IV

Aujourd’hui, ce n’est pas pour une cage vide,

Pour des oiseaux jetés à l’oiseleur avide,

Pour un dogue aboyant lâché parmi les fleurs,

Que mon courroux s’émeut. Non, les petits malheurs

Exaspèrent l’enfant ; mais, comme en une église,

Dans les grandes douleurs l’homme se tranquillise.

Après l’ardent chagrin, au jour brûlant pareil,

Le repos vient au cœur comme aux yeux le sommeil.

De nos maux, chiffres noirs, la sagesse est la somme.

En l’éprouvant toujours, Dieu semble dire à l’homme :

— Fais passer ton esprit à travers le malheur ;

Comme le grain du crible, il sortira meilleur. —

J’ai vécu, j’ai souffert, je juge et je m’apaise.

Ou si parfois encor la colère mauvaise

Fait pencher dans mon âme avec son doigt vainqueur

La balance où je pèse et le monde et mon cœur ;

Si, n’ouvrant qu’un seul œil, je condamne et je blâme,

Avec quelques mots purs, vous, sainte et noble femme,

Vous ramenez ma voix qui s’irrite et s’aigrit

Au calme sur lequel j’ai posé mon esprit ;

Je sens sous vos rayons mes tempêtes se taire ;

Et vous faites pour l’homme incliné, triste, austère,

Ce que faisait jadis pour l’enfant doux et beau

Ma mère, ce grand cœur qui dort dans le tombeau !

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