À Paul Meurice

Dimanche 18 février [1855].

Cher ami, depuis ma dernière lettre que vous avez dû recevoir il y a une dizaine de jours, la mort m’a visité. J’ai perdu un bon vieux cher ami, mon frère Abel. Nous vivions loin l’un de l’autre autant par les idées que par la distance matérielle, tout en nous aimant profondément. Maintenant il est dans la vérité et dans la lumière. Il doit voir que c’est le sacrifice qui a raison, que c’est le progrès qui a raison, que c’est la souffrance qui a raison, et je suis sûr qu’il se tourne vers mon exil comme je me tourne vers son tombeau, avec un œil attendri.

Tous les deuils m’entourent. C’est bien. Dieu sait ce qu’il fait. Hetzel est à Paris. Le savez-vous ? Le connaissez-vous ? Si oui, et si vous avez occasion de le voir (mais il faudrait que ce fut tout de suite) seriez-vous assez bon pour lui demander : 1° s’il a reçu les deux lettres que je lui ai écrites. 2° Si M. Pelvey a fait pour moi le paiement dont je lui ai donné avis, chose urgente, car le 11 février, il y aurait déchéance. — Avez-vous eu la bonté d’affranchir, comme je vous en priais, la lettre à la compagnie d’assurances contenue (la lettre, non la compagnie) dans ma dernière lettre. Tirez-vous de toutes ces lettres-là comme vous pourrez. Je vous envoie à travers ces broussailles, et à votre charmante femme, toutes les tendresses de Marine-Terrace.

Share on Twitter Share on Facebook