À M. Charles de Lacretelle.

23 mai 1841.

Que devenez-vous, cher et vénérable ami ? Comment se porte Mme de Lacretelle ? Êtes-vous toujours heureux, comme je l’espère et comme je le désire ardemment, dans tout ce que vous aimez ? Le printemps est-il doux et charmant à Bel-Air, vous épanouissez-vous au milieu des rayons, des parfums et des chants d’oiseaux, et le bon Dieu vous dédommage-t-il des affreux spectacles qui ont contristé votre noble esprit au mois de novembre dernier ? Ces questions que je vous adresse en ce moment avec une sollicitude presque filiale, nous nous les faisons tous les soirs sur notre balcon de la place Royale en regardant les étoiles et en songeant à nos amis. Ma famille, quand elle parle de vous, est comme une moitié de la vôtre. Mes petites filles vous aiment comme moi. J’écris avec intention cette phrase amphibologique, parce que les deux sens en sont vrais.

Je pense que je serai reçu à l’Académie le 3 juin. Je vous chercherai et vous regretterai. Votre fils y sera, ce doux et charmant poëte, voisin de Lamartine de plus d’une manière. Il y sera, et je lui enverrai du regard toutes les bonnes pensées que j’ai dans le cœur pour vous.

Travaillez, mon noble confrère, vous le devez à votre pays, et vivez longtemps, vous le devez à vos amis.

À Alfred Asseline.

9 juin [1841].

Ta lettre est charmante, mon bon petit Alfred, et tes vers sont charmants aussi. Lettre et vers m’ont vivement touché. Tu as raison de voir en moi plus qu’un poëte, un homme ; plus qu’un cousin, un ami. Continue à élever vers les choses de la pensée ton cœur et ton esprit. Vois-tu, la pensée, c’est la grande maison, c’est la grande église, c’est la grande patrie.

Je te remercie et je t’embrasse.

Victor.

Share on Twitter Share on Facebook