Mais ce qui affaiblit surtout la monarchie, c’est que ce prince en dissipa les domaines 1 . C’est ici que Nitard, un des plus judicieux historiens que nous ayons ; Nitard, petit-fils de Charlemagne, qui était attaché au parti de Louis le Débonnaire, et qui écrivait l’histoire par ordre de Charles le Chauve, doit être écouté.
Il dit « qu’un certain Adelhard avait eu pendant un temps un tel empire sur l’esprit de l’empereur, que ce prince suivait sa volonté en toutes choses ; qu’à l’instigation de ce favori, il avait donné les biens fiscaux 2 à tous ceux qui en avaient voulu ; et par là avait anéanti la république 3 ». Ainsi, il fit dans tout l’empire ce que j’ai dit 4 qu’il avait fait en Aquitaine : chose que Charlemagne répara, et que personne ne répara plus.
L’État fut mis dans cet épuisement où Charles Martel le trouva lorsqu’il parvint à la mairie ; et l’on était dans ces circonstances, qu’il n’était plus question d’un coup d’autorité pour le rétablir.
Le fisc se trouva si pauvre que, sous Charles le Chauve, on ne maintenait personne dans les honneurs 5 , on n’accordait la sûreté à personne, que pour de l’argent : quand on pouvait détruire les Normands 6 , on les laissait échapper pour de l’argent ; et le premier conseil qu’Hincmar donne à Louis le Bègue, c’est de demander dans une assemblée de quoi soutenir les dépenses de sa maison.
a Tout ce chapitre manque dans A. B.
1 Villas regias, quae erant sui et avi et tritavi, fidelibus suis tradidit eas in possessiones sempiternas : fecit enim hoc diu tempore. Tegan, de Gestis Ludovici Pii. (M.)
2 Hinc libertates, hinc publica in propriis usibus distribuere suasit. Nitard, liv. IV, à la fin. (M.)
3 Rempublicain penitus annullavit. Ibid. (M.)
4 Voyez le liv. XXX, ch. XIII. (M.)
5 Hincmar, lettre 1 à Louis le Bègue. (M.)
6 Voyez le fragment de la Chronique du monastère de S.-Serge d’Angers, dans Duchesne, tome II, p. 401. (M.)