À Auguste Vacquerie.

Dim. 3 avril [1864].

Si vous aviez été ici l’autre soir, cher Auguste, vous auriez été content de votre petit public de Guernesey. Je n’ai jamais pu comprendre pourquoi Kesler s’était dérobé à Jean Baudry, mais il répare cela par son enthousiasme pour Profils et Grimaces. Je lui dis : mais c’est le même poëte, le même philosophe, le même créateur, pourquoi excluez-vous ce livre en adorant celui-ci ? Il me répond éperduement Profils et Grimaces, et comme il admire, je le laisse aller. Il est ébloui, et il fait bien. Avant-hier, il a apporté son exemplaire, et nous a lu lui-même l’île romantique que, de cette façon, nous savons par cœur, l’ayant déjà tous lue chacun de notre côté. Il va vous faire deux articles incandescents, comptez-y, c’est son mot, dans Le Courrier de l’Europe et dans la Revue belge. Tout ceci veut dire que notre goum est toujours bien à vous, même Kesler, absolument rallié cette fois et disant : je suis fanatique de ce livre-là. Et alors je reprends : mais pourquoi pas aussi etc., et alors nous recommençons, et la discussion devient une cage d’écureuil. Quoi qu’il en soit, on est vôtre ici. Gageons que cela ne vous étonne pas. Je ne désespère pas de voir Kesler lui-même faire son devoir en revenant à Jean Baudry. Nous l’avons déjà ramené aux Funérailles qu’il admire aujourd’hui très sincèrement. Que voulez-vous ? Quand nous vous avons lu et applaudi, il faut bien que nous parlions de vous. C’est ce que nous faisons. Victor, chamaillant Kesler, est particulièrement amusant. Tragaldabas, les Funérailles, Jean Baudry, les Miettes de l’Histoire, Profils et Grimaces, c’est votre puissant esprit prenant toutes les formes et créant successivement au théâtre et dans le livre. Quant à moi, mon bravo ne choisit pas. Au reste, vous voyez que dans mon livre je me déclare tout net pour l’admiration en bloc. Je lis Homère en ce moment, et je trouve tout beau.

— Une ligne sur mon livre. Vous avez reçu toutes mes lettres et tous mes envois. Je crois possible de renvoyer à l’imprimerie tous les bon à tirer au plus tard le 9 et par conséquent sans gêner l’apparition le 15. Mais ce que vous ferez sera bien fait et ce que vous déciderez sera bien décidé. Je me remets à votre amitié.

Ma prochaine lettre vous portera les 1 res pages et les indications pour les journaux, que vous compléteriez et redresseriez au besoin, voyant et sachant le terrain mieux que moi.

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