Encore une scène horrible, Suzanne ; il veut me quitter, m’abandonner avec mon enfant ; il veut prendre la fuite. Je me suis jetée à ses genoux : malgré mes prières et mes pleurs, il est parti ; il m’a dit qu’il reviendrait dans trois heures ; la troisième heure est passée, il ne revient pas.
Depuis hier, j’ai repassé toute ma vie avec amertume, Suzanne ; la voilà perdue, cette fortune à laquelle j’ai sacrifié un amour si pur et si vrai, le bonheur et la vie de ce pauvre Stephen, et peut-être aussi mon bonheur à moi, car je l’aimais, Suzanne, et quel homme jamais mérita plus d’amour ? Tout le monde l’aime et l’honore, et moi seule, moi à laquelle il avait donné toute sa vie, en échange de tant d’amour, je l’ai abreuvé de douleurs, que je comprends mieux à présent que je suis malheureuse.
Je t’écris, ma Suzanne, car il faut que ma douleur s’épanche dans un cœur ami, et je n’ai que toi au monde.