Tout le jour la maison fut triste comme s’il était arrivé un événement douloureux dans l’humble famille. On se réunit pour prendre les repas, sans presque se parler. On se sépara. On se retrouva sans sourire. On voyait que Graziella n’avait point le cœur à ce qu’elle faisait en s’occupant dans le jardin ou sur le toit. Elle regardait souvent si le soleil baissait, et, de cette journée, il était visible qu’elle n’attendait que le soir.
Quand le soir fut venu et que nous eûmes repris tous nos places ordinaires sur l’astrico, je rouvris le livre et j’achevai la lecture au milieu des sanglots. Père, mère, enfants, mon ami, moi-même, tous participaient à l’émotion générale. Le son morne et grave de ma voix se pliait, à mon insu, à la tristesse des aventures et à la gravité des paroles. Elles semblaient, à la fin du récit, venir de loin et tomber de haut dans l’âme avec l’accent creux d’une poitrine vide où le cœur ne bat plus et qui ne participe plus aux choses de la terre que par la tristesse, la religion et le souvenir.