XL

Wolfrang et Sylvia, un quart d’heure après avoir quitté les couloirs secrets de la maison du bon Dieu, se trouvent dans de pareils réduits ménagés derrière les appartements du rez-de-chaussée de l’hôtel, occupé par le duc et par la duchesse della Sorga.

WOLFRANG,à sa compagne. – L’épreuve touche à sa fin, ma Sylvia bien-aimée. Écoute la voix de cette damnée en ce monde.

LA DUCHESSE DELLA SORGA. – Malheur à moi ! malheur à moi ! j’ai pour toujours perdu le respect et l’attachement d’Ottavio ; il ne sera plus pour moi le fils dont, malgré le désordre de mes mœurs, la tendre vénération était si chère et si douce à mon cœur. Mon fils sera désormais pour moi un juge inexorable, devant qui je serai toujours forcée de baisser les yeux. En vain j’aurai imposé, j’imposerai à tous, à force de ruse et d’hypocrisie, l’estime et la déférence ; que m’importe, hélas ! Ottavio possède maintenant les honteux secrets de ma vie. Il l’a jugée tout entière d’après le fait qu’il a surpris ; et sans cesse, sans cesse ! je serai poursuivie par cette pensée : « Je suis un objet d’invincible répulsion pour mon fils ! » Les semblants d’affection qu’il me témoignera, non par pitié, mais afin de ne pas troubler le repos de son père, en lui révélant son déshonneur, seront à mes yeux autant de sanglants sarcasmes ; ils me rappelleront ce temps à jamais perdu où je me reposais de ma dissimulation, de ma perversité, en m’abandonnant à mon amour pour mon fils, le seul sentiment chaste et vrai que, de ma vie, j’aie éprouvé peut-être ! C’était comme une source fraîche et limpide, où je purifiais mes lèvres brûlantes, souillées par des baisers adultères. L’innocence de cette âme adorable me reposait de mes débordements ; j’éprouvais alors un calme délicieux : c’était le côté irréprochable de mon existence, car je chérissais aussi passionnément mes enfants que j’étais passionnément chérie par eux, par Ottavio surtout, car le caractère de Felippe, devenu morose, jaloux et atrabilaire, repoussait souvent l’expression de ma tendresse pour lui-même. Je l’aimais à l’égal de son frère. Pauvre Felippe ! les médecins ont déclaré ce matin au duc, m’a-t-il dit, que, seul, l’air natal pouvait rendre notre fils à la santé, et qu’il nous fallait, sans délai, l’envoyer en Sicile. Son départ me navre, car je resterai seule avec Ottavio, dont la présence me glace d’effroi.

Long silence.

Ah ! mes jours ne seront plus, je le crains, qu’une longue torture. Je n’avais jamais connu le remords, l’impunité me bronzait, je marchais dans le vice d’un pas ferme, le front victorieux, le regard superbe. Et voilà que, moi qui n’ai rougi devant personne, je rougis devant mon enfant ! et voilà que, pour la première fois, je regrette mes égarements, parce qu’ils m’ont à jamais aliéné mon fils ! Et l’âge vient, menaçant, implacable ; et bientôt elle sonnera, l’heure de la vieillesse, mortelle à l’amour. Cette heure si souvent redoutée par moi, je la voyais pourtant parfois s’approcher sans trop de regret. Toujours honorée, je me serais impunément livrée, grâce à mon masque, à l’entraînement de mes passions ; et, forcée d’y renoncer ou de les refréner, je me consolais d’avance en m’abandonnant tout entière aux ineffables jouissances de l’amour maternel. Déception ! déception ! bientôt ma vieillesse se traînera bourrelée, en proie aux ardents regrets du passé, si la chaleur de mon cœur survit aux années. Sans consolation dans le présent, épouvantée de l’avenir, mes cheveux blanchiront sous les mépris de mon fils !…

Nouveau silence.

Et ce n’est pas tout : la haine, la jalousie déchireront mon cœur ; oui, malgré ses dédains, ses outrages, ce Wolfrang, je l’aime autant que je l’abhorre. Cette passion insensée me bouleverse, me brûle, me tue… Je souffre, oh ! je souffre à en pleurer !

Sanglot suivi d’un nouveau silence.

En vain je me suis humiliée, avilie jusqu’à un aveu ! À cet aveu, cet homme a répondu par le dédain et le sarcasme ! Il se rit de la vieille femme éhontée : il aura confié ma dégradation à cette Sylvia, elle si jeune, si belle, si adorée ! Oh ! je la poignarderais avec délices ! Quelle volupté sanglante, de suivre les progrès de son agonie, de boire ses larmes, et, penché sur elle, d’aspirer son dernier souffle ! Mais, non ! je suis trop lâche ! elle vivra, toujours adorée de ce Wolfrang : et moi, moi !

Cri déchirant.

Ah ! que je souffre ! Vingt coups de couteau dans le cœur ne me feraient pas plus de mal !

Nouveau cri.

Oh ! la ! oh ! la ! Mais ce n’est plus du désespoir, mais ce n’est plus de la rage ! Oh ! la ! mon Dieu ! c’est une douleur aiguë, horrible ! Oh ! la ! mon Dieu ! pitié ! pitié ! Que je souffre !…

Sylvia et Wolfrang n’entendent plus que des gémissements entrecoupés de sanglots convulsifs, arrachés à la duchesse della Sorga.

Elle halète, elle se tort sur son lit. Sa souffrance morale atteignant son paroxysme, s’est changée en une sorte de lancination physique d’une acuité intolérable ; sa douleur lui arrache des gémissements étouffés.

SYLVIA,effrayée. – Oh ! viens, viens, Wolfrang, j’en ai trop entendu. Ce monstre m’épouvante ! Quel châtiment, Dieu juste ! Ah ! tu dis vrai, elle est damnée en ce monde ; l’enfer est dans son cœur !

WOLFRANG. – Écoute encore, ma Sylvia… (Il conduit la jeune femme à l’extrémité du couloir secret, derrière la chambre du duc della Sorga.) Écoute encore le père fratricide, puis le fils fratricide, et l’épreuve sera complète.

LE DUC DELLA SORGA. – Non, plus de crainte ! plus de crainte ! j’ai déjoué d’avance l’accusation que Felippe, dans son infernale méchanceté, pouvait porter contre moi. J’ai lu à mes compagnons d’exil la lettre du secrétaire du roi, et le billet écrit par mon frère Pompeo une heure avant son supplice. Non-seulement je suis ainsi pour jamais à l’abri de tout soupçon, mais cette révélation explique une trahison demeurée jusqu’ici mystérieuse. Mes compatriotes s’efforçaient toujours, mais en vain, de la pénétrer ; leur constante préoccupation à ce sujet pouvait d’un moment à l’autre devenir pour moi périlleuse ; ce péril est désormais écarté, tout est maintenant expliqué. L’aveu fait par moi de la félonie de mon frère m’a valu, de la part de mes compagnons d’exil, de nouvelles assurances de sympathie, de respect et de dévouement ; ils sont remplis de compassion pour moi ; ils ont frémi à la pensée de ce que j’avais dû souffrir, ainsi trahi dans mon affection fraternelle ; ils ont admiré mon courage, ma résignation, mon respect pour la mémoire d’un frère indigne dont j’ai généreusement caché le forfait jusqu’au jour où j’ai craint d’être accusé de ce forfait. Donc, plus de craintes, plus d’angoisses ; je défie maintenant la haine, la vengeance de Felippe.

Silence.

C’est bien : je suis assuré de l’impunité ; personne ne doute de mon patriotisme, de ma loyauté, l’on honore en moi le courageux proscrit ; je suis duc della Sorga, j’ai hérité les grands biens de ma maison. D’où vient donc que, depuis trois jours surtout, je me demande souvent si la mort ne serait pas préférable à la vie que je traîne ? Et pourtant je suis un homme ferme, sans scrupules ; je ne me suis pas repenti d’avoir livré mon frère ; je me suis dit et je me suis convaincu, ou peu s’en faut, que le salut de mon roi et de mon pays devait primer les sentiments de la nature et les règles de l’honneur vulgaire. Pompeo, par sa grande fortune, par son nom, par sa clientèle, était l’un des plus dangereux ennemis de mon maître et de la paix publique ; je l’ai poussé à une conspiration que j’ai livrée : j’ai fait ainsi décimer le parti révolutionnaire en Sicile, et mis pour longtemps le roi et son trône à l’abri de nouveaux périls ; j’ai fait acte de bon royaliste. J’ai hérité le titre et les biens de mon frère, c’était dans l’ordre des choses ; enfin, je sers mon maître dans l’exil, en neutralisant ou dévoilant, au besoin, les desseins des membres du parti dont je suis resté le chef. C’est bien. Ces raisons, après tout, sont soutenables ; elles ont suffi d’abord à calmer ma conscience ; d’ailleurs, j’étais et je me sentais à la hauteur de mes devoirs de père de famille. Je n’ai qu’à me louer de ma femme, elle n’a eu qu’à se louer de moi. Je n’ai aucun vice, je ne suis ni libertin, ni joueur, ni prodigue ; j’aime surtout la vie de famille. J’idolâtrais mes deux enfants, préférant, si possible, le disgracié, le difforme, parce qu’il méritait compassion… Voilà qui était encore louable ; et cependant mon amour paternel a été la source de mes cruels chagrins. Je me demandais avec une poignante amertume la cause des discords de mes deux enfants, jadis si tendrement unis et également aimés de leur mère et de moi. L’aversion de Felippe contre son frère me semblait incompréhensible ; mais, avant-hier, j’ai tout compris, tout… C’est moi, oui, c’est moi qui ai mis dans la main de Felippe le poison qu’il se préparait à verser à Ottavio. Mon fratricide a engendré un fratricide.

Silence.

Non, il n’est pas donné à l’homme de souffrir comme j’ai souffert, lorsque Felippe, ce monstre, – et de quel droit est-ce que je l’appelle monstre ? – m’a raconté, avec un calme épouvantable, comment quelques paroles de moi sur le hasard de la naissance, qui enrichissait le frère aîné au détriment du second fils, avaient fait germer en son âme l’envie que lui inspirait Ottavio ; comment cette envie, se développant et étant devenue de la haine, l’avait, poussé au fratricide. Et pourtant Felippe avait, depuis son enfance, tendrement aimé Ottavio. Mon exemple, mon exemple seul, a donc perverti, dénaturé mon malheureux enfant, si bon, si affectueux, et lui a donné la pensée de ce grand forfait, dont l’horreur a fait en moi justice de mes sophismes, lorsque j’ai vu, mon fils, tenter de le commettre, ce grand forfait !… Mon Dieu ! je n’avais qu’une vertu, l’amour paternel ; je ne sais quelle justice vengeresse a fait, de cette vertu, l’instrument de mon supplice éternel. J’ai commis un fratricide : il renaît et se redresse devant moi, incarné dans mon fils.

Nouveau silence, interrompu par l’entrée de Bartholomeo.

BARTHOLOMEO. – Monseigneur, il est bientôt une heure du matin ; tout est prêt pour le départ du comte Felippe.

LE DUC DELLA SORGA. – C’est bien, va le prévenir ; et pas de faiblesse, Bartholomeo : s’il résiste, ainsi que je le crains, tu as mes ordres.

BARTHOLOMEO. – Oui, monseigneur ; puisqu’il s’agit de la santé de ce pauvre enfant, je serai comme vous impitoyable.

LE DUC DELLA SORGA. – Les médecins, consultés par moi ce matin, m’ont déclaré, ainsi qu’à ma femme, que, si nous voulions conserver mon fils, dont la santé est si gravement altérée depuis quelque temps, il nous fallait l’envoyer en Sicile respirer l’air natal.

BARTHOLOMEO. – Ainsi donc s’explique, par son état maladif, ce changement dans l’humeur de ce pauvre enfant, changement qui nous paraissait incompréhensible, monseigneur.

LE DUC DELLA SORGA. – Hélas ! oui, la souffrance a aigri, dénaturé son caractère, et de là cette irritation, ces emportements contre son frère, dont nous cherchions en vain la cause.

BARTHOLOMEO. – Et vous ne voulez pas voir une dernière fois Felippe avant son départ, monseigneur ?

LE DUC DELLA SORGA. – Non ; il faut m’imposer ce cruel sacrifice… Cette séparation nous est si pénible, à Béatrix et à moi, que nous craignons notre faiblesse et les larmes de ce pauvre enfant ; il est si désespéré de nous quitter, que, peut-être, nous ne saurions pas résister à ses supplications, et sa santé, sa vie seraient compromises, s’il demeurait plus longtemps en France.

BARTHOLOMEO,sortant. – Vos ordres seront exécutés ; monseigneur ; il faut sauver ce pauvre enfant malgré lui.

LE DUC DELLA SORGA,seul. – J’ai dû cacher, même à Bartholomeo, le crime de Felippe, et trouver le prétexte de sa santé pour le renvoyer à Palerme. La présence de ce malheureux serait maintenant pour moi une torture de tous les instants ; ce serait vivre face à face avec mon fratricide, incarné dans mon fils. N’est-ce donc pas assez d’avoir sans cesse en ma présence Ottavio ?

FELIPPE,marchant avec agitation. – Partir, retourner à Palerme sous la conduite de Bartholomeo ?… Non, non, cent fois non !… L’on ne m’arrachera pas d’ici vivant ! Mon coup manqué, je ne pouvais plus espérer de le tenter ; Ottavio échappait à ma haine : mon père était en éveil. Je ne pouvais pas, lui non plus, l’atteindre ; car il a, aujourd’hui, prouvé son innocence aux yeux de ses compagnons d’exil ; mais il me restait une vengeance : le torturer par ma présence, et, seul à seul, lui jeter à la face le sang de mon oncle Pompeo, ou bien, devant notre famille, et par des allusions continuelles à son fratricide, torturer mon père… à coups d’épingle. Je renoncerais à cette vengeance, moi qui ne vis maintenant que de fiel et de haine ? Non, non, cent fois non ! Je ne partirai pas !

Silence.

Non, je ne partirai pas, à moins que l’on ne m’enlève de force, comme mon père m’en a menacé. Puisque je suis mineur et en puissance paternelle, il dira, oh ! il m’en a prévenu, il dira que les médecins m’ont ordonné d’aller respirer l’air natal, seul capable de rétablir ma santé, gravement atteinte. Si je me refuse à quitter Paris par caprice d’enfant gâté, l’intérêt de ma santé passant avant tout, l’on devra me traiter comme un pauvre fou récalcitrant, et m’embarquer, s’il le faut, de force en voiture. Et il en sera ainsi, et j’irai mourir de ma rage en Sicile en songeant que mon dessein avait été sur le point de réussir, qu’il s’en est fallu d’une pincée d’arsenic que je ne devinsse duc della Sorga environ par les mêmes moyens que mon digne père.

Silence.

Mes mesures étaient si habilement prises pourtant ! l’on aurait si bien cru au suicide d’Ottavio. Tout me servait si à point, jusqu’à son morne abattement provenant de ce chagrin soudain et profond dont je ne puis deviner la cause ! Le suicide aurait paru si naturel ! Damné soit mon père, qui m’a surpris !

Silence.

Oh ! si je n’étais pas si lâche, je le poignarderais, ce bel Ottavio, tout chétif, tout bossu que je suis ; oui, je le poignarderais !… Mais, après, on me couperait le cou en France, ou je serais emprisonné jusqu’à la fin de mes jours ! Oh ! damné soit mon père ! C’est lui qui, par son exemple, m’a mis au cœur l’envie, la haine dont je suis rongé, dévoré ! Mon sang s’est tourné en fiel ! Et je serais réduit à l’impuissance de nuire à ceux que je hais, mon père le premier !

Silence.

Oh ! oui, je le hais ! Pourquoi, en enviant son frère, m’a-t-il appris, par son exemple, à envier, à haïr Ottavio jusqu’à la mort ? Car, autrefois je l’aimais, moi ; je n’étais pas né jaloux et méchant ; j’étais meilleur qu’un autre, puisque, laid et bossu, je me réjouissais, je me glorifiais dans la beauté de mon frère ! J’étais heureux alors… mais, depuis… mais depuis !…

Long silence.

Oui, damné soit mon père ! il m’a rendu méchant. Je ne puis redevenir bon, je ne vis presque que pour la haine. Et il veut m’empêcher de vivre ! il veut m’empêcher de me venger sur lui du mal qu’il m’a fait ! M’éloigner d’ici ?… Non ! non ! car, j’en suis certain, moi, je mourrais de rage en Sicile.

On frappe à sa porte.

Qui va là ?

BARTHOLOMEO,en dehors. – C’est moi, Bartholomeo, seigneur comte.

FELIPPE. – Entre. Que veux-tu ?

BARTHOLOMEO. – Seigneur comte, vous savez ce que Son Excellence votre père vous a dit ce soir ?

FELIPPE. – Quoi ?

BARTHOLOMEO. – Que les chevaux de poste seraient commandés pour une heure du matin. Ils sont arrivés, vos malles sont placées sur la voiture, le postillon est à cheval, et l’on vous attend.

FELIPPE. – J’ai dit à mon père que je ne partirais pas ; va-t’en !

BARTHOLOMEO. – Son Excellence a choisi cette heure de la nuit pour votre départ, afin d’épargner à madame la duchesse et à votre frère le chagrin des adieux, et puis afin de…

FELIPPE. – Sors d’ici !

BARTHOLOMEO. – Un mot encore, seigneur comte, et ce mot vous fera changer de résolution. Son Excellence votre père a aussi choisi pour notre départ l’heure de la nuit, parce que, si votre résistance amenait malheureusement un scandale, il n’aurait d’autres témoins que les gens de l’hôtel.

FELIPPE. – Qu’est-ce à dire ?

BARTHOLOMEO. – Il y a en bas un commissaire de police et ses agents.

FELIPPE. – Que m’importe, à moi ?

BARTHOLOMEO. – Son Excellence a déclaré à qui de droit que votre vie serait compromise, au dire des médecins, par la prolongation de votre séjour en France, et que…

FELIPPE. – Et que, si je refusais de partir de bon gré, l’on emploierait la force ?…

BARTHOLOMEO. – Oui, seigneur comte. Mais vous n’obligerez pas Son Excellence à recourir à une pareille extrémité. Je vous conjure de…

FELIPPE. – Hors d’ici, misérable !

BARTHOLOMEO. – Seigneur, écoutez-moi.

FELIPPE. – Ne me pousse pas à bout ! je te…

BARTHOLOMEO. – Seigneur, vous pouvez frapper un vieux serviteur qui vous a porté tout enfant dans ses bras, mais je ne bougerai pas d’ici ; j’appellerai par cette fenêtre les agents, et, avec tous les ménagements possibles, vous serez porté dans la voiture, où, du reste, je vous en préviens, deux agents monteront avec nous, afin de me prêter assistance en route, si vous renouvelez votre résistance. Ils ne nous quitteront qu’à Marseille, lieu de notre embarquement pour Palerme.

FELIPPE. – Appelle ces hommes.

BARTHOLOMEO. – Je vous en conjure, seigneur comte…

FELIPPE. – Appelle-les donc !

BARTHOLOMEO. – Vous le voulez ?

FELIPPE. – Oui, ose !

BARTHOLOMEO. – Une dernière fois, seigneur, écoutez la prière du vieux Bartholomeo : résignez-vous à ce que vous ne pouvez empêcher.

FELIPPE. – Jamais !

BARTHOLOMEO. – Seigneur, réfléchissez ; vous l’aurez voulu.

FELIPPE. – L’on ne m’arrachera d’ici que mort !

BARTHOLOMEO. – Non pas mort, Dieu merci ! mais vivant, (On entend le bruit d’une fenêtre qui s’ouvre et la voix du majordome appelant : « Psitt ! Psitt ! ») Seigneur, ils vont monter.

FELIPPE,à part. – Malheur à moi ! je ne saurais résister. Il faut me soumettre… Oh ! ma vengeance !… Damné soit mon père ! (Haut). Marchons !

BARTHOLOMEO,à la fenêtre. – Messieurs, ne montez pas, nous descendons.

Au bout de peu d’instants, l’on entend le roulement d’une voiture qui sort de la cour de l’hôtel.

Wolfrang et Sylvia ont bientôt regagné leur demeure par le passage souterrain aboutissant aux couloirs secrets.

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