à Paul Meurice.

Bruxelles, 20 août. Hier soir, pas de passeports. Enfin aujourd’hui le chargé d’affaires de France est venu en personne me les apporter. Ce retard retarde d’un jour notre arrivée à Paris. Nous en profitons pour vous envoyer en éclaireur M Louis Koch, neveu de Mme Drouet, un vaillant. Ayez toute confiance en lui. Il portera à Victor une lettre de Charles, sur laquelle j’appelle votre attention ainsi que l’attention d’Auguste. Cette lettre vous exprime l’avis unanime des proscrits d’ici. Lisez-la et décidez. Vous voyez les choses plus précisément, et je ferai ce que vous me conseillerez. Je suis prêt. Prêt à tout. Si vous m’écrivez venez (Charles vous écrit la formule télégraphique à employer) je partirai lundi 22 à 9 h du matin et je serai à Paris à 3 h après midi. Je suivrai absolument votre avis. Cher Meurice, je vous aime. V.

Charles entre dans ma chambre et me lit sa lettre à Victor. Elle est excellente. Pourtant vous amoindrirez en la lisant ce qu’elle a de trop absolu dans la forme. Nous devons, et je dois, avant tout, être aux ordres du devoir, quelque forme qu’il prenne. Ainsi je trouve parfait de rentrer comme garde national venant défendre avec mes deux fils la ville sacrée, je ne souhaite pas à la république l’effroyable héritage de l’empire, j’entends l’héritage immédiat. Quant à moi, je n’accepterai jamais la banqueroute que la dette des quatorze milliards mangés par l’empire peut entraîner, ni la dislocation de la France. Plutôt mourir.

au même. 20 août. Ayez toute confiance en mon vaillant ami Louis Koch. Ici graves objections à mon départ. On le croit inopportun. Pourtant, comme simple garde national, je suis évidemment dans mon droit et dans mon devoir. Mais on dit : quoi que vous fassiez, votre présence semblera toujours suspecte d’arrière-pensée . Comprenez ceci, dites votre avis. Je le suivrai. écrivez : amenez les enfants, je partirai dimanche matin. écrivez : n’amenez pas les enfants, j’attendrai. V H.

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