XXX Stephen à Magdeleine

Hier encore, j’avais passé la nuit sous le même toit que Magdeleine : ce matin, je me suis réveillé à dix lieues d’elle ; mes songes avaient prolongé mon bonheur. Mon premier regard a cherché ma petite chambre ; j’étais dans un appartement inconnu ; je me précipitai à la fenêtre pour chercher ma douce impression de l’air matinal ; mais l’aurore ne répandait plus sa sainte rosée sur la sommité des arbres ; elle éclairait les tuiles des maisons entassées, et ses rayons en paraissaient salis ; et ce soleil ne m’annonçait plus un jour de bonheur : mon cœur se serra horriblement en songeant que ce jour-là, et le lendemain, et les jours suivants se passeraient de même.

Je suis seul ; ce n’est plus le même air que toi que je respiré ; mes yeux ne rencontreront plus les tiens ; ma main ne pressera plus la tienne, ta voix ne résonnera plus à mon cœur. Et toi aussi, sans doute, tu es triste et tu pleures. Oh ! quand verrai-je ton regard et ton sourire, et ton front si pur, tes cheveux noirs et ta démarche légère ? Plus heureuse que moi, tu restes aux lieux témoins de notre bonheur ; tout autour de toi te parle de notre amour, tout te rappelle ton amant ; mais moi ! il n’y a rien de toi ici, tout semble conspirer à m’arracher jusqu’à mes souvenirs et au bonheur de ma vie passée.

Écris-moi, Magdeleine, écris-moi ; les détails les plus minutieux sont ceux qui te rapprocheront le plus de moi.

J’hésitais à t’écrire, je suis abattu, je ne me sens ni force, ni énergie ; cependant, il faut marcher à mon but ; soutiens-moi, écris-moi, parle-moi de ton amour, donne-moi du courage.

Adieu, mon bel ange, adieu.

Oh ! si je t’avais vue avant mon départ ! si ton dernier regard m’avait suivi !

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