L’épitaphe d’un affranchi.
Vous allez rire, puis vous indigner, puis rire encore, si vous lisez ce que, sans l’avoir lu, vous ne pourriez croire. Il y a sur la route de Tibur à moins d’un mille (je l’ai remarqué dernièrement) le tombeau de Pallas avec cette inscription : « Ci-gît un homme à qui le sénat a décerné pour sa fidélité et son attachement à ses maîtres les insignes des préteurs, plus quinze millions de sesterces, et qui n’a accepté que la distinction honorifique. » Pour ma part je ne me suis jamais émerveillé de ces honneurs que procure souvent la fortune plutôt que le mérite ; plus que jamais pourtant cette épitaphe m’a rappelé combien il y a d’hypocrisie et de sottise dans ces distinctions que l’on ravale parfois jusqu’à cette boue, jusqu’à cette ordure, enfin dans celles que ce scélérat a osé accepter, a osé refuser, a osé même proposer à la postérité comme un exemple de sa modération. Mais à quoi bon s’indigner ? Il vaut mieux rire, pour que les favoris de la fortune ne se croient pas montés bien haut, quand elle n’a fait que les exposer à la risée publique. Adieu.