À Édouard Plouvier.

Hauteville-House, 28 septembre [1856].

Vous êtes dans la forêt, je suis dans l’océan ; votre aquilon soufflant dans les chênes vaut mon ouragan soufflant dans les vagues ; je m’en aperçois aux grands vers que vous m’envoyez. Cher poëte, ce sonnet superbe est une de vos plus nobles inspirations. Il était digne d’être en quelque sorte écrit sur cette feuille de chêne tombée de l’arbre géant. Je ne vous en remercie pas, je vous en félicite.

Mettez-moi, je vous prie, aux pieds de la généreuse artiste qui est votre femme, et qui a la flamme comme vous avez la lumière. Faites à vous deux le foyer. Vous méritez de mêler vos rayonnements.

Êtes-vous encore dans les bois ? Êtes-vous déjà à Paris ? J’envoie cette lettre un peu au hasard ; mais mon hasard à moi s’appelle Paul Meurice, c’est-à-dire providence, et je suis bien sûr qu’il trouvera moyen de vous faire parvenir ce mot. Oui, certes, vous seriez reçus avec grande joie dans notre petit goum de Guernesey. J’ai acheté sur la roche une masure que j’ai livrée aux maçons, mais qui sera prête l’an prochain et du seuil de laquelle l’exil vous tend les bras.

En attendant, faites-nous de belles et bonnes œuvres, et aimez-moi.

V. H.

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