Au général Hugo.

Paris, 26 juillet.

Mon cher papa,

Ta lettre a comblé ma joie et ma reconnaissance. Je n’attendais pas moins de mon bon et tendre père. Je sors de chez M. de Lourdoueix ; il doit sous très peu de jours me fixer un terme précis ; alors je montrerai ta lettre à M. et Mme Foucher Ainsi je te devrai tout, vie, bonheur, tout ! Quelle gratitude n’es-tu pas en droit d’attendre de moi, toi, mon père, qui as comblé le vide immense laissé dans mon cœur par la perte de ma bien-aimée mère !

Je doute, pour ce qui concerne la pension que je viens d’obtenir de la maison du roi, qu’on me rappelle le trimestre de juillet ; alors elle ne courrait qu’à dater du 1er octobre, ce qui remettrait mon bienheureux mariage à la fin de septembre ; c’est bien long, mais je me console en pensant que mon bonheur est décidé. Quand l’espérance est changée en certitude, la patience est moins malaisée. Cher papa, si tu savais quel ange tu vas nommer ta fille !

J’attends toujours impatiemment ton poème, et je ferai des exemplaires du Journal de Thionville l’usage que tu m’indiques ; un espagnol nommé d’Abayma, qui m’est venu voir hier, m’a parlé de mon père de manière à m’en rendre fier, si je ne l’avais pas déjà été.

Je n’ai aucune prévention contre ton épouse actuelle, n’ayant pas l’honneur de la connaître. J’ai pour elle le respect que je dois à la femme qui porte ton noble nom ; c’est donc sans aucune répugnance que je te prierai d’être mon interprète auprès d’elle ; je ne crois pouvoir mieux choisir. N’est-il pas vrai, mon excellent et cher papa. ?

Adieu, pardonne ce griffonnage, c’est ma reconnaissance, c’est ma joie qui me rendent illisible. Adieu, cher papa, porte-toi bien et aime ton fils heureux, dévoué et respectueux.

Victor.

Je tâcherai de remettre en personne ta lettre au général d’Hurbal. Je renouvelle mes démarches pour la Société de Blois.

Dans ma prochaine lettre, je te parlerai de tous les travaux auxquels le bonheur va me permettre de livrer un esprit calme, une tête tranquille et un cœur content. Tu seras peut-être satisfait ; c’est au moins mon plus vif désir.

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