À Ziegler.

Mon cher Ziegler,

La personne qui m’envoie cette lettre pour vous la faire parvenir est une mère dont la fille est morte. Il s’agit d’un pauvre enfant, et c’est la vieille aïeule au bord de la tombe qui me prie, et c’est la femme morte couchée dans sa fosse qui vous supplie.

Au moment où elle a su qu’elle était condamnée à mort, Mme Eugénie Drouit a écrit ceci pour vous. À un pareil instant on dit vrai. Quant à moi, je la crois ; j’en croyais déjà ce sourire de l’enfant qui vous ressemble ; j’en crois à jamais la parole de cette mère qui a dit son dernier mot et qui ne parlera plus.

C’est à Dieu maintenant qu’elle recommande son fils dans le ciel pendant que je vous le recommande sur la terre.

J’accomplis ce devoir le lendemain du jour où j’ai failli moi-même perdre mon enfant.

Il me semble que Dieu même m’inspire en ce moment. Qu’il vous inspire aussi !

Cet enfant sera sauvé dans cette vie et une mère sera réjouie dans la tombe.

Lisez ceci. J’espère en vous. J’espère en votre cœur.

Votre vieil ami.

Victor Hugo.

7 9bre 1850.

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