XVI Nuit blanche

Il y avait encore dix ou douze personnes dans la rue, devant la propriété de Mme Clavière ; elles s’écartèrent pour permettre à la voiture de s’avancer contre le trottoir.

Pinguet, fort surpris de ce rassemblement, sauta à bas de son siège et ouvrit la portière du coupé ; la jeune femme, également étonnée, mit pied à terre. Les femmes la saluèrent en inclinant la tête, les hommes se découvrirent. Elle vit, en répondant à ces saluts, que ces gens étaient tristes et avaient l’air embarrassés. Elle allait sonner à la petite porte lorsqu’elle reconnut, en avant du groupe, la femme d’un ouvrier carrier qu’elle avait secourue pendant une assez longue maladie de son mari. Elle s’approcha de la femme.

– Que se passe-t-il donc ? lui demanda-t-elle ; pourquoi tout ce monde est-il ici ?

– Nous parlions du grand malheur…

– Un grand malheur, dites-vous ?

– Hélas !

– Quel est donc ce malheur ?

– Votre petit garçon… commença la femme.

Mme Clavière pâlit et ses traits se décomposèrent. Elle saisit violement le bras de son interlocutrice, et d’une voix vibrante, les yeux démesurément ouverts :

– Mon Dieu, exclama-t-elle, qu’est-il arrivé à mon enfant ?

La femme voulut répondre, sa voix s’étouffa dans un sanglot.

Alors un homme, sa casquette à la main, s’avança et dit :

– Des malfaiteurs sont entrés dans votre jardin et ont volé votre petit.

La pauvre mère poussa un cri rauque et chancela comme si elle avait reçu un coup de marteau sur la tête.

Pinguet n’eut que le temps de se précipiter pour la recevoir dans ses bras.

Mais presque aussitôt elle se redressa forte, énergique, le regard flamboyant.

La porte venait de s’ouvrir. Mme Durand pâle, tout en larmes, se soutenant à peine, était sur le seuil.

Mme Clavière se tourna vers les paysans, agita sa main en signe d’adieu et marcha vers sa maison d’un pas rapide, suivie de sa vieille servante. Dans le salon, Louise tomba à ses genoux en sanglotant.

– On m’a pris mon enfant, dit-elle d’une voix sourde ; Louise, est-ce que vous êtes coupable ?

– Oh ! non, madame, je vous le jure !

– Alors vous n’avez pas à être à mes genoux, relevez-vous et dites-moi comment des misérables ont pu, sous vos yeux, s’emparer de mon enfant.

Louise se releva et debout devant sa maîtresse, droite, raide, immobile, les bras ballants, elle raconta ce qui s’était passé.

La jeune femme écouta sans faire un mouvement, sans prononcer une parole. Ses yeux restaient secs, brillants ; seul, un imperceptible frémissement des lèvres trahissait les déchirantes angoisses de son âme.

Mme Durand la contemplait avec une sorte de stupeur, étonnée de son calme apparent.

La mère devina la pensée de sa fidèle domestique.

– Ah ! oui, dit-elle de sa voix rauque et avec un accent que la plume ne saurait rendre, vous êtes surprise de ne pas entendre mes sanglots, de ne pas me voir abîmée dans une crise de désespoir. Eh bien, je ne peux pas pleurer !… Des cris, des larmes, des gémissements, à quoi cela servirait-il ? Mais ma douleur n’en est pas moins horrible, mon désespoir n’en est pas moins grand.

Son regard prit soudain une expression terrible, et d’une voix stridente elle s’écria :

– Demandez donc à la lionne ce qui se passe dans ses entrailles de mère quand, rentrant dans sa tanière, elle ne retrouvé plus ses lionceaux qu’on lui a pris… Tout d’abord elle rugit, puis les poils hérissés, elle s’élance, elle bondit à la poursuite des ravisseurs. Malheur à eux si elle les rejoint : elle les déchire, les broie, les met en pièces.

À cet instant je ressemble à la lionne du désert ; c’est la même fureur, la même rage qui grondent en moi. Ah ! je les retrouverai les misérables, les bandits qui m’ont pris mon enfant ; alors j’aurai les dents terribles de la lionne et ses griffes sanguinaires ; je serai sans pitié, j’aurai la férocité de la bête de l’Atlas !

Sa poitrine était haletante ; mais le front haut, elle paraissait avoir grandi et était superbe de force et d’énergie.

À ce moment on frappa légèrement à la porte du salon.

Sur un signe de sa maîtresse, Mme Durand ouvrit. C’était Pinguet.

– Madame, dit-il, avant de m’en retourner, j’ai pensé que vous pouviez avoir des ordres à me donner et je viens…

La jeune femme passa à plusieurs reprises ses mains sur son front mouillé d’une sueur froide.

– Ah ! oui, ah ! oui, fit-elle. Je vous avais oublié, mon pauvre Pinguet, et vous pensiez à moi, vous. Savez-vous comment a eu lieu l’enlèvement de mon enfant ?

– Un homme du pays vient de me tout raconter. Il paraît que les scélérats ont endormi l’enfant au moyen d’un narcotique, puisque dans la voiture il dormait sur les genoux d’une femme.

– Oui, ils l’ont endormi, il le fallait pour l’empêcher de crier, d’appeler à son secours. Pinguet, mon ami, vous avez bien fait de ne pas partir sans m’avoir vue. Dès ce soir, si vous le pouvez, vous irez trouver M. le docteur Chevriot d’abord, et ensuite M. Mabillon et vous leur ferez connaître le malheur dont je suis frappée. Ils sauront mieux que moi ce qu’il y a à faire pour retrouver mon enfant, et ils agiront.

– Ce soir même ; vos ordres seront exécutés, répondit Pinguet.

Et il se retira.

– Si madame veut se mettre à table, dit Mme Durand, je vais lui servir son dîner.

Mme Clavière regarda fixement la cuisinière et haussa les épaules.

– Ah ! fit-elle, d’un ton amer, vous me proposez de manger !… Vous me connaissez bien, pourtant. Est-ce que j’ai faim ? Est-ce que je pourrais seulement ouvrir la bouche pour avaler une cuillerée de potage, dites ? Oh ! manger, manger !… Vous n’avez plus rien à me dire maintenant, laissez-moi, je veux être seule.

Les deux femmes sortirent, baissant la tête.

La pauvre mère monta dans sa chambre et tomba lourdement sur un fauteuil. Elle avait la poitrine gonflée, la gorge serrée, elle étouffait. Tout à coup une réaction se fit ; des sanglots trop longtemps contenus s’échappèrent et les larmes jaillirent. Ce fut un soulagement.

Cette crise de larmes passée, tenant entre ses mains sa tête brûlante, elle parvint à mettre de l’ordre dans ses pensées et put enfin réfléchir.

Pourquoi lui avait-on pris son enfant ? Évidemment cet enlèvement, ce crime avait été prémédité et depuis longtemps, peut-être. Donc, les misérables avaient un but. Lequel ? Elle cherchait et ne trouvait pas. Cette femme et ses complices avaient-ils été payés pour enlever l’enfant ? C’était supposable ; mais par qui ? Elle cherchait encore et ne trouvait pas.

Elle se demanda si l’on était capable de faire du mal à son cher petit ; mais elle repoussa vite cette horrible pensée. Est-ce qu’il est possible que des hommes, même parmi les plus méchants, puissent faire du mal à un enfant, à un innocent ? Non, non, se disait-elle, – et elle se sentait ainsi rassurée, – on ne prend pas un enfant à sa mère pour le tuer ou pour le torturer. Elle pensait, au contraire, qu’on le traiterait avec douceur. C’était d’après son cœur qu’elle jugeait du cœur des autres.

Parmi les ravisseurs il y avait une femme, cette femme sur les genoux de laquelle on avait vu l’enfant endormi, eh bien, elle en était contente. Une femme, quelle qu’elle soit, a toujours du bon en elle, celle-là aurait soin de son enfant, le protégerait et, au besoin, le défendrait.

Elle était, d’ailleurs, fermement convaincue qu’on ne tarderait pas à lui ramener son cher petit ou qu’elle le retrouverait, dût-elle mettre sur pied tous les agents de la police et dépenser en recherches un, deux et trois millions.

Mais – elle en revenait toujours là, – pourquoi lui avait-on pris son enfant ?

Une idée étrange, folle, traversa son cerveau.

Son ancien amant, le comte de Rosamont, avait découvert que cet enfant, qui portait le nom d’André Clavière, était son fils, à lui ; il avait voulu avoir son enfant, et sachant bien que la mère ne le lui donnerait pas, il l’avait fait enlever.

Elle s’était dressée debout éperdue, les yeux hagards. Et prenant cette vision imaginaire pour la réalité :

– Oh ! s’écria-t-elle, farouche, il me le rendra, il faudra bien qu’il me le rende !

Mais presque aussitôt, secouant la tête :

– Je suis folle ! murmura-t-elle.

Elle retomba sur son siège et au bout d’un instant elle reprit :

– Le comte de Rosamont m’a depuis longtemps oubliée et, d’ailleurs, personne n’aurait pu lui dire que j’ai un enfant dont il est le père, puisque mes amis eux-mêmes ne savent pas que, sous le nom de Lucien Gervois, c’était le comte Maxime de Rosamont qui était mon amant. Et puis, quand bien même il saurait que mon enfant est son fils, qu’est-ce que cela pourrait lui faire ? Il est marié et a sans doute d’autres enfants, légitimes ceux-là.

Ah ! la douleur m’égare, trouble ma raison.

Oh ! non, Dieu ne voudrait pas que je devinsse folle !

Elle eut comme un frisson, se secoua violemment et de nouveau s’écria :

Mais qui donc, qui donc m’a volé mon enfant ?

Une autre idée lui vint. Et cette fois elle touchait juste.

Si c’était une vengeance !

Une vengeance ! Et qui donc avait à se venger d’elle ?

Elle tressauta et poussa un cri terrible.

Sa physionomie exprimait une indicible épouvante.

Joseph Gallot, son oncle, venait de se représenter à ses yeux, tel qu’elle l’avait vu, après le coup de ciseaux dans l’œil, se roulant, se tordant dans les horribles convulsions de la douleur.

Elle avait bondi sur ses jambes et tournait autour de la chambre, se heurtant aux meubles, comme le fauve captif dans sa cage de fer.

Elle se rappelait que l’ancien serrurier avait cherché à savoir où elle demeurait lors d’une visite qu’il avait faite à ce sujet à Charlotte Pinguet.

Elle n’avait pas oublié non plus ces paroles de Charlotte :

« Ton oncle est ton pire ennemi, tu dois constamment te défier de lui. »

L’auteur de l’enlèvement, c’était ce misérable, ce ne pouvait être que lui.

Oui, c’était bien une basse et lâche vengeance de cet homme.

Elle s’arrêta brusquement, et d’une voix étranglée :

– L’infâme, le monstre, il est capable de martyriser mon enfant, exclama-t-elle.

Maintenant elle n’essayait plus de se rassurer, d’horribles craintes l’assiégeaient.

– Et pourtant, se dit-elle au bout un instant, si je me trompais !

Pouvait-elle porter plainte contre l’ancien serrurier, l’accuser, sans être bien sûre, sans avoir de preuves, tant qu’il lui resterait un doute, si faible qu’il fût ?

Elle connaissait l’ignoble gredin et se sentait glacée jusqu’aux moelles à cette pensée que se sachant découvert, se voyant menacé, le scélérat pourrait compléter sa vengeance par l’assassinat de l’enfant !

Aussi froidement qu’elle le pouvait, en ce moment de trouble et de fièvre, elle examina la situation et résolut, jusqu’à nouvel ordre, de parler de ses doutes à personne. Mais elle chargerait Pinguet de découvrir l’adresse de l’ancien serrurier, ce qui lui serait facile, croyait-elle ; et alors, accompagnée seulement de Charlotte, elle irait le sommer de lui rendre son enfant.

Certainement, le misérable avait toujours ses passions, ses vices, ses habitudes de paresse et d’ivrognerie, comme autrefois ; plus encore qu’autrefois, il devait courir constamment après la pièce de vingt francs ; eh bien, elle jetterait dans ses mains trente mille francs, cinquante mille francs, cent mille francs pour qu’il lui rende l’enfant.

Elle n’avait pas à se demander s’il accepterait, elle était si sûre qu’il ne refuserait pas !

Sa résolution arrêtée, il se fit en elle un peu d’apaisement.

– Cela n’empêchera pas mes amis d’agir, se disait-elle, et la police de faire toutes les recherches nécessaires.

Elle s’agenouilla devant le petit lit de l’enfant et, en priant, se remit à pleurer.

Toujours la tête pleine des mêmes pensées, qui lui revenaient sans cesse, comme dans le sommeil agité du cauchemar ; et toujours, les mêmes angoisses dans l’âme, elle entendait sonner les heures et les demies.

Longtemps après minuit elle était encore debout.

Mme Durand et Louise, sans oser ouvrir sa porte, lui avaient demandé si elle avait besoin de l’une d’elles.

– Non, avait-elle répondu d’un ton bref, allez vous reposer.

Quand deux heures sonnèrent, elle était brisée, anéantie.

D’une main fiévreuse, machinalement, elle enleva la garniture de son lit sur lequel elle allait se jeter tout habillée.

Mais avant, sentant sa poitrine serrée, elle dégrafa le corsage de sa robe.

Le papier que lui avait remis Marceline Lebel tomba sur le tapis ; elle le ramassa et le regarda pendant un instant comme hébétée.

Elle avait oublié. Enfin elle se rappela.

– Ah ! oui, fit-elle, pauvre mère !

Et elle ajouta :

– Pauvre mère, moi aussi !

Elle ouvrit un meuble à secret où se trouvait un coffret d’ébène, dans lequel elle serrait ses objets les plus précieux ; elle y glissa le pli cacheté.

Mme Clavière s’était étendue sur son lit, mais pas pour dormir.

Elle passa une nuit blanche.

Cependant, vers huit heures du matin, vaincue par la fatigue du corps et plus encore par celle du cerveau, elle s’assoupit.

Pour quelques instants, c’était le calme apporté par l’oubli.

*

* *

Il n’était guère plus de dix heures lorsqu’un léger bruit la réveilla.

C’était Mme Durand, qui, pour la troisième fois, venait entr’ouvrir la porte de sa chambre.

– Je ne dors plus, dit-elle, vous pouvez entrer.

Mme Durand s’approcha du lit et d’une voix presque grondeuse :

– Vous vous êtes couchée ainsi, dit-elle, sans vous déshabiller, sans même ôter votre corset, vous voulez donc vous rendre malade ?

– Non, ma bonne amie, car j’ai besoin de ma santé.

– Vous avez passé une mauvaise nuit.

– Hélas ! elle ne pouvait être que mauvaise.

– Comme pour Louise et pour moi.

– Cependant j’ai dormi un peu.

Elle regarda la pendule et ajouta :

– Environ deux heures.

– Je suis déjà venue, et vous voyant reposer, je me suis bien gardée de vous réveiller.

– Chère et bonne madame Durand !

– Mme Pinguet est ici depuis une heure.

– Ah ! elle s’est levée de bonne heure pour accourir. Je la recevrai dans ma chambre, dites-lui de monter.

La domestique se retira.

La jeune mère glissa à bas de son lit et, très vite, enleva sa robe qu’elle remplaça par un peignoir également de couleur noire.

Charlotte parut et s’élança en pleurant au cou de son amie.

– Tous ceux qui m’aiment prennent part à mon malheur, dit Marie.

Et d’un geste désolé elle montra à son amie le lit vide de l’enfant.

– C’est épouvantable ! s’écria Charlotte.

– Ce coup terrible pouvait me tuer, et cependant j’ai eu la force de le supporter. Je me suis dit qu’il était impossible qu’on fit du mal à mon enfant, je me suis dit qu’on le retrouverait, qu’il me serait rendu. Charlotte, le crois-tu ?

– Oui, oui, je le crois.

– Cette pensée m’a tout de suite soulagée. J’espère, Charlotte j’espère ! Ton mari a-t-il vu M. Chevriot et M. Mabillon ?

– Avant même de rentrer chez nous il est allé trouver le bon docteur.

Je n’ai pas à te dire ce que ton vieil ami a éprouvé, tu le devines.

À cette heure il a vu déjà le préfet de police et a dû avoir une conférence avec le chef de la sûreté. Peut-être les recherches sont-elles déjà commencées.

Mme Clavière soupira.

– Dans la soirée, continua Charlotte, Charles s’est rendu chez M. Mabillon ; mais il ne l’a pas trouvé.

– Ah !

– Le notaire a dû s’absenter de Paris pour quelques jours.

– En effet, je me souviens qu’il m’a parlé d’un petit voyage qu’il devait faire.

– Marie, n’as-tu pas pensé que ton oncle pouvait être l’auteur de cet enlèvement ?

– Est-ce que tu le soupçonnes, Charlotte ?

– Oui, car lui seul est capable d’une pareille scélératesse.

Mme Clavière saisit le bras de son amie.

– Eh bien, dit-elle sourdement, j’ai les mêmes soupçons que toi.

– Marie, si mon mari était rentré chez nous avant de voir M. Chevriot, je lui aurais appris pourquoi, autrefois, tu as dû te séparer de ton oncle, car j’ai gardé ton secret, Marie, et Charles n’a jamais su un mot de ce qui s’est passé. Sachant ce que vaut l’homme, lui aussi l’aurait tout de suite soupçonné ; il l’aurait signalé à M. Chevriot et, ce matin, le bon docteur se serait empressé de le dénoncer à la police. Mais c’est bon, il n’y a que du temps de perdu : ce qui n’a pas été fait ce matin le sera ce soir.

– Non, Charlotte, non, nous ne dénoncerons pas ce misérable.

– Mais c’est lui, Marie, j’en suis sûre, j’en mettrais ma main au feu.

– Après mûres réflexions, j’ai pris une autre résolution.

Alors Mme Clavière expliqua à son amie les raisons pour lesquelles quant à présent du moins et jusqu’à nouvel ordre, elle ne voulait pas porter plainte contre Joseph Gallot.

– Tu as peut-être raison et je comprends tes craintes, répondit Charlotte.

– Je le connais, le misérable, il serait capable de tuer mon enfant. Écoute encore, voici ce que je veux faire :

Dès ce soir, sans que tu lui aies dit pourquoi tu le fais agir, ton mari se mettra en quête de découvrir la demeure de Joseph Gallot ; s’il le juge nécessaire, il s’adjoindra quatre ou cinq camarades qu’il récompensera largement ; l’argent ne lui manquera pas, je te donnerai tout à l’heure mille ou deux mille francs.

On s’informera dans le quartier des Halles et le quartier Bonne-Nouvelle parmi les ouvriers serruriers anciens camarades d’atelier de Gallot.

Il est impossible que quelques-uns ne connaissent pas son adresse.

Enfin, dès que nous l’aurons, cette adresse, nous irons toutes deux trouver le misérable et nous lui demanderons de nous rendre mon fils, moyennant rançon. Oh ! l’argent n’est rien, rien !… J’aurai pris à la Banque de France cent mille francs.

– Quoi, tu donnerais à ce bandit une pareille somme ?

– Oui, et plus encore s’il le fallait. Est-ce que mon enfant ne vaut pas mieux que tous les trésors du monde ?

– C’est vrai, dit Charlotte.

– Donc, voilà qui est bien entendu. Nous ne dirons rien, et ce n’est que si j’y suis forcée que je dénoncerai Gallot. Oh ! vois-tu, ce que je tiens le plus à cacher, c’est ma parenté avec ce misérable !

– Tu sais, ma chère Marie, que tu n’as aucune indiscrétion à redouter de ma part.

– Tu es la meilleure et la plus sûre des amies.

– Je n’ai plus rien à te dire, et comme je te vois un peu tranquille, je vais immédiatement retourner à Paris.

Aujourd’hui pour toi, pour nous, les minutes valent des heures.

– C’est vrai ; mais tu vas d’abord déjeuner ; avec toi, j’essayerai de manger un peu ; j’ai besoin de me soutenir, de conserver mes forces je n’ai pas le droit d’être malade.

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