À XXX.

Marine-Terrace.

Dimanche 22 avril [1855].

Lisez ceci, cher poëte. C’est la protestation du présent en attendant l’imprécation de l’avenir. Il ne sera pas dit que le misérable triomphe de cet homme en Angleterre aura passé sans que quelqu’un ait parlé au nom de la France bâillonnée et liée de cordes dans la caverne empire. L’Angleterre est à plat ventre. Elle tremble devant ce petit homme, elle claquera des dents devant la révolution ; c’est bon. L’Angleterre était l’obstacle possible de l’avenir ; je suis charmé qu’elle s’évanouisse. Attendons. Demain talonne aujourd’hui.

Écrivez-moi souvent, et sans attendre mes réponses. Vos lettres, si profondément empreintes de toute votre noblesse de cœur et d’esprit, sont des joies pour Marine-Terrace. Envoyez-moi ce que vous faites ; parlez-moi de vos travaux, de votre femme si digne de vous, de vos succès à deux, de votre bonheur à deux ; je vous envoie toutes les effusions cordiales de ma solitude.

J’achève de dorer quelques étoiles au ciel un peu sombre des Contemplations. Cela fait, vous les aurez.

Donnez-moi des nouvelles de Paris, haut et bas, théâtres et journaux, lettres et foule. Nous parlons souvent de vous ici ; et vous êtes une des figures qui font sourire et rayonner le retour. Le temps me manque pour vous écrire vingt pages que j’ai dans le cœur ; je les mets dans un serrement de main. — Ex imo.

V.

Vous devez voir souvent Paul Meurice. — Demandez-lui donc s’il a reçu mon dernier envoi (assez gros paquet).

Vale et ama amantes.

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