LETTRE LV.

AU MÊME.

Vous m’avez bien envoyé l’extrait de ma lettre ; mais il y a des points qui ne valent rien. Je vous avais mandé que je vous enverrais une partie de mon ouvrage, mais que quand vous l’auriez reçue, vous ne vous amuseriez plus à autre chose ; là-dessus vous êtes parti pour faire toutes vos courses, au lieu d’attendre mon manuscrit. Mon cher ami, quand il y aura une métempsycose, vous renaîtrez pour faire la profession de voyageur ; je vous conseille de commencer à vous faire dérater, mais venons au fait.

Dans trois mois d’ici, vous recevrez quinze ou vingt livres, qui n’ont besoin que d’être relus et recopiés ; c’est à-dire, de cinq parties vous en recevrez trois, qui feront le premier volume ; et après cela je travaillerai au second, que vous recevrez deux ou trois mois après. S’il ne vous reste plus de courses littéraires ou galantes à faire dans le Languedoc, vous ferez bien d’aller reprendre votre poste de confesseur de Madame de Montesquieu, ou celui de pénitent de M. l’évêque d’Agen 1 .

Quoi qu’il en soit, en quelque endroit que vous me marquiez, je vous enverrai à la fin d’avril le premier volume. Si vous croyez avoir besoin d’un passeport de la Cour, je serai votre pis-aller, croyant qu’il vaut mieux que vous employiez pour cela M. le Nain ou M. de Tourny : ce que je ne dis point du tout pour me dispenser de faire la chose, mais parce que les intendants ont plus de crédit qu’un ex-président. Je vous embrasse de tout mon cœur.

De Paris, le 20 février 1747.

1 Joseph-Gaspard Gilbert de Chabannes.

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