XII

Graziella appela Beppino. En un instant, son frère et elle emportèrent, dans la chambre des enfants, son lit, ses pauvres meubles, son petit miroir entouré de bois peint, la lampe de cuivre, les deux ou trois images de la Vierge qui pendaient aux murs attachées par des épingles, la table et le petit tour où elle travaillait le corail. Ils puisèrent de l’eau dans le puits, en répandirent avec la paume de la main sur le plancher, balayèrent avec soin la poudre de corail sur la muraille et sur les dalles ; ils placèrent sur l’appui de la fenêtre les deux pots les plus verts et les plus odorants de baume et de réséda qu’ils purent trouver sur l’astrico. Ils n’auraient pas préparé et poli avec plus de soin la chambre des noces si Beppo eût dû amener le soir sa fiancée dans la maison de son père. Je les aidais en riant à ce badinage.

Quand tout fut prêt, j’emmenai Beppino et le pêcheur avec moi pour acheter et rapporter le peu de meubles qui m’étaient nécessaires. J’achetai un petit lit de fer complet, une table de bois blanc, deux chaises de jonc, une petite brasière en cuivre où l’on brûle, les soirs d’hiver pour se chauffer, les noyaux enflammés d’olives ; ma malle, que j’envoyai prendre dans ma cellule, contenait tout le reste. Je ne voulais pas perdre une nuit de cette vie heureuse qui me rendait comme une famille. Le soir même, je couchais dans mon nouveau logement. Je ne me réveillai qu’au cri joyeux des hirondelles, qui entraient dans ma chambre par une vitre cassée de la fenêtre, et à la voix de Graziella, qui chantait dans la chambre à côté en accompagnant son chant du mouvement cadencé de son tour.

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