix et la vie telle qu’elle doit être ».
En principe, cette constitution est, comme le remarque très bien M. Xénopol, plutôt aristocratique et ne constitue, tout au plus, qu’un système de transition. Il ne s’agit point en effet d’accorder des privilèges à toutes les classes de la société, mais à toutes les classes de boyars seulement ; elle se borne, en somme, à introduire l'égalité parmi les boyars. D’autre part, elle n’indique nullement les moyens qui pourraient permettre à un paysan de sortir de son village et de venir participer à Jassy, même « selon son mérite », aux affaires publiques. Enfin, les impôts devaient être acquittés, comme par le passé, par « le peuple » exclusivement. Et il était naturel qu’il en fût ainsi, « car le progrès des idées ne pouvait se faire que par la classe des boyars, attendu qu’il n’existait point de bourgeoisie puissante qui pût devenir le foyer des idées nouvelles ». — Cette petite boyarie, nouvelle boyarie comme nous l’avons vu, peut être elle-même considérée, à la rigueur, comme une sorte de bourgeoisie tenant le milieu entre la grande noblesse et le peuple des campagnes.
Bonne ou mauvaise, aristocratique ou démocratique, la Constitution de l’an 1822 est d’inspiration occidentale, précisons : française. Ce ne sont point seulement ses tendances qui le dénotent, ce ne sont pas seulement ses formules remplies de néologismes et ce n’est même pas seulement l’épithète injurieuse de « charbonniers » donnée à ses auteurs. M. Xénopol, qui a eu encore le mérite de commenter ce texte d’une façon supérieure, use d’un argument décisif pour prouver l’origine française de cette première manifestation de la pensée libérale en Roumanie ». Il compare la lutte engagée autoùr de la constitution de 1822 à celle qui porta en 1804 — dix-huit ans auparavant ! — sur les idées exprimées dans une lettre anonyme injuriant les grands boyars. Cette lettre, malheureusement perdue aujourd’hui, était l’œuvre des boyars des deuxième et troisième classes. On le sait par one « Anaphora » fulminante signée par le Prince, les ecclésiastiques et les boyars de la « protipendade » contre les auteurs anonymes, pour le cas où on les découvrirait. Cette «Anaphora» nomme les auteurs du pamphlet des «charbonniers», déclare que leurs idées sont inspirées par l’indiscipline bien connue de l’esprit français, nous parle de leurs idées de réforme et de leurs menaces de révolte et nous indique clairement que les boyars appartenaient à la petite noblesse. La Constitution de 1822 aurait donc mis environ dix-huit ans à s'élaborer dans l’esprit de ses auteurs.