XVII RÉCONCILIATION DE JEAN SANS PEUR ET DE LOUIS D’ORLÉANS

Ce qu’il y eut de plus étonnant, ce fut la disparition de la reine. Pendant la période de quinze jours qui suivit, le roi, malgré les exorcismes des moines, malgré les efforts des guérisseurs, demeura en état de démence, et on lui cacha l’événement dont s’occupait tout l’Hôtel Saint-Pol.

Disons tout de suite qu’Odette de Champdivers, en proie elle-même à une fièvre violente, ne parut pas auprès du roi. Cette fièvre s’était déclarée le jour même où Saïtano avait pénétré dans son appartement et lui avait un instant touché la main.

En cette période, aussi, Louis d’Orléans renforça la garnison de l’Hôtel Saint-Pol. La leçon avait été cruelle. Il en profita. Trois ou quatre capitaines d’armes furent disgraciés. Une demi-compagnie de Suisses fut licenciée. Le capitaine qui s’était tué fut pendu en effigie pour avoir laissé surprendre la porte. Ensuite de quoi, le régent lui fit faire des funérailles magnifiques et accorda une pension à sa veuve parce qu’en se tuant, il avait donné la preuve de son désespoir et de sa fidélité.

Le duc d’Orléans s’occupa naturellement de savoir où était la reine, car les bruits les plus sinistres couraient non seulement dans l’Hôtel Saint-Pol, mais dans tout Paris. Sa première idée fut de visiter lui-même le palais de la reine. Mais il trouva les portes gardées, et, à toutes ses questions, à toutes ses injonctions, le capitaine de Bois-Redon se contenta de répondre :

– J’ai l’ordre de garder les portes jusqu’au retour de Sa Majesté. Faites-moi pendre, monseigneur, car moi vivant personne n’entrera.

– Pas même le frère du roi ? s’écria le duc d’Orléans.

– Pas même le roi ! répondit Bois-Redon.

Une tentative pareille faite au château de Beauté échoua de même. Il fut impossible de pénétrer dans le château, ou d’obtenir le moindre renseignement. Un moment, on put croire qu’Isabeau s’était réfugiée à Wincestre, où le duc de Berry s’était retranché. Mais dès que l’orage qui avait menacé l’Hôtel Saint-Pol se fut dissipé, dès que Paris eut repris sa tranquillité – en apparence tout au moins – le duc de Berry rentra, assura qu’il n’avait pas eu l’honneur d’héberger Sa Majesté ; puis, comme la santé du roi semblait péricliter de jour en jour, le duc de Berry ne s’occupa plus que d’intriguer et de se composer une cour de solides gentilshommes afin d’être prêt à tout événement.

Arrivons au 15 novembre, et entrons dans ce palais de la reine si bien gardé que nul – pas même le roi ! – n’y pouvait pénétrer.

C’est le soir. Le palais est muet. Il est désert. Le service des filles d’honneur a été suspendu. Les salles d’armes seules sont occupées par les gardes. Muette et déserte la galerie à double colonnade.

Franchissons la salle de Théseus et celle de Mathebrune. Laissant au fond la porte de la chambre à coucher, ouvrons cette autre porte à gauche, et nous voici dans une large pièce bien éclairée par la lumière des cires. Une table, dans un coin, deux fauteuils, un dressoir qui supporte des pâtisseries et des friandises, et une sorte de divan, c’est tout l’ameublement de cette pièce. Ce que nous appelons un divan n’est autre chose qu’un amas de magnifiques peaux de fauves, lions et tigres, superposées dans un vaste cadre de bois lisse.

Sur ce divan, Isabeau de Bavière, à demi couchée, la tête sur un de ses bras replié.

Elle laisse pendre son autre main et s’amuse à taquiner sa tigresse Impéria, allongée sur les tapis.

Puis la reine tombe dans une méditation farouche. Ce sont d’effrayantes pensées qui doivent alors évoluer dans cette adorable tête, car de ses paupières à demi fermées, c’est un regard d’acier qui jaillit, mince et dur. Et alors, elle murmure :

– Orléans ?… Berry ?… Bourgogne ?… Lequel doit tomber le premier ?…

Et elle répète, comme du fond d’un songe mortel :

– Orléans ?… Berry ?… Bourgogne ?… Tous trois, je les veux morts. Tous trois me gênent. J’ai cru un moment que ce Jean sans Peur était un homme… Folle que j’ai été !… Est-ce qu’il y a des hommes capables de comprendre et d’oser ?… Pauvre race !… Oh ! si j’en trouvais un ! un seul !… que ne ferais-je pas de lui ! Un seul homme vraiment sans peur, vraiment digne d’être aimé de moi ! Si je savais que cet homme existe, j’irais le chercher, le trouver aussi loin qu’il fût, et je lui dirais… mais non ! Seule ! Je dois être seule… Et puisque ces trois me gênent, supprimons-les. Le moyen ? C’est de les jeter l’un sur l’autre… Bourgogne va venir… Viendra-t-il ?…

Elle écouta un moment, caressa la tigresse d’une main distraite et reprit :

– Je jetterai Bourgogne sur Berry, ou sur Orléans. Puis je ferai se dévorer les deux survivants. Mais par lequel dois-je commencer ?

Ici, Impéria se roula sur le tapis et poussa un long bâillement. Isabeau se redressa, la contempla, demeura une minute pensive, puis éclatant de rire :

– L’idée me plaît ! Orléans ? Berry ? Bourgogne ? C’est toi qui choisiras, ma belle !…

Isabeau courut au dressoir et choisit trois pâtisseries qu’elle déposa sur le tapis en disant :

– Attention : voici monseigneur de Bourgogne ; voici monseigneur d’Orléans ; voici monseigneur de Berry. Lequel des trois allons-nous manger le premier, dites, gourmande ?

La tigresse tourna un moment autour des friandises, les flaira en connaisseuse, et tout à coup, délicatement, d’un tour de langue, en fit disparaître une dans sa gueule.

– Orléans ! cria Isabeau en battant des mains. C’est Orléans que nous mangerons le premier. Bravo, ma belle ! Je n’eusse pas mieux choisi ! Le frère du roi… peste !

À ce moment, on gratta légèrement à la porte. Elle courut ouvrir. Bois-Redon était là…

– Viendra-t-il ? demanda Isabeau haletante.

– Il vient, dit Bois-Redon. Le voici !

La reine ouvrit une autre porte solide qui donnait sur une autre salle vaste et nue : le logis d’Impéria. La tigresse, habituée, s’y jeta aussitôt d’un glissement onduleux. Au même instant, Isabeau se retourna et vit Jean sans Peur qui entrait. Elle lui désigna l’un des deux fauteuils. Et comme il s’inclinait en refus respectueux :

– Allons, dit-elle d’une voix sérieuse, ce n’est pas la reine qui vous a fait venir ici, c’est Isabeau. C’est cette femme, Jean de Bourgogne, qui vous reçut, il y a douze ans, une nuit de juin, au bord du vaste escalier de granit, c’est la même qui vous apparut alors comme une déesse, la même femme devant qui vous avez tremblé de passion, la même qui vous aimait, Jean sans Peur ! La même qui vous promit la couronne de Charlemagne ! La même à qui, vous, avant de partir pour Dijon, où vous deviez tuer votre femme Marguerite de Hainaut, vous avez dit : J’accepte !… Donc, ne vous mettez pas en peine d’une vaine étiquette, et asseyez-vous devant Isabeau de Bavière.

L’attaque était formidable.

– Asseyez-vous, ajouta-t-elle d’un ton bref, en prenant place elle-même dans l’un des fauteuils.

Et comme il hésitait.

– N’ayez aucune crainte. J’ai eu cent occasions de vous atteindre par le fer ou par le poison. Si j’avais voulu votre mort, il y a des années qu’on ne parlerait même plus de vous.

– Madame, si j’ai accepté de suivre votre capitaine, seul, sans escorte, sans dire à personne que je venais ici, n’est-ce pas la preuve de ma confiance ? Nul ne sait où vous êtes. Tandis qu’on vous croit bien loin, vous vivez secrètement dans votre palais. Nul ne sait que je suis venu. Si j’étais tué, qui donc saurait où est mon cadavre ? Pourtant, je suis venu. C’est que j’ai voulu me disculper, vous apprendre ce que vous ignorez, vous dire…

– Que lorsque vous êtes arrivé à Dijon, interrompit Isabeau, vous avez vu votre femme se dresser devant vous, prévenue déjà de ce que nous avions résolu : je le sais ; je l’ai su tout de suite.

Jean sans Peur demeura stupéfait. La reine ajouta :

– C’est ce qui fait que je vous ai pardonné, et… que vous êtes vivant. Ce que je n’ai pu vous pardonner, c’est de n’être pas venu à moi. Quand vous avez cru tout perdu, au lieu d’aller vous faire battre par Bajazet, il fallait regagner l’Hôtel Saint-Pol, et nous eussions ensemble combiné un autre plan de grandeur et de gloire. Je vous ai fait venir pour vous dire cela… Et autre chose encore.

Isabeau s’était levée.

– Madame, balbutia Jean sans Peur, ce fut, il est vrai, l’erreur de ma vie. Mille fois je l’ai regrettée amèrement, et ce soir, en vous voyant telle que dans mes rêves je vous ai si souvent appelée, mon regret devient du désespoir.

– J’avais encore ceci à vous dire, duc ! reprit Isabeau. Depuis votre retour à Paris, vous me fuyez. Pourquoi ? Suis-je donc de celles dont on a peur ? Passez en revue les plus belles de votre cour et de la cour de France. Nobles et bourgeoises, demoiselles et filles du peuple, cherchez ! Et regardez-moi.

– Vous m’affolez, murmura Jean sans Peur. Ne vous jouez pas de moi !…

– N’ai-je pas ma beauté ? continua la reine d’un accent de gravité qui, en effet, l’affolait. J’ai mon orgueil aussi. Et mon orgueil, c’est ma beauté. Je sais que nulle n’est plus belle que moi, je le sais, j’en suis fière, et je demande pourquoi Jean de Bourgogne s’écarte de moi…

Elle était haletante, et qui sait ? peut-être sincère !

Jean sans Peur se leva, lui aussi, et, la voix ardente, les lèvres brûlantes :

– Vous me demandez pourquoi je me suis écarté de vous ! Isabeau, j’ai souffert, j’ai pleuré ; oui, moi, j’ai pleuré…

Il le croyait !

Il était sous le coup de la passion qui crée des mirages, mêle songe, mensonge, vérité, détruit la perspective, abat les points de repère, précipite au chaos les sentiments de l’homme.

– Savez-vous pourquoi je vous ai fuie ? râla-t-il en joignant les mains. On dit…

Il s’arrêta, recula. Vraiment, la jalousie grondait en lui.

– Que dit-on, voyons ? sourit la reine.

Et il se fût damné pour ce sourire.

– Le duc d’Orléans… bégaya-t-il.

Elle éclata de rire, à demi renversée en arrière.

– On dit donc, reprit-elle, que le frère du roi a eu mes faveurs . C’est juste, que n’a-t-on pas le droit de dire de la reine qui passe pour appeler dans la couche royale jusqu’à son capitaine des gardes, cette brute de Bois-Redon !

– Madame… frémit Jean sans Peur.

– Laissez donc, interrompit-elle avec un suprême dédain. Le duc d’Orléans, ce n’est pas assez. On dit aussi Hélion de Lignac. Vous le connaissez. Demandez-lui. On dit aussi le duc de Berry. Mais celui-là est discret, ne lui demandez rien. On dit aussi Savoisy, la Tremoïlle, Coucy, Châtillon, Puisieux, – et dans un éclat de rire terrible : on dit aussi Capeluche, oui, pourquoi pas ? Capeluche ! Entendez-vous ! l’exécuteur des hautes œuvres ! Capeluche que j’ai trouvé si beau le jour d’une exécution par la hache que je lui ai fait tout de suite savoir ! On dit…

– Grâce, madame ! rugit Jean sans Peur, la main à la poignée de sa dague.

– Voici ce qu’on ne dit pas, reprit tout à coup Isabeau d’un accent d’incomparable fierté. Voici ce que nul ne dira de la reine, pas même vous : c’est qu’Isabeau de Bavière n’a aimé qu’un homme dans sa vie, qu’à cet homme elle s’est offerte avec tout son cœur, que cet homme lâche et menteur a fui après s’être engagé à elle par serment, que dis-je ! par la chaîne d’une effrayante complicité, et que depuis ce temps, Isabeau veuve… entends-tu ! veuve ! Isabeau a tellement pris les hommes en horreur et détestation qu’elle préférerait choisir ses amants parmi les fauves des cages royales plutôt que de subir la honte d’appartenir à l’un de ces hommes, manant, bourgeois, bourreau, prince ou roi !…

Jean sans Peur tomba sur les genoux, baissa le front jusqu’à lui faire toucher le tapis, et cria :

– Écrasez-moi !…

– Debout ! fit rudement Isabeau. Songez donc que si l’on nous voyait ainsi, on ajouterait votre nom à l’interminable liste ! Je ne veux pas, moi ! Capeluche, oui, soit ! Mais Jean sans Peur, ah ! non !…

Et comme il obéissait, comme il se relevait, livide, glacé, cinglé au sang par cette admirable apostrophe, brusquement, elle s’abattit dans ses bras et se prit à sangloter.

C’était le trait final. Trait de génie de la plus étonnante tragédienne qui ait paru sur la scène du monde. Et encore une fois, qui sait si par auto-suggestion elle n’était pas sincère à cette minute ? Quoi qu’il en soit, leur but, à tous deux, était atteint. Elle avait fait venir Jean sans Peur pour tenter de l’armer encore à son service, et Jean sans Peur se livrait pieds et poings – cœur et corps, force et pensée, comme elle avait jadis exigé. Quant à lui, il était venu dans le vague espoir qu’Isabeau pouvait être encore, peut-être, l’instrument de son ambition – et Isabeau, maintenant, lui disait :

– Cet homme qu’on dit que j’aime, je veux qu’il meure ! Je sens, je vois que vous ne croyez à aucun des autres, mais que celui-là…

– Orléans est mon ennemi mortel, dit Jean sans Peur d’une voix assombrie.

– Il est donc naturel que son nom vous ait frappé plus que celui des autres.

– Oui. Je le haïssais sans savoir pourquoi. Je croyais seulement détester en lui le rival de ma puissance, l’homme qui régit le royaume – je haïssais en lui…

– Mon amant ! Eh bien, je vous le livre.

– Oh ! fit avidement le duc de Bourgogne, si cela était ! S’il pouvait se faire que vous le haïssiez, vous aussi ! Par le Christ, je jure qu’alors…

Isabeau de Bavière sourit :

– Ne jurez rien. Je ne hais pas Louis d’Orléans. Mais vous le haïssez, vous. Et cela suffit. Il est votre ennemi. Donc, il devient le mien. « Entre vous et moi, rien de vivant !… » Vous soupçonnez Orléans. Eh bien, périsse Orléans ! Prenez garde ! je ne parle pas en vain. Vous me forcez à condamner cet homme. Je le condamne. C’est vous qui devez exécuter la sentence. Prenez garde ! Car si cette fois encore vous reculiez, si vous aviez peur encore, je croirais…

– Louis d’Orléans mourra ! gronda Jean sans Peur transporté.

– Oui, dit-elle lentement, que Louis d’Orléans tombe puisqu’il s’est mis en travers de votre chemin, puisque vous le haïssez… rien de vivant entre vous et moi ! Mais il ne faut pas que vous soyez soupçonné. Ni vous, ni aucun homme à vous ne doit être accusé… Me comprenez-vous ?

– J’entends, dit Jean sans Peur. Et tel est aussi mon avis. L’affaire sera promptement menée sans que ni moi ni aucun des miens n’y paraissions.

– Quelque bravo bien stylé, bien payé… oui : c’est le mieux. Et pour que Paris ne puisse vous soupçonner, pour que nul ne puisse même penser qu’Orléans est tombé sous les coups de Bourgogne…

Elle s’arrêta, médita plus profondément.

– Ceci sera plus difficile, dit Jean sans Peur attentif.

Ils échangeaient ainsi d’une voix basse et calme des paroles de crime. Ils s’étudiaient.

– Oui, c’est cela ! dit soudain Isabeau : une réconciliation publique, éclatante ; il faut que la mort suive de près cette réconciliation ; de si près que nul n’ait la pensée d’imaginer que Louis d’Orléans est tombé sous les coups de son nouvel ami.

Le duc de Bourgogne frissonna. Il se penchait, sur cette âme féminine et reculait devant l’abîme de ruse féroce qu’il entrevoyait. Il reculait simplement parce qu’il avait peur pour lui-même. Cependant, si le conseil d’Isabeau lui prouva qu’elle n’avait pas seulement l’énergie d’un chef de guerre, mais aussi toute l’astuce d’un espion, il convint que ce conseil était bon, – et il l’adopta. Isabeau continuait :

– Ce n’est pas tout. Il faut que Paris s’accoutume à vous considérer comme un sauveur. Vous avez récemment fort bien joué ce rôle. Vous devez vous y tenir. Or, Paris en ce moment est inquiet de mon absence et croit que je prépare quelque bon coup de traîtrise contre lui. Eh bien, vous serez l’homme qui sauve et rassure Paris, l’homme, qui ramène la reine à l’Hôtel Saint-Pol… Je vais me rendre secrètement au château de Beauté. Nous sommes à mardi. Venez vendredi matin à ma rencontre, jusqu’à Vincennes. Vous m’y trouverez avec une faible escorte, et me ramènerez dans Paris.

Isabeau, alors, de son regard mortellement sérieux, fixa Jean sans Peur.

– Vous le voyez, dit-elle, je m’abandonne à vous. Un homme se levait entre vous et moi : je le condamne à mort. Mais vous, de votre côté, prenez garde ! Si quelque nouvelle Laurence d’Ambrun…

Isabeau n’acheva pas. Un geste d’une sauvage énergie traduisit la menace. Et. Jean sans Peur frissonna : l’image d’Odette de Champdivers s’évoquait en lui, et il se criait :

– Mais je l’aime, moi ! Cette fille qu’elle condamne et qu’il va falloir que je tue, insensé, je l’aime ! Eh bien, périsse Odette, de Champdivers. Je m’arracherai le cœur, mais je serai Roi !

À la suite de ce traité d’alliance conclu entre Isabeau et Jean sans Peur, un double événement étonna Paris.

D’abord la réconciliation des ducs d’Orléans et de Bourgogne.

Et pour comprendre l’étonnement des bourgeois, il faut savoir que, dans la semaine qui venait de s’écouler, l’évêque de Liège, à marches forcées, avait amené trois mille hommes au duc de Bourgogne, que de Savoie et d’Autriche, il lui était venu huit mille mercenaires, ce qui portait à dix-sept mille combattants l’armée dont il disposait.

Ceci explique peut-être aussi l’attitude d’Isabeau – et aussi la facilité avec laquelle Louis d’Orléans accepta une réconciliation qui lui faisait horreur.

Bref, tous ces gens d’armes s’en retournèrent brusquement comme ils étaient venus, le camp du Pré-aux-Clercs fut levé ; en présence d’une immense assemblée, après une messe solennelle, le duc de Bourgogne et le duc d’Orléans, sur l’autel de Notre-Dame, se jurèrent « bonne amour et fraternité ».

Le deuxième événement fut la rentrée de la reine Isabeau en son palais de l’Hôtel Saint-Pol.

Elle y fut ramenée un beau matin par Jean sans Peur, qui alla la chercher au château de Beauté. Les bourgeois, persuadés que le duc de Bourgogne avait habilement et généreusement évité à Paris les désastres d’une guerre civile, cessèrent dès lors de le tenir en suspicion et le considérèrent comme le chef naturel du parti populaire.

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