Madame la V tesse Victor Hugo, à la Terrasse, commune de Saint-Prix, par Franconville. (Seine-et-Oise.)

31 juillet 1840.

Je t’envoie bien vite, chère amie, une bien bonne nouvelle. Charles a le premier prix de thème au concours général. Ce matin, M. Jauffret est allé le lui annoncer en pleine classe au collège. Quand il a prononcé le nom de Charles, toute la classe a éclaté, il y a eu trois salves d’applaudissements. Le pauvre enfant est bien heureux. Je l’ai vu deux fois aujourd’hui, ainsi que M. Poirson, et M. Jauffret. Tu vas être bien heureuse aussi, n’est-ce pas ? Embrasse pour moi nos chères petites filles. Je t’aime bien, mon Adèle.

V.

Serre pour moi la main de ton bon père. J’ai retourné toute l’armoire sans trouver ton chiffon bleu. À mercredi.

À Pradier.

Monsieur,

Madame Lanvin m’a fait hier la communication dont vous l’aviez chargée pour moi. Je m’empresse de vous dire que je répondrai cordialement à votre confiance. Vous avez eu raison de penser que, pendant l’instant d’embarras que vous éprouviez, votre Claire pouvait compter sur moi. Je sens pour vous, monsieur, vous le savez, une vive admiration que j’aurai, j’espère, occasion de vous prouver avec éclat. Et puis, Claire est vraiment une charmante enfant, pleine de qualités nobles et distinguées, que vous serez fier un jour d’avoir pour fille comme elle est glorieuse déjà de vous avoir pour père.

Je regrette profondément que l’exiguïté de mes ressources ne me permette de vous offrir qu’une aide momentanée. Heureusement votre Claire a en vous le meilleur des appuis, l’appui naturel qui ne lui fera jamais défaut, dans la riche moisson de fortune et de gloire que votre beau talent a déjà commencé et continuera de recueillir longtemps encore. Elle ne réclame et n’attend qu’une modeste existence. Claire l’aura, n’est-ce pas, monsieur ? Et si sa place est petite dans le monde, elle sera grande dans votre cœur.

Recevez, je vous prie, l’assurance de mes sentiments les plus dévoués.

Victor Hugo.

22 août 1840.

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