À Hetzel.

Marine-Terrace, 31 mai [1855].

Il faut frapper un grand coup et je prends mon parti. Comme Napoléon (Ier), je fais donner ma réserve. Je vide mes légions sur le champ de bataille. Ce que je gardais à part moi, je le donne, pour que les Contemplations soient mon œuvre de poésie la plus complète. Mon premier volume aura 4 500 vers, le second 5 000, près de 10 000 vers en tout. Les Châtiments n’en avaient que 7 000. Je n’ai encore bâti sur mon sable que des Giseh ; il est temps de construire Chéops ; les Contemplations seront ma grande Pyramide.

En même temps que cette lettre, cher poëte éditeur, vous recevrez par la poste le premier fascicule. Vous y trouverez en l’ouvrant une instruction pour l’imprimeur que je vous serai obligé de faire exécuter avec un soin précis et de point en point. Pour cette grande bataille, je renonce aux pages blanches entre chaque pièce. On pourra mettre jusqu’à 26 vers à la page. 24 vaudraient mieux, je crois. Il me semble toujours qu’on pourrait imprimer en même temps l’in-18° belge et l’in-8° parisien. Cela nous ferait gagner un mois. Répondez-moi tout de suite si le premier envoi vous est bien parvenu, et si vous voulez tout le reste par la même voie. Je vous enverrai aussi rapidement que vous voudrez, tous les jours un envoi, si vous le souhaitez, ou du moins trois fois la semaine ; si, de votre côté, vous m’envoyez six épreuves par semaine (nécessaire), nous irons vite et nous paraîtrons dans deux mois (bon moment). Voici le calcul. Vingt et une feuilles par volume. Un volume par mois. Si vous allez plus vite encore, ce sera mieux.

Allons, en selle. Je serre vos bonnes mains.

Le premier envoi contient les xiv premières pièces du livre premier et va jusqu’à la page 32 du manuscrit.

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