XXIX LA CHASSE ROYALE

C’était vraiment un groupe fringant qui traversait la ville de Fontainebleau le lendemain matin, à la grande admiration des bourgeois qui, par des cris répétés de : Vive le roi ! traduisaient leur admiration enthousiaste.

Gillette, montée sur un cheval noir, peut-être trop vif pour elle – pourquoi lui avait-on fait monter ce cheval et qui en avait donné l’ordre ? – Gillette, jetant autour d’elle des regards inquiets, cherchant avidement le visage ami parmi les mille visages des rues et des fenêtres, Gillette, marchait aux côtés de la duchesse d’Étampes, et toutes deux étaient encadrées de gentilshommes, au nombre desquels Essé et La Châtaigneraie ne perdaient pas la jeune fille de vue.

Quant à Diane de Poitiers, elle caracolait en tête sur un fougueux étalon que bien des cavaliers réputés n’eussent pas osé enfourcher.

Catherine de Médicis, montant selon la nouvelle mode qu’elle avait inventée, c’est-à-dire la jambe droite appuyée sur un demi-arceau planté à l’arçon de la selle. Catherine chevauchait hardiment, heureuse de montrer le bas de sa jambe qu’elle avait fort belle, heureuse de montrer sa science de l’équitation, heureuse aussi d’échapper pour une matinée à l’insupportable mauvaise humeur de son mari le dauphin Henri, lequel d’ailleurs n’avait d’yeux que pour Diane de Poitiers.

Quant au roi, il était radieux. Sa haute taille dépassait la taille des gentilshommes qui l’entouraient.

Il portait beau, dans son pourpoint de velours cramoisi, serré par une ceinture d’or à laquelle pendait un couteau de chasse à manche d’or incrusté de pierreries.

Il parlait du cerf, il parlait des campagnes qu’il voulait entreprendre, il parlait haut, riait, complimentait des hobereaux dont les familles allaient se transmettre de génération en génération le mot aimable arraché au roi par sa bonne humeur ; car le roi, ce matin-là, eût complimenté l’univers entier.

On arriva en forêt.

L’événement désiré, souhaité ardemment par Gillette, ne s’était point produit ; elle n’avait pas aperçu le visage ami qu’elle avait tant cherché… Et déjà elle se repentait d’être venue.

Au carrefour, le cortège s’arrêta.

On fit un grand cercle autour du roi.

Les meutes encore accouplées s’alignaient hors du cercle. Les sonneurs de fanfares étaient rangés en bataille.

Sur un appel du roi, le grand veneur s’avança au rapport au milieu du cercle.

Le grand veneur salua d’abord le roi, puis, d’un geste moins profond, les chasseurs assemblés. Dans le grand silence qui s’était fait, il parla à voix haute et claire, comme un héraut d’armes.

Il résultait du rapport que l’animal avait été débusqué la veille près d’une mare qui se trouvait à cent pas de là, et que les voies partaient de cette mare pour aboutir à la grande hêtraie ; le dix-cors, flairant le danger, avait passé la nuit à brouiller ses pistes par des contre-voies, et il était maintenant embusqué au fond des hêtraies.

Le grand veneur se tut.

Le roi jeta un regard d’intelligence à La Châtaigneraie et à d’Essé qui ne le perdaient pas des yeux.

Puis, ayant remercié et félicité son grand veneur, il se tourna vers le peloton des sonneurs et fit un geste.

C’était le signal de la chasse. Les fanfares sonnèrent.

Les chiens, découplés en un instant, s’élancèrent en compagnie serrée, jappant sourdement, quêtant et flairant.

Puis, ce fut le galop rapide des chasseurs partis en peloton.

Or, au moment où François Ier s’élançait à son tour, avec, eût-on dit, une certaine hésitation, comme s’il eût tenu à se laisser dépasser, à ce moment, un cavalier qui avait assisté invisible, à toute la scène du rapport, caché qu’il était dans les fourrés environnants, se mit à galoper à la hauteur du roi, tout en se tenant hors de son regard et en se dissimulant avec soin.

Ce cavalier, svelte, adroit, maniant sa mouture à travers les arbres avec une prestesse extraordinaire, portait sur le visage un loup de velours noir.

Il n’était pas de la cour.

Ce n’était pas non plus l’un des gentilshommes du voisinage accourus à la chasse.

Et enfin, qui eût pu l’examiner de près, malgré sa course rapide, n’eût pas tardé à reconnaître que c’était une femme.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Àl’instant précis où les cors avaient sonné, La Châtaigneraie s’était approché du roi et avait demandé à voix basse :

– Vos derniers ordres, sire ?

– Dans une demi-heure, soyez au Rocher de l’Ermite.

Alors, La Châtaigneraie avait repris sa place auprès de la duchesse de Fontainebleau, tandis que d’Essé occupait l’attention de la duchesse d’Étampes.

Or, le Rocher de l’Ermite était loin de la hêtraie signalée au rapport du grand veneur.

Ce Rocher de l’Ermite, ainsi appelé parce que jadis quelque cénobite y avait probablement élu domicile, était en réalité un entassement de rochers.

Éboulées les unes sur les autres, ces roches verdies de mousses formaient diverses anfractuosités, dont l’une, assez vaste, avait dû être jadis la grotte de l’ermite en question.

C’est vers cette grotte que galopait François Ier après s’être isolé du reste de la chasse. Il était toujours escorté par son invisible compagnon, – par le cavalier, ou plutôt par la cavalière au loup noir.

On a vu que la duchesse d’Étampes s’était jusque-là tenue auprès de Gillette.

Avec son instinct de femme jalouse et sa connaissance parfaite des ruses amoureuses de François Ier, elle avait tout de suite compris que la chasse n’avait d’autre but que de rapprocher le roi de Gillette.

La jeune fille n’avait, il est vrai, répondu à aucune des avances de la duchesse, et celle-ci avait pris le parti de chevaucher près d’elle sans lui parler, mais décidée à ne pas la perdre de vue un seul instant.

Or, au moment même où la chasse commençait, d’Essé avait brusquement sauté à bas de son cheval, en disant :

– Ces écuyers du château sont décidément de vilains drôles… votre bête est mal sanglée, madame…

En même temps, d’Essé faisait le geste de ressangler le cheval de la duchesse d’Étampes qui était d’ailleurs parfaitement sanglé.

– Merci, mon cher, dit la duchesse.

Et elle excita sa monture pour rattraper Gillette.

Mais elle n’eut pas fait vingt pas que la selle chavira ; la duchesse n’eut que le temps de sauter légèrement à terre.

– Quel maladroit je fais ! s’écria d’Essé qui lui-même mit pied à terre, mais cette fois plus lentement, et qui, tout en prodiguant les exclamations de regret, s’employa à seller la bête de la duchesse.

Celle-ci fouettait nerveusement l’air du bout de sa cravache et ne disait mot. Elle suivait des yeux La Châtaigneraie et Gillette qui filaient à la suite des chasseurs.

D’Essé n’en finissait pas, multipliant les excuses sur sa maladresse. Enfin, le cheval se trouva sellé, cette fois solidement, et aidée par son compagnon, la duchesse d’Étampes se remit en selle.

Alors elle regarda d’Essé droit dans les yeux.

– Encore une fois merci, dit-elle. Vous êtes certain que je n’oublierai pas l’important service que vous venez de me rendre, et qu’avant peu ma reconnaissance saura vous atteindre.

– Bien faible service, madame, fit d’Essé en pâlissant ; en tout cas, je suis sûr d’avoir été agréable au roi, en vous évitant un accident.

Puis la duchesse partit à fond de train, tandis que d’Essé la suivait d’assez près en songeant :

– Elle siffle bien, la vipère ; et si le roi ne lui arrache les dents, je pourrais bien un de ces jours connaître sa morsure… Il faudrait que je me gare !

Pendant que d’Essé jouait ainsi son rôle dans le petit scénario que François Ier avait imaginé, La Châtaigneraie jouait le sien de son côté.

On avait donné à Gillette un cheval ombrageux ; et il ne fallait rien moins que l’habileté consommée et le sang-froid de La Châtaigneraie pour éviter un accident.

Àchaque instant le gentilhomme saisissait la bride de Gillette et arrêtait le cheval pour le calmer. Il en résulta qu’ils se trouvèrent bientôt en arrière de la chasse.

– Rejoignons ! fit tout à coup La Châtaigneraie.

Gillette, préoccupée de n’avoir pas aperçu celui qu’elle avait cherché des yeux, Gillette, tout entière à ses pensées de tristesse, ne fit pas attention qu’à ce moment, ils se trouvaient à l’embranchement de plusieurs routes…

Quelle était la bonne ?

Sans doute celle qu’avait prise La Châtaigneraie, car il s’y était engagé sans hésitation, et lui qui jusqu’ici avait fait tous ses efforts pour calmer la monture de Gillette, se mit soudain à l’exciter.

On galopa ainsi pendant dix bonnes minutes. Les bruits de la chasse s’étaient éteints. Gillette n’entendait plus que le bruit de son cheval et de celui de son compagnon.

Elle voulut arrêter.

Mais soit hasard, soit maladresse, la cravache de La Châtaigneraie s’égara à ce moment sur la croupe du cheval noir qui bondit furieusement.

Cinq cents pas plus loin, Gillette parvint enfin à arrêter sa monture et mit pied à terre en déclarant qu’elle n’irait pas plus loin.

– Je suis à vos ordres, madame, dit La Châtaigneraie.

Et lui-même sauta à bas de son cheval.

En même temps, il cingla violemment la bête qui partit à fond de train, immédiatement suivie par la monture de Gillette.

Cela s’était fait si rapidement que la jeune fille n’avait pu surprendre la manœuvre.

La Châtaigneraie éclata de rire.

– Nous voilà donc démontés ! fit-il. Je ne suis pas en peine de mes deux fugitifs qui rejoindront certainement… mais vous, madame…

Gillette garda le silence.

– J’y pense ! s’écria tout à coup La Châtaigneraie en se frappant le front ; nous sommes à deux minutes de la grotte de l’Ermite… Madame la duchesse peut s’y réfugier, pendant que j’irai à la recherche… Je pense que ce plan vous agrée ?

– Il me convient tout à fait, dit vivement Gillette.

Elle songeait que, pendant une heure, elle serait seule.

Aussi ne fit-elle aucune difficulté pour suivre La Châtaigneraie qui, en effet, au bout de quelques minutes de marche, arriva devant les roches. Le gentilhomme s’arrêta.

– Madame, dit-il, vous voici devant la grotte de l’Ermite ; vous y serez en sûreté et à l’abri ; si vous voulez bien m’y autoriser, je vais m’éloigner pour aller chercher quelque moyen de vous ramener à Fontainebleau.

– Faites, monsieur, murmura Gillette.

– C’est ici que je vous retrouverai, madame ?

– Oui… j’attendrai ici…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Avant de suivre Gillette dans la grotte de l’Ermite, quelques mots d’explication sur La Châtaigneraie.

Peut-être nos lecteurs n’ont-ils pas oublié la scène où François Ier avait promis Gillette pour femme à celui de ses trois gentilshommes favoris qui lui livrerait Manfred.

La Châtaigneraie, Sansac et Essé, décidés à unir leurs efforts, avaient tout simplement joué Gillette aux dés.

C’est La Châtaigneraie qui avait gagné.

On a vu que les trois favoris n’avaient nullement réussi à s’emparer de Manfred. Il en résultait qu’à moins de quelque gros service rendu au roi, La Châtaigneraie ne pouvait guère espérer devenir l’époux de Gillette.

Le gentilhomme s’était longtemps creusé le cerveau pour trouver quel éminent service il pourrait bien rendre au roi. Et il cherchait encore lorsque le roi, au matin, avant le départ pour la chasse, lui avait révélé son petit plan de viol.

La Châtaigneraie avait accepté son rôle avec enthousiasme. En effet, à Gillette devenue la maîtresse du roi, il faudrait un mari, – un mari dévoué, assez l’ami du royal amant pour ne pas gêner ses amours.

– Ce mari, ce sera moi, s’était dit le gentilhomme.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Gillette, le cœur palpitant, s’assit sur un banc de mousse qu’on avait formé dans le fond de la grotte.

Plus rouée, elle se fût demandé pourquoi l’active surveillance dont elle était l’objet venait de cesser tout à coup. Elle songea seulement qu’un merveilleux hasard lui venait en aide.

Elle palpitait, disons-nous. Car maintenant la pensée de fuir lui venait, précise et nette. Son plan fut vite fait : s’en aller au hasard, droit devant elle, jusqu’à ce qu’elle trouvât une maison où elle pourrait demander l’hospitalité.

Cette décision prise avec la fougue d’une joie qui ne laissait place à aucune hésitation, Gillette attendit deux ou trois minutes pour donner à La Châtaigneraie le temps de s’éloigner.

Enfin, n’y tenant plus, elle s’élança légèrement vers l’ouverture de la grotte.

Mais comme elle allait atteindre cette ouverture, une ombre intercepta soudain le rayon de soleil, un homme parut. Gillette jeta un cri d’angoisse et de terreur.

Cet homme, c’était François Ier.

La jeune fille, d’un bond, avait reculé jusqu’au fond de la grotte.

– J’étais inquiet, balbutia le roi. J’espère qu’il ne vous est rien arrivé de grave ?

Il continuait à avancer.

Gillette se trouva tout à coup acculée au fond de la grotte. Elle se vit perdue.

Une inspiration soudaine, une de ces inspirations qu’enfantent les cerveaux surchauffés de fièvre dans les moments suprêmes, – et elle dit :

– Il ne m’est rien arrivé, mon père !

François Ier s’arrêta court.

Ce mot que Gillette prononçait pour la première fois, ce mot qu’il avait en vain sollicité, ce mot de père se dressait maintenant entre la jeune fille et lui.

Père !… Il était père de cette enfant qu’il venait violer !

Et elle, hardiment, le regardait en face, d’un regard clair qui était la plus terrible accusation.

La lutte, dans le cœur de François Ier, dura quelques minutes, mortelles minutes pendant lesquelles Gillette n’osa risquer un pas, de crainte de rompre cette sorte de charme qui semblait paralyser le roi.

Mais, brusquement, François Ier darda un regard enflammé sur la jeune fille. Tout scrupule s’évanouissait en lui. Toute crainte s’effondrait. Sa pensée ne lui fournit plus que des images de luxure. Et même cette certitude d’inceste le fouetta.

Et il gronda, hagard :

– Qui t’a dit que je suis ton père ?…

Au loin, Gillette perçut une galopade.

François Ier, lui, n’entendit pas.

Il saisit la jeune fille par les deux poignets :

– Ton père !… Es-tu folle !… Je suis ton roi, je suis ton amant… Je t’aime, ne le comprends-tu pas ?…

Elle se raidit pour éviter son haleine brûlante.

– Je t’aime… bégaya-t-il avec un rire épais… Tu m’aimes aussi, toi n’est-ce pas ?… Tu m’aimes… dis que tu m’aimes… dis-le !…

Ses lèvres, furieusement, cherchèrent le baiser…

– Le voilà !… Sain et sauf !… Vive le roi !

Ces cris éclatèrent tout à coup, au moment où Gillette éperdue, rassemblait le peu qui lui restait de forces pour repousser l’homme exaspéré de passion.

François Ier se retourna, livide de fureur.

Il vit la grotte pleine de monde.

En tête des chasseurs accourus, la duchesse d’Étampes, qui lui prenait la main en disant :

– Oui ! Dieu merci, sain et sauf !… Messieurs, vive le roi !

– Vive le roi ! acclamèrent les gentilshommes.

Au loin, vers les hêtraies, les cors sonnaient victorieusement l’hallali…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Ce qui s’était passé :

La cavalière au loup noir avait, on l’a vu, galopé pendant quelques minutes à la hauteur du roi. Tout à coup, elle reconnut le chemin que suivait François Ier.

– Mais il va au Rocher de l’Ermite ! fit-elle en arrêtant son cheval.

Dès lors, les scènes qu’elle avait notées prirent toute leur signification : le roi demeurait en arrière, tandis que La Châtaigneraie entraînait Gillette.

Elle éclata de rire.

– Pauvre François ! murmura-t-elle, quel chagrin je vais lui faire en l’empêchant de commettre une infamie de plus !…

Elle se dressa sur ses étriers, écouta attentivement, et finit par entendre le son du cor dans les lointains de la forêt. Alors, elle lâcha bride et se lança dans un galop furieux…

Dix minutes plus tard, elle rejoignait la chasse, au moment même où la duchesse d’Étampes la rejoignait elle-même et constatait avec un sourire de rage l’absence de Gillette et du roi.

La cavalière aperçut la duchesse et s en approcha.

– Vous cherchez le roi, madame ? dit-elle, railleuse.

– Qui êtes-vous ?… demanda la duchesse étonnée.

– Que vous importe… Je suis une amie pour vous, puisque je viens vous dire que le roi se trouve en ce moment même à la grotte de l’Ermite, et qu’il n’y est pas seul.

En disant ces mots, la cavalière fit volte-face, et, s’éloignant rapidement, disparut dans la forêt.

Àcent pas de là, elle ôta son loup, et la belle et sombre figure de Madeleine Ferron apparut.

La duchesse n’avait pas perdu une seconde. Àpeine eut-elle entendu parler de la grotte de l’Ermite, qu’elle s’était écriée :

– Sotte ! J’aurais dû y penser !… Messieurs ! messieurs !…

Aux cris de la duchesse, une vingtaine de cavaliers s’arrêtèrent et l’entourèrent.

– Messieurs, dit la Duchesse en feignant une vive émotion, on me prévient à l’instant que le roi, désarçonné de son cheval, s’est réfugié au Rocher de l’Ermite. Je redoute un malheur…

La duchesse partit à fond de train, suivie par le groupe de cavaliers.

Quant à la Belle Ferronnière, ayant constaté que la duchesse partait dans la direction de la grotte, elle reprit tranquillement le chemin de Fontainebleau.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le roi, avec cette prodigieuse facilité de dissimulation qui constituait en sa nature de primitif le côté civilisé, le roi, en apercevant la duchesse d’Étampes, refoula le mouvement de fureur qui déjà crispait ses poings, et s’écria gaiement :

– Eh oui, messieurs, sain et sauf ! Par Notre-Dame, votre roi en a vu bien d’autres !…

Il disait cela à tout hasard.

– Vive le roi ! répétèrent les courtisans.

– Àcheval, messieurs, et finissons-en avec cet incident ridicule !

– Votre Majesté assistera-t-elle à l’hallali demanda la duchesse d’Étampes.

– Non… nous rentrons au palais.

– Cela fait deux hallalis de manques, François ! murmura Anne de façon que le roi seul l’entendît.

François Ier lui jeta un regard tel que d’Essé, qui surprit l’expression de ce regard, s’approcha de la duchesse et lui dit ironiquement :

– Je crois, madame, que si cela ne dépend que de Sa Majesté, la reconnaissance que vous avez bien voulu me promettre sera longue à m’atteindre.

– Nous verrons ! dit Anne d’un air de défi.

Et, se tournant vers Gillette qui, pâle et tremblante, faisait d’incroyables efforts pour se soutenir :

– Pauvre petite ! murmura-t-elle. Aurez-vous confiance en moi, maintenant ?… Mais voyons, vous sentez-vous de force à vous tenir à cheval ?… Je vous préviens qu’il serait très dangereux pour vous de ne pouvoir nous suivre… le roi voudrait sans doute, vous tenir compagnie…

– Je suis prête ! dit Gillette galvanisée.

Quelques instants plus tard, on se mettait en route pour Fontainebleau.

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