À Marie Hugo

(sœur Sainte-Marie-Joseph).

Jersey, 22 juillet [1855].

Je te remercie de ton souvenir, chère enfant. Ta petite peinture est charmante ; la rose ressemble à ton visage et la colombe à ton âme ; c’est presque une peinture de toi que j’ai, en attendant l’autre. Tu me la promets et j’y tiens.

Les vers que tu nous as envoyés ce printemps avaient beaucoup de grâce ; il y avait sur toi particulièrement des strophes très douces et très heureuses. Dis-le de ma part à l’auteur, qui doit être charmante si elle ressemble à sa poésie.

Chère enfant, tu vas donc bientôt faire ce grand acte de sortir du monde. Tu vas t’exiler, toi aussi ; tu le feras pour la foi comme je l’ai fait pour le devoir. Le sacrifice comprend le sacrifice. Aussi, est-ce du fond du cœur que je te demande ta prière et que je t’envoie ma bénédiction.

Je serais heureux de te voir encore une fois dans cette suprême journée de famille dont tu me parles. Dieu nous refuse cette joie ; il a ses voies. Résignons-nous. J’enverrai près de toi l’ange que j’ai là-haut. Tout ce que tu fais pour ton frère est bien ; je sens là ton cœur dévoué et noble. Chère enfant, nous sommes, toi et moi, dans la voie austère et douce du renoncement ; nous nous côtoyons plus que tu ne penses toi-même. Ta sérénité m’arrive comme un reflet de la mienne. Aime, croie, prie ; sois bénie.

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