IX

Oh ! la croix de ton père est là qui te regarde !

La croix du vieux soldat mort dans la vieille garde !

Laisse-toi conseiller par elle, ange tenté !

Laisse-toi conseiller, guider, sauver peut-être

Par ce lys fraternel penché sur ta fenêtre,

Qui mêle son parfum à ta virginité !

Par toute ombre qui passe en baissant la paupière !

Par les vieux saints rangés sous le portail de pierre !

Par la blanche colombe aux rapides adieux !

Par l’orgue ardent dont l’hymne en longs sanglots se brise !

Laisse-toi conseiller par la pensive église !

Laisse-toi conseiller par le ciel radieux !

Laisse-toi conseiller par l’aiguille ouvrière,

Présente à ton labeur, présente à ta prière,

Qui dit tout bas : Travaille ! — Oh ! crois-la ! — Dieu, vois-tu,

Fit naître du travail, que l’insensé repousse,

Deux filles, la vertu, qui fait la gaîté douce,

Et la gaîté, qui rend charmante la vertu !

Entends ces mille voix, d’amour accentuées,

Qui passent dans le vent, qui tombent des nuées,

Qui montent vaguement des seuils silencieux,

Que la rosée apporte avec ses chastes gouttes,

Que le chant des oiseaux te répète, et qui toutes

Te disent à la fois : Sois pure sous les cieux !

Sois pure sous les cieux ! comme l’onde et l’aurore,

Comme le joyeux nid, comme la tour sonore,

Comme la gerbe blonde, amour du moissonneur,

Comme l’astre incliné, comme la fleur penchante,

Comme tout ce qui rit, comme tout ce qui chante,

Comme tout ce qui dort dans la paix du Seigneur !

Sois calme. Le repos va du cœur au visage ;

La tranquillité fait la majesté du sage.

Sois joyeuse. La foi vit sans l’austérité ;

Un des reflets du ciel, c’est le rire des femmes ;

La joie est la chaleur que jette dans les âmes

Cette clarté d’en haut qu’on nomme Vérité.

La joie est pour l’esprit une riche ceinture.

La joie adoucit tout dans l’immense nature.

Dieu sur les vieilles tours pose le nid charmant

Et la broussaille en fleur qui luit dans l’herbe épaisse ;

Car la ruine même autour de sa tristesse

A besoin de jeunesse et de rayonnement !

Sois bonne. La bonté contient les autres choses.

Le Seigneur indulgent sur qui tu te reposes

Compose de bonté le penseur fraternel.

La bonté, c’est le fond des natures augustes.

D’une seule vertu Dieu fait le cœur des justes,

Comme d’un seul saphir la coupole du ciel.

Ainsi, tu resteras, comme un lys, comme un cygne,

Blanche entre les fronts purs marqués d’un divin signe

Et tu seras de ceux qui, sans peur, sans ennuis,

Des saintes actions amassant la richesse,

Rangent leur barque au port, leur vie à la sagesse,

Et, priant tous les soirs, dorment toutes les nuits !

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