III

CHLOÉ. – Je suis la plus heureuse des femmes. Et toi ?

DAPHNIS. – N’insultons pas au malheur des autres.

CHLOÉ. – Tu te plains sans cesse.

DAPHNIS. – Je me plains comme j’entends. C’est chez moi un sens et je m’applique à découvrir sous sa couche de sable fin la grasse terre rouge du terre à terre.

CHLOÉ. – Va ! pérore en mauvais style à quatre épingles ! La vérité, c’est que ma robe ne coûte que dix-neuf francs, et je l’ai réussie moi-même, seule ! Es-tu content ?

DAPHNIS. – Vingt sous de plus, elle t’allait presque.

CHLOÉ. – Faites donc des frais !

DAPHNIS. – Contre remboursement.

CHLOÉ. – Quel plaisir éprouves-tu à me dire des choses dures ?

DAPHNIS. – Il ne faut pas croire que cela m’amuse toujours.

CHLOÉ. – Tu ne les penses pas, au moins ?

DAPHNIS. – Non ; ce sont elles qui me passent par la tête !

CHLOÉ. – Ta littérature te fait mal.

DAPHNIS. – Oui, oui : culte de l’art ! religion du beau ! c’est ça ! Il n’y a pas de Christ sans épines.

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