À Madame Victor Hugo.

Saint-Goar, 15 septembre 1840.

Je continue lentement comme tu vois, chère amie, mon voyage du Rhin pris à rebours. Voici la suite de mon Journal. Je tâche de tout voir afin d’avoir une idée complète et définitive de cet admirable pays.

Je n’ai pu me rappeler la date de la mort de Marie de Médicis et de la naissance de Rubens. Ton père doit les savoir. Je le prie de remplir les blancs que j’ai laissés. Si je l’avais avec moi, ce qui me ravirait, je ne laisserais pas de blancs.

J’ai fait pour ma Didinette un dessin d’Andernach, mais il est trop grand pour tenir dans une lettre. Il faudrait le plier. Je le garde dans mon album pour te le donner à Paris, ma Didine chérie. J’ai quitté Andernach et je suis à Saint-Goar, merveilleux endroit dont je t’enverrai un portrait tel quel.

Je voyage lentement parce qu’il le faut, et cependant à regret, car il me tarde d’être à Mayence où tes lettres m’attendent, où toutes vos lettres m’attendent, mon Adèle toujours aimée, mes enfants toujours désirés ; j’espère qu’elles ne m’apporteront rien que de doux et de bon. Je songe sans cesse à vous tous avec attendrissement. Vous me suivez partout, au milieu de mes courses, au milieu de mon travail.

Si tu vois Louis, dis-lui que je lui écrirai un de ces jours. Toi, chère amie, aie soin qu’aucun étranger ne voie ce que je t’envoie.

Adieu, chère amie, adieu, mon Adèle. Pense à moi et aime-moi. À bientôt une autre lettre. Écrivez-moi toujours à Mayence. De Mayence j’écrirai à tous, car j’espère que tous m’auront écrit. Je vous embrasse bien tendrement, ainsi que ton bon père. Un baiser à vous tous, à toi, chère amie, à toi, ma Didine, à toi, mon Charles, à vous, mon Toto et ma

Dédé. Pensez tous à votre père qui vous aime tant.

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