Deuxième tableau

Une cellule à la prison de For-l’Évêque.

Le lit (!) se trouve à gauche, une planchette est à droite – au fond, derrière des barreaux, cette tache blanchâtre est la fenêtre. La planchette et le lit sont fixés aux murs – et le mobilier volant ne comporte à vrai dire qu’un tabouret bancal.

À droite, au premier plan, la porte, avec, au centre, son judas.

Cette porte s’ouvre avec fracas, et Beaumarchais est introduit par un geôlier – je ne dis pas : condescendant – mais presque.

Beaumarchais le regarde en hochant la tête. L’autre lève les yeux au ciel avec l’air de lui dire qu’il est de son avis.

BEAUMARCHAIS. – Est-ce qu’il vous serait possible de me prêter une plume et de me donner de l’encre ?

LE GEÔLIER. – Tout de suite – et un peu de lumière, aussi ?

BEAUMARCHAIS. – Oui, en effet – merci.

(Le geôlier se retire.

Beaumarchais, resté seul, jette sur le lit le sac qu’il portait à la main – et il dépose sur la tablette le dossier qu’il avait sous le bras. Puis il se débarrasse de sa cape et retire son chapeau. Il porte un pansement au front.

Le geôlier revient avec une chandelle allumée, de l’encre et une plume.)

LE GEÔLIER. – Avez-vous faim ?

BEAUMARCHAIS. – Du tout.

LE GEÔLIER. – Bonne nuit.

BEAUMARCHAIS. – Vous aussi.

(Seul, de nouveau, Beaumarchais écrit – tout haut – cette lettre fameuse :)

« Cher Gudin

« En vertu d’une lettre sans cachet, appelée lettre de cachet, je suis logé au For-l’Évêque où l’on me fait espérer que, hors le nécessaire, je ne manquerai de rien. Qu’y faire ? Partout où il y a des hommes, il se passe des choses odieuses, et le grand tort d’avoir raison est toujours un crime aux yeux du pouvoir qui veut punir sans cesse et ne jamais juger… »

(Et tandis qu’il écrit :

LE RIDEAU SE FERME

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