VIII

Charles dix ! – Oh ! le Dieu qui retire et qui donne

Forgea pour cette tête une lourde couronne !

L’empire était penchant, et les temps étaient durs.

Une ombre quand il vint couvrait encor nos murs,

L’ombre de l’empereur, figure colossale.

Peuple, armée, et la France, et l’Europe vassale,

Par cette vaste main depuis quinze ans pétris,

Demandaient un grand règne, et, pour remplir Paris

Ainsi qu’après César Auguste remplit Rome,

Après Napoléon il fallait plus qu’un homme.

Charles ne fut qu’un homme. A ce faîte il eut peur.

Le gouffre attire. Pris d’un vertige trompeur,

Dans l’abîme, fermant les yeux à la lumière,

Il se précipita la tête la première.

Silence à son tombeau ! car tout vient de finir.

A peine il aura teint d’un vague souvenir

Le peuple à l’eau pareil, qui passe, clair ou sombre,

Près de tout sans en prendre autre chose que l’ombre !

Je n’aurai pas pour lui de reproches amers.

Je ne suis pas l’oiseau qui crie au bord des mers

Et qui, voyant tomber la foudre des nuées,

Jette aux marins perdus ses sinistres huées.

Des passions de tous isolé bien souvent,

Je n’ai jamais cherché les baisers que nous vend

Et l’hymne dont nous berce avec sa voix flatteuse

La popularité, cette grande menteuse.

Aussi n’attendez pas que j’achète aujourd’hui

Des louanges pour moi par des affronts pour lui.

Qu’un autre, aux rois déchus donnant un nom sévère,

Fasse un vil pilori de leur fatal calvaire ;

Moi je n’affligerai pas plus, ô Charles dix,

Ton cercueil maintenant que ton exil jadis !

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