LIII

— Je pars ! dit Edward ; me voilà rentré en grâce auprès du terrible oncle, comme tu as pu en juger par l’opulence inusitée que tu as trouvée ici. Te laisserai-je ici, Stephen ? pourquoi ne reviens-tu pas avec moi ? Tu peux encore épouser ta parente, tu seras riche.

— Non, non, encore quatre mois, et je serai assez riche, j’aurai une place de quinze cents florins et je serai le plus heureux des hommes ; ne t’occupe pas de moi ; avec de la persévérance, je me ferai la vie qu’il me faut.

— Je ne veux pas que mon amitié t’importune ; je pars seul ; partageons ce que j’ai d’argent, et, quand je serai là-bas, tu me permettras de t’envoyer une petite indemnité de la ruine que je t’ai causée.

Et Stephen accompagna Edward jusqu’à la voiture qui devait l’emmener. Chemin faisant, Edward ne parlait que des plaisirs qui l’attendaient ; enfin ils s’embrassèrent et la voiture roula.

Pendant quelques jours, Stephen fut en proie à cette tristesse vague que cause le départ d’une personne même indifférente, et à plus forte raison d’un ami avec lequel on a enlacé sa vie par une habitude de tous les jours.

Mais peu à peu le souvenir d’Edward s’effaça, et Stephen se livra avec ardeur à son travail.

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