À Paul Meurice.

Marine-Terrace, 7 Xbre [1853].

Je reçois votre lettre, et je vous réponds courrier par courrier. Commencez, je vous prie, par remercier M. Huet et par lui remettre ce mot. Je tirerai sur vous pour cette petite somme. Maintenant, à M. Ragani. Vous avez excellemment fait. Il faut pousser vivement le procès. Je vous envoie le pouvoir. Il y a arrêt, arrêt de cour d’appel, devenu souverain. Par conséquent, même avec les juges d’à présent, l’issue ne peut faire doute. Voyez, je vous prie, cher poëte, cher ami, mon excellent ami, qui a été mon excellent avocat, Paillard de Villeneuve, c’est encore par lui que je voudrais que la cause fut plaidée. Il a déjà vaincu, il vaincra encore. Montrez-lui ces quelques lignes, et ajoutez en mon nom que je comprendrais pourtant qu’il hésitât à replaider pour moi, car ma situation est particulière maintenant, et devant les gens d’aujourd’hui, tout compromet. Je trouverais donc tout simple, dites-le lui bien, qu’il reculât devant mon nom à prononcer devant ces juges que j’ai flétris, et quoiqu’il ne s’agisse ici que d’une chose purement littéraire et d’une simple question de propriété, je ne lui en voudrais pas le moins du monde et mon amitié pour lui n’aurait ni étonnement, ni diminution, s’il déclinait, pour une foule de raisons que je comprends, la mission que je serais heureux de lui voir remplir. Mettez-le, je vous prie, bien à son aise, car, avant de m’aimer, j’aime mes amis. Si P. de V. ne peut pas, voyez (que d’ennuis je vous donne !) mon autre ami et mon autre avocat Crémieux. Si Crémieux ne peut, voyez Jules Favre qui est aussi mon ami, et que je serais fier d’avoir pour avocat. Au cas d’hésitation de Paillard de Villeneuve, écrivez-moi et je vous enverrai tout de suite une lettre pour Crémieux, et une, en-cas, pour Jules Favre. Crémieux est aussi excellent qu’éloquent, et je compterais bien sur lui. Outre le pouvoir et la lettre à M. Huet, vous trouverez sous ce pli copie de la lettre à moi adressée par M. Ragani (lettre qui me paraît tout conclure et tout juger contre les prétentions incroyables de ce monsieur) et copie de la lettre répondue par Charles en mon nom. Paillard de Villeneuve vous donnera tous les détails que vous désirez sur l’arrêt, les autres procès, etc. Si l’original de la lettre de Ragani était nécessaire, je vous l’enverrais. — Je n’ai plus que la place de vous embrasser et de vous demander pardon pour tant de peines. Vous devez me haïr autant que je vous aime. C’est difficile, mais juste. Dès que j’aurai les volumes de J. J. je lui répondrai. Sa lettre est exquise. Mettez-moi aux pieds de votre charmante femme.

Aug. m’a dit vos derniers chagrins auxquels nous prenons vive part.

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