À Monsieur le comte Jules de Rességuier, à Toulouse.

Paris, 6 septembre 1823.

Faut-il croire à ce bonheur ? vous allez venir à Paris et je n’en sais rien par vous !... Écrivez-moi du moins, Jules, pour me confirmer cette bonne nouvelle, je l’ai déjà donnée à Soumet comme certaine. J’ai de la crédulité pour ce qui me fait plaisir. Cependant je ne crois pas à toute votre aimable lettre ; j’ai vu avec joie qu’elle était pleine de louanges, parce que toute cette louange est de l’amitié. Il y a dans cette lettre un épanchement qui m’a bien touché. Vous m’y parlez d’un ange que notre Alexandre m’avait déjà fait connaître, d’un ange qui vous aime et que j’aime de vous aimer.

Soumet va être joué presque à la fois aux deux théâtres, c’est-à-dire qu’il va obtenir deux triomphes, il a fait à son chef-d’œuvre, Saül, de très beaux changements. Vous verrez ! je vous promets que vous serez aussi heureux de la beauté de l’ouvrage que de la gloire de l’auteur. Saül et Clytemnestre sont à mes yeux les deux plus belles tragédies de l’époque et ne le cèdent en rien aux chefs-d’œuvre de notre scène, en rien.

Adieu, cher et excellent ami ; Soumet a été charmé de votre mot. Au reste, il va vous écrire et vous dira tout cela beaucoup mieux que moi. Moi, je ne sais que vous dire combien je vous aime et comme je vous embrasse. Présentez mes respects à Mme de Rességuier. — Si cette lettre pouvait ne plus vous trouver là-bas !…

Victor.

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