Quand vous recevrez ma lettre, peut-être votre mère sera sans pain, sans asile, et mendiant : c’est vous qui m’avez conduite là.
Votre père est mort ; en mourant, il vous a maudite ; il disait souvent que c’était tué par vous qu’il mourait.
Le garde général, qui depuis votre escapade est devenu notre ennemi, m’a fait dire que si je ne payais pas le loyer de la maison, il me faudrait la quitter, parce que, mon pauvre Éloi étant mort, je n’y avais plus aucun droit. Où vais-je aller ? que vais-je devenir ? pourquoi le bon Dieu n’a-t-il pas eu pitié de moi, et ne m’a-t-il pas enlevée avec Éloi ?
Nous n’avons pas été dupes de vos beaux semblans de vertu ; ce n’est pas pour bien faire qu’une jeune fille s’enfuit de la maison de ses parens, et renonce à un mariage honorable qui aurait assuré leur bonheur.
Cette lettre, que vous recevrez au milieu de vos plaisirs criminels, vous fera peut-être faire sur vous-même un retour salutaire : c’est la seule raison qui me fait vous écrire. Ne vous attendez pas que je vous bénisse non plus en mourant, moi qui, après vous avoir élevée avec tant de peines et de soins, vais mourir de faim par votre faute.