À Albert Lacroix.

Spa, 9 septembre 1861.

Monsieur,

J’ai l’honneur de vous transmettre l’extrait suivant d’une lettre que je reçois de mon père en réponse à votre proposition et à vos questions :

« L’ouverture de MM. Lacroix, Verboeckhoven et Cie est si franche et si nette que je la classe à un haut rang parmi celles qui m’ont été faites. Voici ma réponse à leurs questions : — L’ouvrage n’est pas politique. La partie politique est purement historique, Waterloo, le règne de Louis-Philippe, l’insurrection de 1832 (convoi du général Lamarque) et le livre, commençant en 1815, finit en 1835. Aucune allusion donc au régime présent. D’ailleurs, c’est un drame ; un drame social ; le drame de notre société et de notre temps. — Il aura huit volumes au moins, neuf peut-être, et sera divisé en trois parties, ayant chacune un titre spécial et destinées à paraître successivement, aux époques qui conviendront aux éditeurs, de mois en mois par exemple. La révision que je fais sera finie dans deux mois au plus tard. Le livre pourrait donc paraître en février, comme Notre-Dame de Paris et, si c’était le 13 février, ce serait trente ans après, jour pour jour. Ce 13 n’a pas porté malheur à Notre-Dame.

Un traité avec Gosselin et Renduel (de 1831) m’oblige à leur laisser publier, moyennant 12 000 fr. (6 000 fr. comptant, 6 000 fr. à six mois ou un an) les 3 150 exemplaires de la première partie qui est en deux volumes. Mes cessionnaires, en prenant possession du manuscrit, devraient exécuter ce traité, les 12 000 fr. seraient à eux. Quant à mon prix tu le connais, c’est 250 000 francs comptant pour huit années d’exploitation, avec la réserve de ne pouvoir réimprimer dans les six derniers mois. Je me réserve le droit de traduction. Si on voulait me l’acheter également, le prix total serait 300 000 francs. Le produit de la traduction partout sera, je crois, considérable. Il est à ta connaissance que 300 livres sterling comptant vont m’être payées en Angleterre pour le seul droit de traduction de deux volumes de la Légende des Siècles. »

Telle est, monsieur, la lettre dont mon père me charge de vous donner connaissance.

Veuillez m’adresser votre réponse. Je la lui ferai parvenir immédiatement. Je me mets entièrement à vos ordres pour vous servir d’intermédiaire.

Agréez, monsieur, l’assurance de ma parfaite et cordiale considération.

Charles Hugo.

Spa. Hôtel du Lion Noir.

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