XIII

Sans perdre une minute, Desmaisons s’installa, comme il l’avait souhaité, au quai de l’Horloge. Assuré désormais de la survie de celle qu’il aimait, il rassembla pieusement dans le bureau contenant la précieuse parcelle tout ce qui tenait au souvenir de Cécile : meubles, objets, et jusqu’à Cerbère qui trouva une niche dans l’ancienne cuisine. Puis, retranché du reste du monde, montant auprès du cadre une garde vigilante, il attendit avec confiance un nouveau signe de la chère présence. Chaque soir, il s’enfermait dans le bureau où ses gestes étaient réglés selon un rite minutieux. Il commençait par changer l’eau des vases où trempaient des fleurs, choisies parmi celles que la morte préférait, et toujours maintenues en état de fraîcheur. Puis il disposait autour de lui les divers objets ayant appartenu à Cécile : un peignoir, des mules qui se fussent ainsi trouvés tout prêts au cas d’une visite du fantôme. Le divan sur lequel elle aimait à s’étendre était là aussi, et jamais il n’en faisait usage, le réservant à elle seule pour la suprême entrevue. Le livre qu’elle n’avait pas terminé attendait à portée de la main sur la console auprès du fume-cigarette… Mais en nulle occasion ses soins ne se faisaient plus attentifs, plus minutieux que lors du renouvellement du sérum où baignait la parcelle. Il retrouvait alors toute sa précision de gestes et de pensée. Il lui semblait chaque fois qu’il y allait encore de la vie même de Cécile. Jamais chirurgien maniant un cœur sur la table d’opération, ne fut plus précautionneux que lui quand il ouvrait le robinet de purge du cadre ou dosait la nouvelle composition du liquide nourricier. N’était-il pas déjà trop lourd de porter la responsabilité de l’avoir tuée une première fois ? Si, par sa faute, le lien si frêle, si ténu qui l’unissait à Cécile, fût venu à se rompre, il eût lui-même exigé d’être précipité aux enfers.

Et tous ces soins accomplis avec dévotion, toutes les précautions prises et redoublées, il se tenait debout, longuement, devant le cadre, ne quittant pas des yeux le disque noir immobile d’où dépendait sa vie, perdu dans ses pensées et les plus folles prières qui fussent jamais venues sur des lèvres humaines.

D’elle, il pressentait qu’il avait encore tout à apprendre. D’elle, il attendait l’indice de son pardon, et peut-être la révélation des sentiers mystérieux de l’au-delà… Mais, jour après jour, il attendait en vain : la parcelle avait rejoint le cimetière Montparnasse d’où elle ne bougeait plus.

Pourquoi le fantôme refusait-il de se laisser tenter par la chaude atmosphère et les pieux souvenirs qui l’attendaient ici ? Cerbère, seul et perdu, avait eu, le dernier, les honneurs d’un déplacement posthume. Depuis qu’il était à l’abri, le chien semblait aussi dédaigné que le reste du monde. Est-ce ma présence, se demandait Desmaisons, qui rend toute nouvelle visite impossible ? Ne peut-elle se résoudre à oublier, à pardonner ? Le signe de pardon, s’il devait jamais l’obtenir, quel pourrait-il être, sinon un dernier déplacement de la parcelle, une indication qu’un refuge était demandé et accepté en ces lieux où, plus chaudement qu’ailleurs, était entretenue la flamme du souvenir ? Mais les jours passaient et le fantôme continuait à préférer les nuits froides du cimetière. Devait-il rester en compagnie des autres morts ? Était-il contraint d’obéir à des lois inconnues qui commandent la vie d’outre-tombe ? Qui sait quels devoirs obscurs s’imposent aux âmes des morts, quels décrets sévères président à la survie ?

Désireux de savoir quelle pouvait être cette vie que menait sa Cécile, Desmaisons se plongea dans les plus étranges lectures. Depuis les histoires de revenants jusqu’aux volumes de théosophie, de psychisme, d’occultisme, il lisait tout. L’aliment était nouveau pour sa cervelle, il se perdait entre toutes les hypothèses forgées par l’imagination humaine. Il pensa qu’après avoir mis en ordre, au cours d’ultimes démarches, les choses auxquelles elle avait été mêlée en ce monde, la chère âme faisait son purgatoire à l’emplacement de sa tombe. Mais pourrait-elle quitter ce purgatoire sans avoir pardonné, sans avoir cédé aux prières qu’il lui adressait chaque jour ?

Tant de pieuse ferveur eut enfin sa récompense : une nuit, la parcelle se mit en marche. L’heure était-elle venue du pardon ? Il n’eut pas à l’espérer longtemps. Le point noir prit son chemin vers le sud de Paris, à l’opposé du quai de l’Horloge, et s’immobilisa bientôt au 54 de la rue des Plantes.

L’énigme posée lors des déplacements antérieurs de la parcelle était ici à demi résolue. Au 54 de la rue des Plantes, – il le savait pour avoir effectué bien souvent les relevés de la parcelle Y – demeurait Jacqueline Blandin. Que fallait-il penser de cette promenade nocturne venant après un si long temps de repos ? Jacqueline s’était-elle remise à songer à son ancienne gouvernante, et, comme le voulait la théorie du patron, la parcelle dénonçait-elle simplement l’activité du souvenir ?… Quand une heure se fut écoulée sans que le point noir eût manifesté l’intention de quitter la rue des Plantes, il n’y tint plus. Elle m’appelle là-bas, songea-t-il, comme les autres fois, c’est un ordre. Laissant alors à Cerbère la garde du sanctuaire, il se mit en devoir de rejoindre le fantôme.

Le souvenir de ses premières courses parmi les rues désertes de la ville endormie restait inoubliable. Mais cette fois, loin de courir, c’est sans hâte et gravement, qu’il prit le chemin de la rue des Plantes. Pour contourner l’îlot, bruyant encore, de Montparnasse, il s’engagea dans l’avenue du Maine. Il allait d’un pas régulier, méthodique, évitant la lumière déversée par les hauts lampadaires, glissant dans la grisaille des murs le long des Défense d’afficher, comme il sied à une ombre, l’ombre qu’il était à moitié devenue, et que les incidents monde extérieur ne pouvaient plus retenir.

Au 54 s’ouvrait une porte monumentale donnant sur un immense couloir qui menait vers des cours intérieures. Là prenaient terre des cages d’ascenseurs grimpant vers des ateliers aux larges baies, répartis sur toute la hauteur de l’immeuble. Il savait vaguement que Jacqueline faisait de la peinture. Qu’elle habitât cette caserne de peintres ne fut pas pour le surprendre. Des appels, des chants de phonographe ou de T.S.F. tombaient des étages supérieurs. Nombreuses étaient les allées et venues dans le dédale de cette bizarre ménagerie. Il se renseigna.

— Jacqueline Blandin ? Escalier D, au quatrième, là où ça gueule le plus, lui fut-il réponds.

Cette compagnie pouvait sembler étrange pour un fantôme, mais le renseignement était bon. Il n’eut pas à sonner, la porte était largement ouverte, montrant le grand atelier envahi par une foule dont le trop-plein débordait dans le couloir.

— Est-ce ici qu’habite… commença-t-il.

— C’est ici, mon vieux, entre et ne t’en fais pas, lui répondit un blanc bec en bras de chemise qui s’empara de son chapeau pour le jeter dans un réduit déjà plein de manteaux. Tu ne voudrais pas que le vestiaire tienne de la place quand nous en avons déjà si peu, fut-il ajouté en guise d’explication.

Il était dans un état d’esprit inaccessible à l’étonnement, et bien au-delà de ces contingences. Sans protester, il s’inséra dans le magma de couples qui dansaient tant bien que mal dans une atmosphère enfumée et étouffante. Louvoyant, s’excusant, carambolé, pressuré, il put gagner un balcon formant terrasse, au long duquel étaient alignées, en marge de la cohue, des personnes un peu plus calmes. Manifestement, il tombait mal : Jacqueline Blandin recevait, et il n’allait guère être commode de lui expliquer en cet instant le motif de sa visite. Mais il fallait à tout prix savoir pourquoi, ce soir précisément, Cécile avait tenu à venir en ces lieux.

Des facétieux éteignirent l’électricité. Après le « Ah ! » de circonstance poussé par le chœur, des briquets s’allumèrent. La voisine de Desmaisons se tourna vers lui pour demander une cigarette. Il s’excusa de n’en point avoir, mais, quand la lumière fut rallumée, pria en retour cette dame de lui indiquer la maîtresse de maison.

— Jacqueline ? fit l’autre en clignant des yeux vers la foule, attendez, je ne la vois pas…

— Elle est remontée tout à l’heure dans la loggia, fit un autre homme de la ligne, en se penchant.

Un domestique passa avec un plateau. Desmaisons prit un verre, le but : c’était un mélange de gin et de citron qui eut tôt fait de le confirmer dans son attitude de détachement supérieur.

Que souhaitait Cécile en venant dans un endroit pareil ? Se distraire, s’amuser ? Devait-il y voir un avertissement posthume d’avoir à profiter de la vie ?…

Tous ces gens lui paraissaient affreux et tristes. Son voisin s’étant lancé dans des explications sur la décoration des salles de cinéma, il manœuvra pour s’échapper, gagna une pièce plus petite où il put trouver place sur un coin de divan. De là, il découvrait une partie de l’atelier. Un petit homme chauve était assez entouré. Il demanda qui c’était.

— Mais, c’est Poulouche ! lui répondit-on. Comment ? Vous ne connaissez pas Poulouche ?

Il fit :

— Ah !

Une étrangère le poussa un peu pour prendre place à son côté.

— Je n’en peux plus, dit-elle, pas un endroit pour s’asseoir. Du reste, chez Jacqueline, c’est toujours comme ça.

— Où est-elle donc ? en profita-t-il pour demander.

— Je ne sais pas, elle était là tout à l’heure… Vous avez un type curieux, continua-t-elle en dévisageant Desmaisons, une tête de prophète à lunettes, vos yeux n’ont pas l’air de voir… Vous devriez venir à mon atelier, j’aimerais vous photographier…

Elle s’interrompit pour crier à un jeune homme en blouson de sport qui passait en dansant :

— Bouchon apporte-moi une orangeade !

Bouchon, au cou duquel était pendue une petite femme noiraude dont le derrière se trémoussait assez drôlement, eut un geste assez précis pour dire qu’il avait mieux à faire.

— J’y vais, fit alors Desmaisons heureux de trouver un prétexte pour s’échapper.

Dans l’atelier, des voix réclamaient maintenant Jacqueline sur l’air des lampions. À la galerie de l’étage supérieur un homme se pencha :

— Elle va venir, patientez un peu, cria-t-il avant de descendre dans l’atelier.

— Taisez-vous, Enrico va nous jouer quelque chose, annonça une autre voix.

Des exclamations s’élevèrent. Desmaisons s’approcha de l’escalier, et, enjambant tant bien que mal les couples assis sur les premières marches, atteignit l’étage supérieur où il avait compris que se trouvait Jacqueline. Mais arrivé dans le couloir de la loggia, il craignit d’être indiscret. Était-il dans les appartements privés ou dans un endroit réservé à des invités plus intimes ? Plusieurs portes donnaient dans le couloir. L’une était entrebâillée, mais un rideau obstruait la fente. Le cocktail ingurgité stimulait son audace, il écarta le rideau, découvrit un petit cabinet, une sorte de penderie sans lumière, mais au fond de laquelle était entr’ouverte une autre porte donnant sur une pièce éclairée. Il s’avança et aperçut par réflexion dans la glace d’un cabinet de toilette une jeune femme appuyée à un lavabo. Elle eut un mouvement, et son visage fit face à la glace. À ces yeux gris, à la rectitude de la ligne des sourcils, il reconnut sans peine la fille de Blandin. C’était aussi la même courbe du front et la même expression hautaine un peu distante, d’autant plus curieuse qu’elle se retrouvait là dans un visage jeune et féminin.

Fâché de l’avoir surprise ainsi, il allait se retirer quand il vit dans la glace le visage se crisper, et une brusque douleur tordre la jeune fille qui s’écroula presque sur le lavabo en poussant un gémissement. Sans réfléchir davantage, il entra, s’empara d’une serviette humide dont il lui tamponna le visage et, la soulevant dans ses bras, passa dans la pièce voisine pour l’étendre sur le lit.

Elle s’était laissée faire sans résistance, geignant doucement, les yeux clos. Enfin elle les ouvrit, et devant le visage de Desmaisons qui l’observait en silence :

— Qui êtes-vous ? demanda-t-elle.

— Je suis monté par inadvertance, excusez-moi.

— J’ai déjà dû vous voir, reprit-elle, mais je souffre trop de la tête pour vous reconnaître. Laissez-moi, je n’ai besoin de rien, ce malaise va passer.

Il se leva, mais ne put s’empêcher de formuler un reproche paternel :

— Vous ne devriez pas…

— Quoi ?

— Boire au point d’être ainsi malade.

Elle fixa sur lui le regard dur de ses yeux gris, et dit :

— Idiot, je n’ai pas bu, je suis malade… Mais qui êtes-vous donc ? ajouta-t-elle encore.

— Je suis Bernard Desmaisons, le collaborateur de votre père.

Sous le coup elle sursauta, et d’une voix furieuse :

— Qu’est-ce que vous fichez ici ? Qui vous a permis ?

— Je voulais précisément vous expliquer…

— C’est trop fort ! M’espionner ainsi jusque chez moi. C’est lui qui vous a envoyé. Il ne me fichera donc jamais la paix. Eh bien ! Allez lui dire au vieux que j’en ai assez, vous entendez. Assez. Puisqu’il est heureux avec sa grue, qu’il ne s’occupe pas plus de moi que pendant toute mon enfance. Je suis assez grande pour faire ce qui me plaît, tout de même. Je le lui ai déjà prouvé et je le lui prouverai encore, continua-t-elle en ricanant.

D’abord médusé par l’inattendu de cette sortie, Desmaisons se ressaisit devant son caractère rageur et puéril.

— M. Blandin ignore que je suis ici, et ne m’a chargé d’aucune mission vous concernant.

— Alors, qu’est-ce que vous faites ici ? Je ne vous ai pas demandé de venir tout de même…

— Je m’excuse encore… C’est bien long et délicat à expliquer. Je suis, j’étais le mari de Cécile Morhange.

— Cécile ? La boniche ?

Desmaisons encaissa le coup.

— La boniche, acquiesça-t-il. C’est à cause d’elle que je suis ici…

— Mais elle est morte, reprit Jacqueline.

— Elle est morte, répéta Desmaisons en fermant les yeux. Mais je pensais, j’ai pu croire que, peut-être vous songiez ce soir à elle…

Un instant, Jacqueline le dévisagea avec stupeur, puis dit en ricanant :

— Écoutez, mon brave, Cécile était au fond une bonne fille, mais quant à repenser à elle, ce soir, vous reconnaîtrez que j’ai d’autres soucis…

Et comme si tout en parlant machinalement elle avait réfléchi, elle s’interrompit pour déclarer :

— Mais, voyons, tout ce que vous me racontez ne tient pas debout.

— Tout ce que je vous raconte ne tient pas debout, reconnut bien volontiers Desmaisons.

— Oh ! Ma tête, soupira Jacqueline. Et vous venez me déballer tout ça au moment où j’ai cent personnes chez moi et une migraine à me faire péter le crâne… Dites-moi plutôt la vérité : c’est mon sacré père qui vous a envoyé ?

Devant cette insistance, et ce ton, Desmaisons lâcha sans ménagement, avec une lenteur calculée :

— Je répète qu’il n’y est pour rien. Je suis ici parce que j’ai des raisons de penser que le fantôme de ma femme est chez-vous ce soir.

La jeune Jacqueline en resta deux secondes les yeux ronds. Puis elle fit entendre une sorte de gloussement :

— Écoutez, mon vieux, vous qui donnez aux autres le conseil de ne pas boire, vous devriez commencer par vous surveiller. Mais je ne suis ni en humeur, ni en état d’entendre vos plaisanteries…

Elle n’acheva pas, une nouvelle nausée la saisit Desmaisons se précipita avec la serviette.

— Ah ! Le chameau soupira-t-elle. Et dire qu’il faut que ça arrive ce soir !

De douleur, elle roulait la tête sur le traversin comme un enfant rageur. Enfin, le mal parut céder, elle put se redresser.

— Vous, dit-elle à Desmaisons, commencez-moi par foutre le camp. Je ne veux pas avoir à le répéter. Je dégobille, mais ça passera. Et si ça ne passe pas, je le ferai passer. Laissez-moi seule.

Elle se retourna d’une seule pièce face au mur. Il n’y avait pas à insister. Desmaisons quitta la pièce. La musique le ressaisit dès la porte franchie. Il passa la main sur son front. Quoi ? Était-ce là Jacqueline Blandin ? Il songea au soupir du patron : « Ayez donc des enfants ! » On pouvait se lamenter, en effet. Il gagna l’entrée et, abandonnant son chapeau introuvable, retrouva avec plaisir la pureté silencieuse de l’air nocturne. Mais qu’était venu faire Cécile auprès de cette furie hargneuse ? Y avait-il eu malentendu ? Était-ce à quelque autre personne, perdue dans la foule des invités, qu’il aurait dû s’adresser ?

De retour chez lui, il consulta le cadre : la parcelle était encore rue des Plantes. Comment pouvait-elle rester en pareille compagnie ? S’amusait-elle en cet atelier empuanti, au milieu de cette foule hurlante ? Fallait-il donc imaginer une Cécile si lasse de la paix des cimetières que la moindre réunion d’une bohème agitée pût lui sembler attrayante ? Était-ce cette vie-là qu’elle aimait, qu’elle regrettait peut-être ? La Cécile qu’il avait connue, cru connaître, douce, réservée, attentive à son intérieur, en apparence soucieuse de son seul bonheur domestique, dissimulait-elle sous ces dehors paisibles un appétit de bruit, de jeux, de chahut, le goût des nuits blanches et de l’alcool à pleins verres ? Il se souvint qu’un jour elle lui avait avoué qu’elle aurait aimé danser. Était-ce cela qu’il n’avait pas compris, et qu’on voulait maintenant lui donner à entendre ?

Il s’en trouva plus désemparé encore qu’au temps où il subissait les affres de la jalousie. Qu’était-ce à dire ? Même par-delà la mort, ne pourrait-il plus connaître à cause d’elle le calme ? Tous les tourments du soir où elle était passée poste restante, où elle s’était rendue dans la rue inconnue, revinrent l’assaillir, multipliés par le sentiment de son impuissance présente. D’elle, il ne pouvait plus espérer aucune explication. Le fantôme devenait plus inquiétant que la vivante… Et elle ne quittait toujours pas la rue des Plantes !…

Ainsi, pour celle qu’il avait promue son guide éthéré dans les régions ténébreuses, celle dont il attendait la révélation des grands mystères, il avait tout sacrifié : repos, travail, habitudes, pensées, et jusqu’à une part de sa raison peut-être… Et voilà qu’elle replongeait au plus noir, au plus bête, au plus vulgaire de la vie !… La statue de sa Béatrix tombait devant lui en poussière… Il en était plus cruellement frappé encore que de l’infidélité de la vivante. Il restait seul, stupide, anéanti, au milieu des reliques en vain rassemblées.

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