À Madame Victor Hugo.

Bruxelles, lundi 22 mars.

Bonjour, chère maman. Ceci n’est qu’un mot à la hâte pour te dire que nous nous portons bien et pour t’envoyer ce feuilleton de Dumas, charmant pour toi. Écris-lui pour le remercier. Il y sera très sensible.

M. Carpier, le directeur des Variétés, est revenu ici ; « pour moi », dit-il toujours. Je lui ai renouvelé l’explication catégorique que je lui avais déjà faite : qu’il m’était impossible de rien donner au théâtre, et surtout une comédie, avant d’avoir fait un acte politique et publié mon livre. Il m’a dit : Mais, après votre livre, on ne laissera plus jouer votre pièce. — C’est possible, lui ai-je répondu, mais c’est mon devoir. — Il m’a dit d’ailleurs que l’Élysée était fort effaré de mon livre et que Romieu lui en avait parlé avec anxiété. C’est bon.

Il demande une pièce à Charles. Pourvu que Charles la fasse en vers, afin d’écarter toute idée de vaudeville, et qu’il ait, lui aussi, publié ou écrit auparavant La Conciergerie, je trouve cela très bien, et j’y pousse Charles.

Hetzel dit qu’un mot de moi à Desnoyers ouvrirait à Charles le feuilleton du Siècle. Je t’enverrai ce mot. Charles pourrait donner au Siècle des lettres non politiques sur Bruxelles. Dis-moi ton avis. Il faut que Charles travaille, et gagne de l’argent. Ceci atteindrait les deux buts et lui plaît beaucoup.

Je suis jusqu’au cou dans mon cloaque du Deux-Décembre. Cette vidange faite, je laverai les ailes de mon esprit, et je publierai des vers.

Tu as dû recevoir deux lettres de moi la semaine passée, l’une par Mme Chambolle, l’autre par Mme de Laska.

Chère amie, j’embrasse Adèle sur tes joues, et toi sur les joues d’Adèle. Écrivez-moi. — Poignées de main à Auguste et Paul Meurice. — Embrasse mon Victor.

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