À Albert Lacroix.

Haute ville-House, 10 9bre 1861.

Monsieur, vous m’indiquez la fin du mois comme l’époque probable de votre arrivée ici. Je tiendrai la première partie du manuscrit prête pour cette époque. Quant aux 125 000 francs du premier paiement, vous pourrez me les remettre soit en un reçu de ladite somme de la Banque d’Angleterre à mon nom, et remboursable sur ma signature, soit en une traite de la même banque de 5 000 livres sterling acceptée par elle et payable à mon ordre on demande.

Vous trouverez sous ce pli deux lettres que je recommande à votre attention. Celle de M. Meurice est l’évidence même. L’autre est relative à la traduction en Espagne. Vous pourriez entrer en relation avec le signataire. Je vous rappelle que le directeur du journal las Novedados à Madrid m’a également fait des offres. Vous pourriez lui écrire. Je crois savoir qu’une ouverture vous sera faite pour la traduction en Angleterre par M. Bentley, le libraire qui a publié la traduction de Notre-Dame de Paris. Le libraire Rutledge prendrait un grand nombre d’une édition bon marché. La traduction Bentley pourrait être faite ici sous mes yeux par M. Talbot, rédacteur du Star ; grand avantage.

Pour la division en quatre parties, dont le désir m’a été exprimé par vous, il y a plus d’une difficulté. Nous en causerons ici. Le rapprochement des époques de publication me paraît également difficile. Il rapprocherait les époques de paiement. Y avez-vous songé ? La troisième partie, vous le savez, ne doit être livrée qu’après le deuxième paiement. Il y aurait lieu, je crois, à une annexe au traité. Je pense que, venant ici, vous auriez pouvoir pour cela. Vous vous rappelez que nous avons oublié d’inscrire dans le traité le règlement des difficultés par arbitres dont nous étions convenus. Il est toujours bon de terminer les petits malentendus qu’on peut avoir en famille et entre soi. L’arbitrage est excellent pour cela.

Quant aux journaux, n’oubliez pas que la liberté de la presse serait la condition sine qua non. En ce cas-là, la proposition de 500 000 francs reviendrait, j’ai lieu de le croire. Dans l’état actuel, il n’y a rien à faire. Songez à de certaines éventualités. Relisez notre lettre privée. Je n’ai pas besoin de m’expliquer davantage.

Je suis, monsieur, vivement sensible à vos excellentes paroles ; vous n’êtes pas seulement un éditeur intelligent et net ; vous êtes un écrivain distingué et un penseur. Vos travaux si remarquables nous font confrères. Aussi est-ce toute ma cordialité que je vous envoie. Recevez-la, avec l’expression de mes sentiments les plus distingués.

Victor Hugo.

Vous trouverez ci-joint le billet que vous désirez pour M. Renduel.

Seriez-vous assez bon pour faire remettre le plus tôt possible à madame Victor Hugo la lettre ci-incluse.

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