LETTRE LXXXV.

A L’ABBÉ VENUTI.

A BORDEAUX.

Je suis bien fâché, mon cher Abbé, que vous partiez pour l’Italie 1 , et encore plus que vous ne soyez pas content de nous. Je vois pourtant, sur ce qui m’est revenu, qu’on n’a pas pensé à manquer à la considération qui vous est due si légitimement. Je souhaite bien que vous ayez satisfaction dans votre voyage d’Italie, et je souhaiterais bien, qu’après ce temps de pèlerinage, vous passassiez dans une plus heureuse transmigration, et telle que votre mérite personnel le demande. Si vous pouvez retirer votre dissertation de chez le président Barbot, qui la garde comme des livres sibyllins, j’en ferai usage ici à votre profit : mais votre lettre ne le fait pas espérer. Faites, je vous prie, mes compliments à notre comtesse et à Mme Duplessis 2 . Si vous faites votre voyage entièrement par terre, vous verrez à Turin le commandeur de Solar, qui y viendra de Rome. Adieu, mon cher abbé : conservez-moi de l’amitié ; et croyez qu’en quelque lieu du monde que je sois, vous aurez un ami fidèle.

De Paris, ce 18 mai 1750.

1 M. l’abbé Venuti, après s’être retiré de l’abbaye de Clérac, avait fixé son séjour à Bordeaux, attaché à l’académie des sciences et belles-lettres de cette ville ; mais l’Empereur l’ayant nommé prévôt de Livourne, il fut obligé d’en partir et son départ fut regardé comme une grande perte pour l’académie. Pendant son séjour à Livourne, il a continué d’enrichir la république des lettres de différentes bonnes dissertations. Le mauvais état de sa santé vient de l’obliger de renoncer à sa place pour se retirer à Cortone dans sa famille. (GUASCO, 1707.)

2 Dame de Bordeaux qui aimait les lettres, et surtout l’histoire naturelle, dont elle rassemblait [ressemblait] une collection. (G.)

Share on Twitter Share on Facebook